La Révolution et la Guerre d’Espagne
la France. Avec eux partent les dirigeants
communistes, politiques comme la Pasionaria et Uribe, militaires comme Lister,
Modesto, Hidalgo de Cisneros, Nunez Maza. Mais la fuite du gouvernement n’empêche
pas l’effusion de sang qu’il semble avoir voulu éviter.
A Madrid, le commandant Ascanio, à la tête du 2 e corps
d’armée (il a pris la place de Bueno, malade), entreprend de couper la capitale
du reste de la zone républicaine par le nord. Une lutte triangulaire s’engage
alors, les franquistes exploitant la situation, les communistes, et les
casadistes s’accusant mutuellement, et, semble-t-il, avec raison, d’abandonner
le front pour régler leurs comptes.
Le 7, Barcelo s’empare du quartier général de Casado, où il
est attaqué par Mera. Le 10, le colonel Ortega, suspect aux yeux de la Junte,
se rend aux troupes de Casado. A la suite de sa médiation, des négociations s’engagent
entre le P. C., représenté par Dieguez, et Casado. Le P. C. demande la liberté
garantie pour ses militants et pour sa presse, et l’entrée d’un communiste dans
la Junte. Casado accepte en principe de ne pas se livrer à des représailles,
mais fait fusiller le lieutenant-colonel Barcelo [511] et le
commissaire communiste Conesu, qu’il rend responsables de l’exécution, après la
prise de son quartier général, de plusieurs officiers, dont les colonels Gazolo
et Otero. Le 12, un tract du P. C. appelle à la fin des combats fratricides
« Non seulement nous abandonnons toute résistance au pouvoir constitué,
mais les communistes, au front, à l’arrière, à leur poste de travail et de
lutte, continueront à donner l’exemple de leur abnégation et de leur sacrifice,
de leur héroïsme et de leur discipline. »
Cette semaine de guerre civile a fait 2 000 morts. Il n’y a
eu pourtant de véritables combats qu’autour de Madrid. Au Levant, les troupes
fidèles à Menendez ont eu quelques accrochages avec les blindés du commandant
Sendin, qui se tenaient prêts à couper les communications avec Madrid. Mais la45 e division, aux ordres de la Junte, a occupé les locaux du P.
C. et arrêté ses dirigeants. Le républicain Julio Just négocie l’accord entre
casadistes et communistes. En Estrémadure, les communistes Teral et Martinez
Carton se sont tenus dans l’expectative ; les seuls incidents sérieux ont
eu lieu à Ciudal Real, où le gouverneur, Antona, a fait tirer au canon sur un
immeuble du P. C. et fait arrêter Mangada, malgré son adhésion à la Junte.
En résumé, rien ne montre la volonté du P. C. de se
débarrasser de la Junte Casado. Seules les unités commandées par Ascanio ont
attaqué les troupes casadistes. Ailleurs, les corps encadrés par les
communistes se sont contentés de se défendre. Les initiatives de Castro Delgado
et Jesus Hernandez à Valence sont restées sans lendemain. Le départ de l’état-major
communiste, le 6 mars, prouve que le P. C. s’est, incliné et qu’il juge
maintenant, lui aussi, la défaite inévitable. Togliatti, Checaet Claudin, de la
J. S. U., restés en Espagne après le 6, sont arrêtés, puis libérés sur l’ordre
du général Hernandez Sarabia. Ils ne semblent pas avoir eu d’autre mission que
celle d’assurer l’évacuation des cadres ; un groupe d’une cinquantaine de
militants décolle le 25 mars d’un petit aérodrome, près de Carthagène [512] .
L’échec des négociations pour une paix honorable
Cette « guerre civile » avait eu au moins un
résultat, celui de compromettre définitivement la réalisation de l’objectif
commun aux deux partis : les amis de Negrín ont pu faire remarquer en
effet que la Junte Casado n’avait fait que reprendre la politique du président,
moins les chances de la réaliser, puisqu’elle avait renoncé au chantage à la
prolongation des combats. Les partisans de Casado rétorqueront que c’est le
soulèvement communiste qui a porté un coup mortel aux minces possibilités de
résistance. Quoi qu’il en soit, c’est un fait que celle-ci n’est plus possible.
En tout cas, les luttes intestines réglées, la Junte a les
mains libres pour négocier. Elle propose de le faire sur les bases
suivantes :
Affirmation de l’intégrité
et de la souveraineté nationales.
Respect de tous
les combattants dont les motifs étaient « sincères » et
« honorables ».
Garantie qu’il n’y
aura pas de représailles en dehors des jugements réguliers et que les délits
politiques seront
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