La Révolution et la Guerre d’Espagne
qui décident finalement d’y confier la
direction du soulèvement aux généraux Fanjul et Villegas. Quatre colonnes,
parties de Navarre, de Burgos et de Valence où l’on escompte un succès rapide,
doivent immédiatement converger vers la capitale pour y soutenir les insurgés.
Mais il y a d’autres difficultés : le général Villegas s’effraye et se
dérobe, le gouvernement, qui semble suivre la conspiration au jour le jour, s’emploie
à brouiller les cartes et remplace à Burgos le général Gonzalez de Lara par un
général républicain de toute confiance, Batet. Il faut, chaque fois,
recommencer.
Cependant la conspiration progresse : aux Canaries,
Franco, sur le Jaime 1 er , a des entretiens prolongés avec l’amiral
Salas qui lui apporte l’appui des officiers de marine ; le réseau des
conjurés s’est considérablement élargi avec l’entrée de nombreux officiers
subalternes, qui joueront un rôle décisif. Il s’agit en effet de repérer, dans
l’armée, les cadres qui s’opposeront au soulèvement, officiers républicains ou
tout simplement disciplinés et décidés a rester fidèles au gouvernement quel qu’il
soit. Il faut les surveiller, les neutraliser, et, si possible, s’en
débarrasser le moment venu. Les contacts sont étroits avec les dirigeants
politiques de la droite. Il semble bien que Calvo Sotelo ait été l’une des
têtes du complot. Mais les militaires ne désespèrent pas d’entraîner à leurs
côtés Gil Robles et ses amis, qui résistent. Les carlistes ont apporté à Mola
leur appui et l’appoint précieux de leurs 7 000 requetes « sur
pied de guerre, avec armes équipement et formations réguliers organisées ».
Mola n’en accepte que 4 000, qu’il compte répartir dans les régiments de regulares. Mais une note du 5 juin, rédigée par Mola, provoque une crise avec les
carlistes. Mola prévoit pour l’Espagne un directoire de cinq chefs militaires
qui suspendra la constitution et gouvernera par décrets-lois, mais s’engagera,
pour la durée de son pouvoir, à maintenir la République. La séparation de l’Église
et de l’État doit être maintenue. L’objectif du mouvement est, selon Mola, l’instauration
d’une « dictature républicaine ». Ce programme ne fait pas l’affaire
des carlistes qui veulent, au minimum, l’adoption du drapeau monarchiste
bicolore et le rejet de l’emblème républicain, la dissolution immédiate de tous
les partis, une organisation corporatiste de l’Espagne. Mola refuse et les
carlistes lui font savoir qu’ils ne marchent plus avec lui : on renonce au plan
qui devait faire déclencher le mouvement par les Navarrais, le 12 juillet. Le
chef des requetes, Lizarza, se rend auprès de Sanjurjo, dont l’arbitrage
sera accepté par tous : il n’y aura pas de drapeau pour les unités militaires
où les requetes sont appelés à servir. Ce gouvernement sera un
gouvernement militaire « apolitique », dont le premier acte sera d’abolir toute
la législation en matière sociale et religieuse et dont l’objectif sera la
destruction du régime libéral et parlementaire, pour adopter, selon les termes
mêmes de Sanjurjo, « les normes que beaucoup sont en train de suivre,
modernes pour eux, mais séculaires pour notre patrie » [60] . La dernière
difficulté est levée en juin ; aux grandes manœuvres de l’armée du Maroc, les
conjurés prêtent le fameux « serment du Llano Amarillo ».
Après bien des fausses manœuvres, la date de l’insurrection
semble avoir été à nouveau fixée, puisque Mola informe les conjurés d’avoir à
se tenir prêts le 15 juillet. Franco, des Canaries, doit soulever le Maroc ;
Goded, des Baléares, la Catalogne, et Queipo de Llano, Séville. Ailleurs on
compte sur les officiers qui sont en place : Cabanellas à Saragosse Saliquet
à Valladolid, Fanjul à Madrid, Gonzalez Carrasco à Valence. Le 16, Mola
prévient José Antonio Primo de Rivera que le soulèvement est fixé aux 18, 19 et
20 juillet. Ces dates-là ne seront pas reculées.
L’attitude du gouvernement
L’attitude du gouvernement au cours de ces mois décisifs a,
fait l’objet de nombreuses critiques. Le gouvernement, c’est incontestable, a
été au courant de ce qui se tramait du coté des chefs militaires. Il n’a pris
que peu de mesures et celles qu’il a prises ont été particulièrement
maladroites. A quoi sert d’éloigner aux Canaries le général Franco lorsque cet
exil le rapproche de
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