La Révolution et la Guerre d’Espagne
les accompagnent leur dressent une embuscade et les
massacrent. Puis ils passent à la conquête des mines.
Mais la grande victoire des insurgés sera la prise de
Séville, bastion des organisations ouvrières. Le général Queipo de Llano, que
le gouvernement n’a pas voulu faire arrêter, arrive incognito dans la capitale
andalouse, où le commandement de la garde civile est seul gagné au complot.
Dans les casernes de la garde, on arme et on encadre les phalangistes et les señoritos volontaires pour participer au soulèvement. Les groupes de choc ainsi
formés attaquent par surprise la caserne des gardes d’assaut, qui résisteront
jusqu’à leur dernière cartouche dans lebâtiment et dans le central
téléphonique. Pendant ce temps, un petit détachement a occupé sans coup férir l’émetteur
de Radio-Séville. Queipo de Llano y fait jouer l’hymne républicain, puis
annonce brusquement qu’il est maître de la ville. Les organisations ouvrières
ne réagiront pas, tandis que le général, maître dans l’art du bluff, fait
occuper les points stratégiques et défiler continuellement dans les rues les
mêmes camions militaires pour faire croire a une supériorité numérique
écrasante des troupes qu’il dirige. Lorsque, enfin, la C.N.T. et l’U.G.T.
commencent à regrouper des militants pour la lutte armée, il est trop tard :
les asaltos ont été massacrés jusqu’au dernier, et les premiers renforts
de soldats marocains atterrissent sur l’aérodrome dont les rebelles se sont
emparés à la première heure. Cette arrivée constitue, certes, un atout considérable
du point de vue militaire, car les Maures sont des troupes redoutables,
aguerries et disciplinées. Mais c’est aussi une victoire psychologique – une de
plus – à l’actif de l’intelligent général, car leur réputation de cruauté n’est
plus à taire et le bruit de leur arrivée répand la terreur. La résistance
ouvrière commence trop tard, et dans les pires conditions. A Séville, ce ne
sera pas une lutte, mais une tuerie. Un mémoire du collège des Avocats déclare
que plus de 9 000 ouvriers seront alors massacrés [72] . Bertrand de
Jouvenel, correspondant de Paris-Soir ,a décrit l’assaut des
Maures contre un faubourg ouvrier : « Dans un cri de guerre farouche, les
hommes se ruèrent dans les rues du quartier. Ce fut un impitoyable nettoyage à
la grenade et au couteau. Il n’y eut pas de merci. Lorsque, le surlendemain, j’ai
pu me glisser dans les ruines, j’ai vu des hommes enlacés, percés l’un et l’autre
de baïonnettes et de longs couteaux à cran d’arrêt. » Le faubourg de Triana
résistera cependant pendant plus d’une semaine. Séville « nettoyée »,
les militaires se lancent à la conquête des autres villes et des villages.
Partout les mêmes méthodes triomphent d’une résistance farouche et
désespérée : Moron tiendra huit jours, et de nombreux soldats rebelles
tombent devant Carmona. Mais, dans toute la région, le Movimiento triomphe.
Les exécutions massives d’ouvriers et de militants assurent parfois à l’avance
la soumission des hésitants et des tièdes. Souvent les autorités ou les chefs
de la garde civile prennent les devants et, en signe d’attachement à la cause
de l’armée, font exécuter des responsables ouvriers avant même l’arrivée des
troupes de Queipo. En quelques jours, l’Andalousie est conquise : par son
esprit de décision, par une utilisation adroite des moyens modernes de
propagande et l’emploi massif de la terreur, Queipo de Llano est arrivé à s’assurer,
par l’aérodrome et l’émetteur-radio, un avantage que les ouvriers ne pourront
pas compenser. Pris de court et désorientés, les militants n’ont pu, la plupart
du temps, lui opposer qu’un courage aussi indomptable qu’inutile.
Victoires du
« movimiento » : Saragosse
C’est une victoire de même type que remporte l’armée à
Saragosse, autre bastion ouvrier. Là, le chef de la garnison, le général San
Miguel Cabanellas, est aussi le chef du complot. C’est un franc-maçon qui passe
pour républicain et, comme Queipo de Llano, est un rallié de la dernière heure.
Le 17 juillet, à la nouvelle du soulèvement du Maroc, il lance une proclamation
de fidélité à la République et décrète l’état de siège pour faire face aux «
tentatives fascistes ». Il doit y renoncer devant la menace de grève générale
brandie par la C.N.T., mais incorpore rapidement
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