La Révolution et la Guerre d’Espagne
repris Albacete
et marché sur l’Andalousie, mais elle a perdu la bataille politique contre le
pouvoir révolutionnaire, à Valence comme à Murcie, Alicante et Carthagène...
Après sa dissolution, il semble bien n’être plus, suivant l’expression de
Borkenau, qu’un « monument d’inactivité» ne devant de survivre qu’à la
docilité dont il fait preuve à l’égard des exigences des partis, syndicats,
milices et comités.
Le gouvernement existe pourtant, et d’abord vis-à-vis de l’étranger,
aux yeux de qui il s’efforce d’incarner la légalité. C’est lui qui, en août,
cédant aux pressions des puissances étrangères, donnera l’ordre à la flotte d’abandonner
la rade de Tanger quarante-huit heures seulement après que le docteur Giral ait
assuré aux Valenciens que les rebelles ne recevraient aucun secours d’Afrique,
d’où la marine républicaine, dit-il, les empêche de venir. Le gouvernement
manifeste aussi son existence sur les ondes, et semble curieusement s’obstiner
dans un rêve de conciliation avec une partie des généraux soulevés. Le 29
juillet, au nom de la République, Martinez Barrio lance encore cet appel
solennel : « Que ceux qui n’auraient jamais du prendre les armes les
rendent, rétablissant ainsi la vie normale dans le pays.» Et le lendemain,
Prieto, officieux porte-parole ne craint pas d’affirmer que le gouvernement n’a
pas perdu tout espoir de conciliation : « Les forces
gouvernementales, dit-il, ne se sont pas employées jusqu’ici à fond comme elles
l’auraient fait pour repousser un adversaire étranger. »
A Madrid, quelques jours après la révolution, le
gouvernement réussit à reprendre aux milices ouvrières le contrôle de la rue et
à le rendre à sa police : le laissez-passer gouvernemental se substitue à la
carte syndicale et aux laissez-passer des comités. La police est décimée mais
on s’efforce de la reconstituer. La Sûreté sous la direction de Manuel Muñoz,
recrute des militants socialiste de confiance : les gardes d’assaut qui
forment l’« Escouade de l’aube », les « Lynx de la République » formés d’asaltos et de militants socialistes, jouent un rôle important dans la répression.
Le typographe socialiste Garcia Atadell devient le chef de la « Brigade des
recherches criminelles » qui sera bientôt célèbre et que l’on rebaptise, à
la mode du jour, « Milices populaires de recherches ». Un républicain du
parti d’Azaña, Sayagües, organise au ministère de la Guerre des « services
spéciaux ». Toutes ces autorités policières coexistent bien sûr avec le
Comité provincial d’investigation formé au début d’août de représentants de
tous les partis et avec ce que l’on commence à appeler les
« tchekas » des partis, mais elles sont tout de même un instrument d’action
gouvernementale appréciable.
La situation est plus difficile dans le domaine militaire.
Le gouvernement n’a pas d’armée. Il réussit à récupérer à Madrid quelques
milliers de fusils en les échangeant avec les miliciens contre des revolvers.
Le décret du 31 juillet qui prévoit le paiement des soldes des miliciens par l’État
sur présentation d’un certificat de parti et de syndicat consacre certes sa
faiblesse, mais représente aussi un premier signe de relèvement. Ce sont les
partis et les syndicats qui organisent les milices, comme le ravitaillement,
mais ils le font au nom de l’État et, en quelque sorte, par délégation. Au
ministère de la Guerre, d’où le général Castello, interné pour maladie mentale,
s’en va le 7 août, une poignée d’officiers républicains, membres de la garde
présidentielle, attachés militaires des ministres, le lieutenant-colonel
Sarabia, les commandants Menendez, Hidalgo de Cisneros, Martin Blazquez, Diaz
Tendero, les capitaines Cordon et Ciutat organisent une intendance des milices,
recrutent des officiers, répartissent des munitions : ils sont en même temps un
embryon d’état-major, auquel les chefs de colonnes ont de plus en plus souvent
recours. Le 4 août, sont créés les « Bataillons de volontaires ». Le
20, c’est Martinez Barrio, encore lui, qui sera chargé, avec Ruiz Funes, de
leur recrutement. Ainsi l’État espère-t-il arriver à se constituer une force
armée et à affirmer avec plus d’audace son autorité…
Certes, celle-ci est battue en brèche à quelques kilomètres
de Madrid, et rien, aux abords de la capitale, ne
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