La Prophétie des papes
longes.
Il laissa Martin à côté dâun tas de foin et marqua une pause pour retrouver son souffle. Ensuite, il plongea la main dans sa chemise pour récupérer le bougeoir. Il le saisit par sa base, se tachant les doigts de sang.
Dâune main, il ouvrit la bouche de Martin et de lâautre, il enfonça le bougeoir dans la gorge du gamin aussi profondément que possible et regarda le sang monter et remplir le trou béant.
Le jour suivant, la chaise de Martin à lâécole était vide et le père Sweeting énonça ce commentaire prophétique : il valait mieux pour ce garçon quâil soit mort plutôt que de manquer un jour dâécole. Christopher rentra dâun pas sautillant, passant à nouveau devant les écuries. Les portes étaient fermées et il ne semblait y avoir âme qui vive. Lorsquâil arriva à la maison, sa mère et son père étaient assis à la table et parlaient à voix basse, ses sÅurs se promenaient pieds nus.
« Tu as entendu la nouvelle ? lui demanda son père. Tu as entendu, pour Martin Plessington ? »
Christopher secoua la tête.
« Mort, dit son père sobrement. La tête fracassée et un bougeoir catholique enfoncé dans le gosier. On dit que ce sont les papistes les coupables, quâils ont tué un jeune protestant. On dit quâils vont causer des troubles à Canterbury, câest certain. Une vraie guerre civile. On parle de deux ou trois gamins réfractaires déjà exécutés par des bandes de protestants. Quâest-ce que tu en dis ? »
Christopher nâavait rien à dire.
Sa mère fit entendre sa voix.
« Tu portais ta belle chemise aujourdâhui. Jâai trouvé lâautre en boule, coincée entre le matelas et le mur. »
Elle se pencha pour attraper quelque chose entre ses genoux et la brandit.
« Il y a du sang dessus.
â Est-ce que tu as quelque chose à voir avec ça ? demanda son père. Dis la vérité. »
Christopher sourit, dévoilant les vides laissés par ses dents de lait tombées. Il bomba le torse et dit :
« Câest moi qui ai fait ça. Je lâai tué. Jâespère quâil y aura la guerre. »
Son père se leva lentement et se déploya de toute sa taille, bien plus grand que lâenfant de sept ans. Ses lèvres tremblaient. « Tu es un bon garçon, dit-il enfin. Je suis très fier de toi. Des catholiques sont morts grâce à toi et il y en aura dâautres, je pense. Tu me fais honneur. Honneur à la lignée des Marlowe. »
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1 . Ãtudiants non boursiers qui sont au service dâautres étudiants et qui, en échange, reçoivent des avantages en nature. (N.d.T.)
2 . Didon, reine de Carthage , Christopher Marlowe, traduit de lâanglais par Serge Lavoine, ©LâHarmattan, 2010.
11
L a première pensée dâElisabetta fut dâappeler son père, mais en quoi était-il besoin de le réveiller et de lâinquiéter inutilement ? Micaela, elle le savait, était de garde à lâhôpital. Elle appela Zazo. Il arriva une demi-heure après la police et resta avec Elisabetta dans la cuisine pendant quâelle attendait dâêtre interrogée par un agent.
Elle serrait fort sa robe de chambre sur sa poitrine.
« Je suis navrée de tâavoir dérangé. Tu es tellement occupé.
â Ne sois pas idiote », dit Zazo. Il ne portait pas son uniforme ; il était en jean et pull. « Est-ce que tu as appelé papa ?
â Non.
â Bien. Alors le gars était à ta porte ?
â Câest ce que sÅur Silvia a dit.
â Est-ce que tu as pu le voir ?
â Seulement de dos.
â Câétait probablement un drogué à la recherche dâargent liquide, dit Zazo. Et trop défoncé pour se rendre compte quâil était entré dans un couvent. Cela fait longtemps que je suis contrarié quâil nây ait pas dâalarme ici.
â Il nây a jamais lâargent quâil faut pour ce genre de chose et de toute façonâ¦
â Ouais, Dieu vous protège, finit Zazo, ironique. Je connais le gars chargé de lâenquête, lâinspecteur Leone. Laisse-moi lui parler. »
La lèvre supérieure dâElisabetta se mit Ã
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