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La Poussière Des Corons

La Poussière Des Corons

Titel: La Poussière Des Corons Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie-Paul Armand
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ses yeux.
    A partir de ce jour, je m’occupai de lui, je ne le laissai
plus à l’écart. Je lui demandais de tenir Jean pendant que j’étais occupée, je
lui racontais ses progrès de bébé. Lui se remettait à me parler de son travail,
et je l’écoutais, je m’intéressais à ce qu’il me racontait. Peu à peu, je me
rendis compte qu’il retrouvait sa gaieté, sa joie de vivre ; il redevenait
le Charles que je connaissais depuis toujours, plein de prévenances et de
tendresse, et je me sentais plus proche de lui.
    Sans que je m’en rendisse compte, ma tendresse pour lui évoluait.
Il y eut un jour où, lorsqu’il me dit bonsoir en m’embrassant sur le front, j’eus
envie qu’il me prenne contre lui et me serre dans ses bras. Le rouge aux joues,
je me détournai. Que m’arrivait-il ?
    Les jours suivants, j’éprouvai plusieurs fois la même
impression. Je regardais Charles avec d’autres yeux, je le découvrais. Jusque-là,
je le voyais sans le voir. Maintenant, je me prenais à admirer sa haute taille,
ses bras musclés, ses yeux clairs, sa mâchoire virile. J’avais envie qu’il se
comportât avec moi autrement que comme un frère.
    Quand il n’était pas là, il me manquait. J’avais Jean, bien
sûr, mais je voulais aussi Charles. Dès qu’il revenait, je me sentais heureuse.
Bientôt, je dus me rendre à l’évidence : sans m’en rendre compte, je m’étais
mise à aimer Charles, j’avais besoin de lui. Notre situation actuelle ne me
suffisait plus. Ce fut alors que je compris combien il avait dû souffrir depuis
notre mariage.
    Je fus heureuse de ma découverte. Je comprenais que l’amour
n’était pas forcément une passion, une folie, un coup de foudre. Il pouvait, au
contraire, grandir et croître peu à peu, sans qu’on s’en aperçoive, être fait
de tendresse, de douceur, de respect. Je prenais conscience que cet amour-là, à
mon insu, était venu emplir mon cœur. Et il était bien plus riche, bien plus
profond, que l’amour d’adolescente que j’avais cru éprouver pour Henri.
    C’était à moi d’aller vers Charles. Il m’attendait, il me l’avait
dit, et le moment était venu où sa patience allait être récompensée.
    Au mois d’octobre, il y avait son anniversaire. À cette
occasion, je confectionnai un repas de fête, mis ma jolie nappe sur la table, et
fis un gâteau. Je me fis belle, et, après avoir un peu hésité, je mis la robe
que je portais le jour de mon mariage. Lorsqu’il vit tout cela, il s’étonna, à
la fois surpris et ému :
    — Mais… pourquoi ?
    Je m’approchai de lui, rougissante :
    — Bon anniversaire, Charles…
    Je l’embrassai tendrement sur la joue. Nous avons pris le
repas à deux, comme des amoureux. Il semblait se créer entre nous une nouvelle
intimité. Dans la maison bien close, avec Jean qui dormait dans la chambre, j’avais
vraiment l’impression que nous étions une famille heureuse et unie.
    Après le repas, je fis la vaisselle, pendant que Charles
fumait tranquillement, dans son fauteuil. Ensuite, le cœur battant, je m’approchai
de lui. J’étais un peu intimidée, mais je savais ce que je voulais, et mon
amour tout neuf me soutenait. Je m’assis près de Charles, et murmurai doucement :
    — Charles, j’ai quelque chose à te dire…
    Je vis qu’il était intrigué par l’expression de mon visage, par
le sourire mystérieux que je n’arrivais pas à retenir, et peut-être aussi par l’exaltation
qui devait se lire dans mes yeux. Je repris, heureuse à l’avance de la joie que
j’allais lui apporter :
    — Charles, c’est ton anniversaire, aujourd’hui, et
je veux t’offrir un cadeau… Tu sais, lorsque tu m’as épousée, j’éprouvais pour
toi beaucoup de reconnaissance, et une amitié toute fraternelle. Tu m’as dit, tu
t’en souviens, que tu attendrais patiemment que je vienne vers toi. Eh bien, Charles,
ce moment est venu. Si tu veux encore de moi, je suis à toi. Voilà ce que je
voulais te dire… c’est mon cadeau d’anniversaire.
    Je sentais monter en moi une intense émotion. Charles me
regarda, et ce fut, dans ses yeux, comme si le soleil se levait. Tout son
visage exprima un émerveillement, un ravissement incrédule.
    — Madeleine ! C’est vrai ? Oh, Madeleine…
    Il se pencha vers moi, me prit les mains, les embrassa, avec
emportement, avec passion :
    — Oh, Madeleine ! Si tu savais…
    Sa voix tremblait de sanglots retenus. Je lui caressai la
joue, avec une

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