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La Révolution et la Guerre d’Espagne

La Révolution et la Guerre d’Espagne

Titel: La Révolution et la Guerre d’Espagne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Broué , Emile Témime
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protège un ministre en
exercice du danger d’arrestation. Cependant une continuité a été
préservée : le gouvernement reconnaît les Conseils et les Comités
révolutionnaires parce qu’il ne peut faire autrement, mais il s’efforce
toujours de les faire entrer, au moins sur le papier, dans le cadre qui est le
sien, celui de l’État républicain. Quand il nomme Arin gouverneur de Valence ou
Rodriguez gouverneur de Malaga, il n’ajoute rien à l’autorité dont ils
jouissent, il n’ajoute rien à la sienne, mais il maintient un principe. Et si
le malheureux général Miaja, nommé par ses soins, est contraint de claquer des
talons devant le « bleu » Benedito qui représente à Valence le Comité
exécutif, sa présence en tant que gouverneur militaire dans une Capitania
general qui n’a même pas une voiture à sa disposition est quand même le
signe de la volonté de l’État républicain de durer, en attendant des jours
meilleurs. En Catalogne, malgré les solides assises populaires dont jouit le
parti du président Companys, le gouvernement de la Généralité a certainement
moins d’autorité effective encore face au Comité central. Mais il continue
cependant à « décréter » la formation des milices qui montent la garde
devant ses bureaux la formation du Comité central dont il ne voudrait faire qu’un
comité « de liaison », et il « nommera » commissaire à la Défense l’élu du
Comité... Formalités inutiles puisque tous ces décrets ne font qu’entériner des
décisions déjà prises par les organismes du pouvoir révolutionnaire ? Non, puisqu’elles
sauvegardent le principe même de la légalité républicaine. Le gouvernement ne
gouverne pas, mais il existe toujours.
    C’est celui de la Généralité qui, le premier, tente de
reprendre son action. Casanovas de l’Esquerra constitue le 2 août un cabinet
dont font partie trois représentants du P.S.U.C.: Comorera, ministre de l’Economie,
Ruiz ministre du Ravitaillement, Vidiella, ministre des Communications. L’opération,
pourtant, est si visiblement dirigée contre le Comité central que la C.N.T. et
le P.O.U.M. réagissent vigoureusement : craignant le discrédit et l’isolement
de leur parti dans la classe ouvrière, les ministres du P.S.U.C. remettent leur
démission le 8.
    Vers le même moment, le gouvernement de Madrid tente, en
mobilisant trois classes qu’il espère encadrer par les officiers et les
sous-officiers fidèles, de se donner la force armée qu’il est le seul à ne pas
posséder dans sa zone. Miliciens et organisations ouvrières, le parti
communiste excepté, réagissent violemment. La colonne Caballero menace de
marcher sur Madrid pour empêcher cette reconstitution de l’armée régulière. Claridad déclare sans ambages, le 20 août : « Penser qu’un autre type d’armée
doit être substitué à celles qui combattent réellement et qui, dans une
certaine mesure, contrôlent leur propre action révolutionnaire, c’est penser en
termes contre-révolutionnaires. » A Barcelone, 10 000 conscrits
réunis à l’appel de la C.N.T. votent une résolution qui affirme :
« Nous voulons être des miliciens de la liberté, non des soldats sous l’uniforme.
L’armée s’est révélée un danger pour le pays, seules les milices populaires
protègent les libertés publiques : miliciens, oui ! soldats, jamais !
»
    Les conscrits, dans les casernes, brûlent rôles et ordres de
mobilisation... En Catalogne, la Généralité accepte l’incorporation des
nouvelles recrues dans les milices. Ailleurs, partis et syndicats poussent à l’élection
des « Conseils d’ouvriers et de soldats » dans les casernes et les
nouvelles unités ; un nouvel obstacle se dresse sur la route de la
reconstitution d’une armée régulière.
    La conclusion de ce premier conflit ouvert entre les deux
pouvoirs met en pleine lumière la faiblesse du gouvernement Giral. Ainsi que le
dit Juan Lopez, six semaines après l’insurrection, « toutes les articulations
de l’État étaient brisées, aucun de ses organes politiques ne fonctionnait
plus » ; ni Giral ni Companys n’avaient la force de « recoller les
morceaux cassés, faire fonctionner à nouveau les organes de l’État, recréer un
nouvel État centralisé » [105] .

Les conquêtes révolutionnaires
    La révolution espagnole était née d’une profonde crise
sociale. En s’attaquant, dans leur action spontanée, aux rouages d’un

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