Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La naissance du roi Arthur

La naissance du roi Arthur

Titel: La naissance du roi Arthur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
Vom Netzwerk:
font
rares, mon vêtement est troué, ma peau frissonne lorsque le vent s’abat sur
moi. Le vallon que tu vois est mon grenier, mais je n’ai pas de blé à y
engranger. Que t’importe d’ailleurs, qu’importe à Gwendydd et à Rydderch que
j’aie passé la nuit dernière sans dormir, la neige au-dessus du genou et des
aiguilles de glace dans les cheveux J’ai peine à dormir tant les chagrins
m’agitent. Pendant dix et quarante ans j’ai tant souffert que maintenant la
joie me fait mal. Et depuis la bataille d’Arderyd, plus rien ne me touche, même
si le ciel tombait ou si la mer débordait… » Et Merlin se mit à pleurer
silencieusement, abondamment.
    « Viens avec moi jusqu’à la cour du roi Rydderch, dit
le musicien. Ta sœur Gwendydd se réjouit déjà de ton retour, ainsi que ton
épouse Gwendolyn. Toutes les deux se rongent l’esprit à
t’attendre ! » – « Joue-moi encore de ta harpe », dit
Merlin. Et le musicien se mit à jouer très longtemps des airs tristes qui
firent encore pleurer Merlin. À la fin, celui-ci se leva et dit :
« Emmène-moi chez le roi Rydderch afin que je puisse revoir ma sœur
Gwendydd et mon épouse Gwendolyn. »
    C’est ainsi que Merlin retourna à la forteresse de Rydderch.
Tous lui firent bon accueil, et le roi vint en personne le saluer à son
arrivée. Mais quand il vit tant de gens assemblés autour du roi et qui criaient
leur joie de l’avoir retrouvé, Merlin tomba dans le plus noir désespoir.
« Malheur ! s’écria-t-il, malheur à ce peuple qui ne sait pas
discerner l’ombre de la lumière et qui est incapable de comprendre le message
que je lui transmets ! Je veux retourner auprès des bêtes sauvages qui
sont mes amies ! Laissez-moi partir ! » Et il bouscula les
hommes qui l’escortaient, se précipitant vers le chemin qui menait vers la forêt.
Rydderch cria un ordre et ses serviteurs vinrent maîtriser Merlin. Rydderch le
fit mettre dans une pièce d’où il ne pouvait plus sortir. Mais, chaque jour, il
venait le voir et lui demandait de ses nouvelles. Et, chaque fois, Merlin
répondait : « L’ombre est de même nature que la lumière, et bien fou
est celui qui croit que c’est Dieu qui a séparé les éléments en bien et en mal.
Regarde-moi, roi Rydderch, et dis-moi qui je suis. Suis-je blanc ou suis-je
noir ? Quand tu le sauras, tu viendras me donner la réponse, et je te récompenserai
pour ton honnêteté. » Rydderch se demandait comment il ferait recouvrer la
raison à Merlin, car il avait nettement conscience que celui-ci n’était plus
capable de se diriger lui-même à cause de sa folie persistante. Le roi demanda
à Merlin de jouer de la harpe, et il en joua, faisant d’ailleurs sourire tous
les assistants. Mais, à d’autres moments, il les faisait pleurer et paraissait
se réjouir quand il les voyait se cacher pour verser d’abondantes larmes. Et,
chaque fois qu’un de ses gardes s’assoupissait, Merlin se mettait à hurler
comme un loup égaré dans une ville dont les habitants ne supportent pas d’être
envahis par ce qu’ils ne peuvent pas comprendre. Enfin, quand la nuit venait,
Merlin semblait n’avoir qu’une idée en tête : s’enfuir au plus vite et
regagner sa tanière dans la forêt. C’est pourquoi le roi Rydderch donna des
ordres pour qu’il fût enchaîné. Cela n’était pas du goût de Gwendydd, mais elle
voyait bien que c’était la seule façon de garder son frère près d’elle dans
l’espoir qu’un jour très proche il retrouverait toute sa raison.
    Dans la journée, deux gardes promenaient Merlin à travers la
ville. Il venait partager le repas du roi, assister à ses conseils. Il était
présent quand Rydderch donnait audience à des solliciteurs. Toujours encadré
par ses gardes, il s’asseyait dans le coin le plus obscur de la salle et ne
disait mot, se contentant de regarder ce qui se passait avec des yeux grands
ouverts, laissant passer d’inquiétantes flammes. Il se trouvait également là
lorsque le roi prenait un moment de détente au milieu de ses familiers, et, de
toute façon, Rydderch lui manifestait toujours un grand respect et une grande
affection.
    Or, un jour, Merlin vit le roi enlever, avec un geste
tendre, une feuille accrochée dans les cheveux de Gwendydd, au moment où elle
était venue s’asseoir près de lui. Il se mit à rire aux éclats.
« Qu’est-ce qu’il y a de si drôle ? » demanda le roi. Merlin ne
répondit rien et regarda

Weitere Kostenlose Bücher