La mariage du Viking
travers le village, la jeune femme abreuvait Einar de questions.
— Où est celle qui, d’habitude, aide aux naissances ?
— Elle est morte.
— Avait-elle des potions, des plantes que je pourrais utiliser ?
— Oui. Personne n’a approché sa maison depuis sa mort. Tous la craignaient.
— C’est bien. Ainsi ils n’auront rien touché. Demandez-lui si sa femme saigne.
Einar s’exécuta, non sans montrer quelque étonnement devant le ton calme et tranquille de celle qui les accompagnait. « Si elle était un homme, se prit-il à songer, j’aurais tôt fait de m’en faire un allié. »
— Demandez-lui si elle a perdu les eaux, continua Meradyce.
— Pas encore, répondit Einar après avoir interrogé son frère.
— Et les douleurs ? Sont-elles très espacées ?
Enfin, ils arrivèrent devant une petite bâtisse, en dehors de l’enceinte du village, à l’orée d’un bosquet, non loin d’une rivière.
— Quel est cet endroit ? s’enquit Meradyce.
— C’est la maison des bains. C’est là que les femmes mettent leurs enfants au monde.
Sans rien ajouter, Meradyce suivit Hamar qui se ruait à l’intérieur. Cependant, elle s’arrêta à l’entrée, en constatant qu’Einar restait en retrait.
— Votre présence me sera nécessaire, dit-elle simplement.
— En quoi cela ?
— Je vais devoir lui parler, lui poser des questions.
— Soit, reprit Einar en la suivant de mauvaise grâce.
Déjà, Hamar avait chauffé les pierres afin de rendre l’air ambiant le plus chaleureux possible. Il s’agenouilla auprès de Gunnhild, allongée à même le sol, le visagetordu par la douleur. En le voyant, elle tenta un sourire qui se figea quand elle aperçut la Saxonne.
Einar lui expliqua hâtivement la situation, non sans observer avec un vif intérêt Meradyce qui, une oreille contre le ventre arrondi de Gunnhild, auscultait déjà la future mère. Puis, elle palpa doucement l’abdomen, d’une main si experte que le Viking ne douta plus un instant qu’elle fût sage-femme.
— Dites-lui de ne pas s’inquiéter, demanda-t-elle à Einar. Tout est en ordre. Elle peut me faire confiance ; j’ai mis au monde plus de cinquante enfants.
L’expression cynique d’Einar ne lui échappa guère, qui la força à ajouter :
— J’ai commencé à aider ma mère dès l’âge de neuf ans, et nous avons accouché des femmes dans tous les villages alentour.
Consciencieusement, Einar rapporta ces paroles à l’accouchée.
— Est-ce son premier enfant ? interrogea Meradyce.
— Oui, répliqua-t-il.
— C’est ce que je pensais. Dites-lui que le bébé est bien placé, mais qu’il est encore un peu tôt pour la délivrance.
Einar s’exécuta mais se détourna vite quand le visage de Gunnhild se crispa de nouveau sous la douleur.
— Dites-lui qu’elle doit respirer en haletant quand arrive une contraction, ajouta Meradyce.
Einar s’empressa de traduire, et la Saxonne joignit le geste à la parole :
— Comme ceci… Parfait. Demandez-lui maintenant de se lever.
— Comment ? interrogea-t-il, interloqué.
— Dites-lui de se lever. Elle doit marcher un peu.
— Il ne faut pas…
— A combien d’accouchements avez-vous assisté ? osa Meradyce d’une voix vibrante.
— Aucun, mais…
— C’est son premier enfant ; des heures peuvent encore s’écouler avant la naissance. La station debout favorisera la descente du bébé. Aidez-la à se lever, puis je vous demanderai, ainsi qu’à votre ami, de sortir.
Après avoir aidé Gunnhild à se mettre sur pied, Einar posa une main sur l’épaule de Hamar et, d’un signe de tête, lui indiqua la porte, soulagé qu’on n’eût plus besoin d’eux dans cette insupportable épreuve.
Ils allaient franchir le seuil, quand ils entendirent la Saxonne commander sur un ton péremptoire :
— J’aurai besoin d’un petit rondin de bois, pour le lui rouler sur les reins afin de soulager la douleur. Trouvez-m’en un.
Sans un mot, Einar acquiesça.
***
Tandis que les premières lueurs du jour teintaient l’horizon de traînées orangées, Einar, assis non loin de la maison des bains, s’efforçait d’ignorer les cris de Gunnhild en proie aux affres de l’enfantement. Face à lui, Hamar attendait aussi, l’air abattu, indifférent aux morsures du froid matinal.
La Saxonne ne s’était pas trompée. Plusieurs heures interminables s’étaient écoulées depuis qu’il l’avait entraînée
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