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La reine du Yangzi

La reine du Yangzi

Titel: La reine du Yangzi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Baudouin
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envie de vacances ! Te rends-tu compte que je n’ai même pas visité ce pays dans lequel je vis pourtant depuis vingt-cinq ans ? Que je ne connais que les rives du Yangzi ?
    — On ne te surnomme pas la Reine du Yangzi pour rien… Joseph est d’accord pour que je prenne la succession ?
    — Je suis certaine qu’il acceptera. Lui non plus n’est plus très jeune. Peut-être saisira-t-il cette occasion pour se retirer des affaires, lui aussi, et proposer à Marc de le remplacer. Vous vous entendez bien tous les deux et vous pourriez travailler ensemble.
    Louis a une moue dubitative.
    — Je ne sais pas si l’amitié peut faire bon ménage avec les affaires.
    — Si tout est bien clair entre vous, les deux sont parfaitement compatibles. Ton père et Joseph n’étaient pas très proches au début, ils le sont devenus et leur amitié s’est renforcée au fil des années. Elle durerait si Charles était toujours de ce monde. Et, entre Joseph et moi, il n’y a jamais eu le moindre problème, même si je suis surtout l’amie de Marie-Thérèse.
    —Je doute que Marc ait envie de reprendre les affaires de son père et ses responsabilités dans la Compagnie. La dernière fois que nous en avons parlé, il m’a expliqué qu’il voulait aller en Europe ou aux États-Unis pour étudier la musique. Il veut devenir pianiste. Le premier pianiste chinois.
     
    *
     
    En découvrant jour après jour l’écheveau des sociétés qui composent la Compagnie du Yangzi, Louis constate qu’il n’a jamais eu une idée très précise de ses activités. C’est un véritable empire commercial et industriel qui se dévoile à lui et dont le périmètre va bien au-delà de ce qu’il imaginait.
    Il y a d’abord la compagnie de navigation elle-même, la société historique fondée par son père à partir de laquelle tout le reste s’est construit. Toujours très active sur le fleuve Bleu où ses steamers font le transport du thé, du soja, de la paille à chapeau, de l’huile, de balles de soie et vont maintenant jusqu’à Chongqing, ouvert aux étrangers depuis 1891.
    — Il faudrait que vous remontiez le Yangzi, un jour, Monsieur Louis, a proposé Zhao Fu, le patron de tous les capitaines de la Compagnie. Au moins jusqu’aux Trois-Gorges.
    Louis a eu un sourire navré et répondu :
    — Ne comptez pas sur moi, capitaine. Autant mon père était un vrai loup de mer, autant moi, je suis un incorrigible terrien ! Je ne me sens bien qu’à cheval ou à pied. Sur un bateau, j’ai le mal de mer depuis toujours…
    Olympe qui sortait de son bureau à ce moment-là a eu un geste de dénégation mais n’a rien dit : elle savait bien que Louis n’avait pas toujours été malade en mer et queson rejet des bateaux masquait en réalité la répulsion qu’il éprouvait pour le Fleuve. Ce dégoût datait du jour où les eaux du Yangzi avaient englouti la dépouille de son père, enveloppée dans son linceul blanc. Terrible moment qui le marqua à jamais et lui fit prendre le Fleuve en horreur.
    D’autres steamers font du cabotage jusqu’à Qingdao et Tianjin au nord, et les côtes du Guangdong et l’île de Hainan, au sud. Plus une vingtaine de jonques pour les petites distances et les cargaisons plus réduites. Le cœur de l’entreprise est là, dans les mains de ses capitaines et de ses équipages, dans le feu de ses chaudières, dans les profondeurs de ses soutes qui font sa richesse depuis près de trente ans.
    Il y a ensuite les filiales ou les sociétés dont la Compagnie est actionnaire majoritaire : la compagnie d’assurance maritime qui couvre les risques sur mer et sur le Fleuve et à laquelle Patrick O’Neill vient de faire appel pour assurer l’ensemble de sa flotte ; le chantier naval qu’Olympe a racheté à Hong Kew, la concession américaine, pour effacer la mésaventure du chantier Di Pietri qui faillit, jadis, les ruiner ; la fabrique de moteurs et de chaudières qu’Olympe a créée cinq ans plus tôt pour faire face à la demande des arsenaux de la région.
    Et puis, il y a toutes les sociétés sans lien direct avec l’activité principale de la Compagnie et qu’Olympe ou Joseph ont créées au rythme où la ville et le port se développaient, année après année : une filature au sud de la ville chinoise et que Louis va avoir la charge de transformer en usine dès que les machines commandées en France seront installées ; l’Immobilière de Shanghai qui possède et gère plus d’une

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