La Prophétie des papes

où Dieu sépare la lumière des ténèbres, prit une grande inspiration et lut un serment en latin. Tous ceux qui étaient présents devaient observer les procédures définies par la Constitution apostolique. En cas d’élection, ils auraient à défendre la liberté du Saint-Siège. Ils garderaient le secret et ne tiendraient compte d’aucun intérêt profane pour voter.
    Lorsqu’il eut terminé, les cardinaux, l’un après l’autre, touchèrent les Évangiles et déclarèrent :
    Â«Â Je le promets, je m’y engage et je le jure. »
    Diaz prit place à sa table et le cardinal Franconi avança lentement jusqu’à la porte de la Sala Regia. Il l’ouvrit et annonça d’une voix forte :
    Â«Â Extra omnes 6 ! »
    Par ces paroles, tous, sauf les électeurs et les conclavistes, recevaient l’ordre de partir. Plusieurs domestiques obéirent scrupuleusement, puis Franconi ferma la porte derrière eux et fit coulisser le verrou.
    Â 
    Hackel frappa à la porte de la chambre 202 de la Maison Sainte-Marthe. Le long couloir était désert.
    De l’autre côté de la porte, Giaccone demanda qui était là.
    Â«Â Le lieutenant-colonel Hackel des gardes suisses. »
    Quelques instants plus tard, la porte s’ouvrit. Giaccone portait un peignoir et des pantoufles. Il avait le teint pâle, son visage était encore plus ramolli que d’habitude.
    Â«Â En quoi puis-je vous aider, colonel ? Est-ce que tout va bien ?
    âˆ’ Votre Excellence, j’ai besoin de vous parler en privé sur une question urgente. Puis-je entrer ? »
    Giaccone hocha la tête, laissa Hackel entrer et referma la porte.
    Â 
    Â«Â Bon, maintenant, nous ne verrons plus rien », dit Krek en s’asseyant en face d’Elisabetta. Les caméras de télévision retournèrent sur la place Saint-Pierre.
    Â«Â Le conclave a commencé. Nous devons attendre. Mais pas trop longtemps, je pense. »
    Il y avait une carafe à whisky posée sur la table. Krek tira le gros bouchon rond en verre et s’en versa une bonne rasade.
    Elisabetta le regarda savourer une première gorgée. Elle ne sut pas quelle raison, autre que la curiosité, la poussa alors à demander :
    Â«Â Vous en avez, vous, des tatouages ?
    âˆ’ Voulez-vous les voir ?
    âˆ’ Non !
    âˆ’ Dommage. Chez nous les hommes, c’est une tradition qui court depuis la fin du XVII e siècle. Vous savez ce qu’ils signifient ?
    âˆ’ “Malachie roi. Gloire aux lémures.”
    âˆ’ Mes aïeux ! Comment avez-vous compris ça ?
    âˆ’ “La clef se trouve en B.” Le mot que vous avez adressé à Ottinger et qui accompagnait le livre.
    âˆ’ Je suis sincèrement impressionné ! » Krek avala une seconde lampée de liquide ambré. « Ce serait très bien que vous travailliez pour moi. » Il jeta un coup d’œil à sa montre, puis à la télévision. Il buvait plus vite, devenait plus volubile. « Marlowe était une personne importante, qui s’est associée à d’autres grands lémures anglais de son temps : Francis Walsingham, Robert Cecil, John Dee. Son message codé est devenu un cri de ralliement pour nous. “Malachie roi. Gloire aux lémures.” Le mot d’ordre de notre communauté. Les nombres ont pris une signification profonde. Les porter dans un endroit caché où seulement nous pouvions les voir… c’était très spécial. »
    Krek se versa un second whisky.
    Â«Â Et aujourd’hui, vous essayez de faire de Malachie une réalité, dit-elle
    âˆ’ Depuis la Seconde Guerre mondiale, il y a eu seulement six papes. Nous nous concentrons vraiment sur la prophétie, et durant la papauté de Jean-Paul II, il y a eu les attaques du 11 septembre. Certains de mes collègues et moi-même avons commencé à réfléchir et à nous dire que nous devions nous mobiliser autour de cet événement et nous assurer que la prophétie de Malachie se réalise. Et les islamistes radicaux nous ont rendu les choses tellement simples, avec le 11-Septembre et le reste. Tout d’un coup, les croisades reprennent ! Et tout ce qui nous reste à faire, c’est souffler un peu sur les braises. Nous étions