La Révolution et la Guerre d’Espagne
Loyola.
L’effondrement de l’État républicain en Pays basque permet
la création, non d’un pouvoir révolutionnaire, mais d’un État nouveau,
spécifiquement basque, d’un État bourgeois défenseur de la propriété et de l’Église
qui tout en organisant la défense du pays contre les militaires ennemis des
libertés basques, mène victorieusement la lutte contre le mouvement
révolutionnaire intérieur [99] .
Dès le milieu de septembre, la direction du parti nationaliste basque décide de
franchir le pas décisif, en constituant, sous son contrôle, un gouvernement du
Pays basque [100] .
L’ébauche d’un appareil d’État nouveau
Les premiers jours, la majorité des Comités fonctionne sans
spécialisation ni partage d’attributions. C’est le Comité ou même l’assemblée
de village qui est à la fois organisme délibératif, tribunal, conseil de
guerre. Ouvriers et paysans armés montent la garde, patrouillent, contrôlent,
réquisitionnent, arrêtent, exécutent. Cependant, très vite, au moins dans les
grandes villes, des corps spécialisés apparaissent.
Ce sont d’abord des unités chargées des fonctions de
police : il s’agit en effet de maintenir l’ordre révolutionnaire, aussi
bien contre les adversaires de la révolution que contre ses profiteurs, les
agents de la terreur aveugle. Les unités de gardes civils ou d’asaltos restées
fidèles sont sévèrement. Epurées ; elles n’inspirent pourtant qu’une
confiance limitée et, dans la majorité des grands centres, les Comités chargent
des commissions spéciales du contrôle des anciennes et de l’organisation de
nouvelles forces de police. A Barcelone, la Commission d’investigation, que
dirige Aurelio Fernandez, a le droit de recevoir les dénonciations, d’enquêter,
de perquisitionner, d’arrêter les suspects. Elle impose peu à peu son autorité
aux « polices privées » des syndicats et des partis. A Malaga, c’est
le Comite de vigilance, ailleurs ce sont des Commissions d’ordre public, des
Conseils de sûreté, qui, sous des noms divers, assurent tous l’organisation de
la terreur à l’arrière.
Parallèlement, les unités de milices, bientôt appelées
« Milices de l’arrière » se spécialisent dans les fonctions de police
proprement dite.
A Barcelone, ce sont les célèbres « Patrouilles de
contrôle », que commande l’anarchiste Asens. Elles sont composées de 700,
puis de 1 100 militants ouvriers désignés pour une moitié par la
C.N.T.-F.A.I., pour l’autre par les autres organisations et dotées, lors de leur
création par le Comité central, de moyens modernes de communication et de
transport. La Patrouille de contrôle de Gijon, la Brigade ouvrière sociale de
Lérida, la Garde populaire antifasciste de Castellon sont des corps de même
type.
Malgré la répugnance des anarchistes à diviser ce que
Santillan appelle le « pouvoir révolutionnaire total » la même évolution
se produira dans le domaine de la Justice. Les Palais de Justice sont fermés,
les magistrats tués ou en fuite, les « justiciers » pullulent et les Comités
sont surchargés de besogne. A Barcelone, des miliciens de la C.N.T., que dirige
l’avocat Samblancat, mettent à sac le Palais de Justice, jetant par les
fenêtres dossiers et crucifix. Ils installent un Comité de la Justice composé
de juristes de métier, en majorité avocats de gauche, dont le premier acte sera
de révoquer tous les fonctionnaires de son département, et le second de s’ériger
en tribunal révolutionnaire. Des Tribunaux révolutionnaires d’un type différent
apparaissent au début d’août à Valence, Castellon, Lérida : juges,
procureurs, président sont des militants désignés par les partis et les
syndicats [101] .
Leurs décisions sont sévères et la procédure sommaire, mais les droits de la
défense sont généralement respectés. Ils savent aussi acquitter et constituent,
en tout cas, à cet égard, un net progrès sur la pratique des paseos.
Les milices
Dans le cadre de la guerre, la construction d’une nouvelle
armée se révèle cependant la tâche la plus urgente. C’est sa nécessité, en tout
cas, qui a donné naissance aux nouveaux organismes de pouvoir.
Les milices sont nées de l’initiative des partis et des
syndicats et ne sont, à l’origine, que ces organisations en armes. Le nom de
chacune rappelle son origine, qu’il s’agisse d’un nom de corps de métier (Artes
graficas, Madera), ou
Weitere Kostenlose Bücher