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La Révolution et la Guerre d’Espagne

La Révolution et la Guerre d’Espagne

Titel: La Révolution et la Guerre d’Espagne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Broué , Emile Témime
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d’un salaire normal. Les bénéfices doivent être utilisés en priorité à la
construction d’une clinique et d’une école.
    A Puigcerda, selon Lauzon, le commerce de détail a été
collectivisé au sein d’une coopérative qui groupe 170 adhérents percevant un
salaire uniforme de 50 pesetas par semaine pour les hommes et 35 pour les
femmes [114] .
    La diversité des solutions adoptées dans les cas cités en
exemple souligne la difficulté du problème des salaires. Il est intéressant de
constater que les solutions varient entre deux extrêmes, le salaire uniforme d’inspiration
anarchiste en vigueur à Puigcerda et le maintien intégral de la hiérarchie
existante. Les traminots de Barcelone cherchent un compromis, réduisant de onze
à quatre le nombre des catégories de salariés et instaurant une retraite
unique. Mais l’éventail reste parfois très ouvert : à l’hôtel España de
Valence, le cuisinier gagne presque quatre fois plus que la femme de chambre,
un spécialiste fileur dans une usine de Barcelone touche 90 pesetas quand un
aide en reçoit 50 et un apprenti 32.
    Nous remarquerons aussi le maintien constant à un taux
inférieur des salaires des femmes, même dans le cadre de l’application des
principes anarchistes d’égalité, et la constante préoccupation des travailleurs
espagnols pour tout ce qu’on peut appeler la mise sur pied de mesures de
sécurité sociale, pensions, retraites, congés, indemnités de chômage.
La collectivisation dans les campages
    Les anarchistes de Puigcerda qui ont collectivisé les
boutiques n’ont pas touché aux fermes de la Cerdagne. C’est là un premier
exemple de l’extrême diversité des solutions apportées en ce domaine.
    En réalité, il y a eu, pendant et après la Révolution, un
vaste mouvement de collectivisation rurale qui reste l’un des points les plus
ardemment controversés par les témoins et les acteurs. Pour les uns,
anarchistes notamment, la collectivisation a résulté d’un puissant mouvement d’association
volontaire provoqué par la propagande et l’exemple collectiviste de leurs
groupes. Pour les autres, communistes ou républicains, la collectivisation
agraire a été, dans la majorité des cas, imposée de force, sous la terreur, par
les milices et les groupes d’action anarchistes. Les observateurs «
neutres » ne sont pas moins divisés : le socialiste Prats, le travailliste
indépendant Fenner Brockway, le républicain italien Rosselli chanteront les
louanges des collectivités aragonaises issues indubitablement, selon eux, de la
volonté paysanne. Inversement, Borkenau, peu suspect pourtant de sympathie pour
les thèmes communistes de propagande, pense que, sauf dans la province de la
Manche, la collectivisation a été imposée aux paysans par la terreur.
    Force est bien de reconnaître qu’il y a de sérieux arguments
en faveur de l’une et l’autre thèses. D’abord, la forme d’exploitation
collective n’était pas nouvelle. Les saisies de terre qui s’étaient produites
avant la guerre civile avaient été presque toujours suivies d’un début d’exploitation
collective. Les deux organisations syndicales paysannes, celle de la C.N.T.
comme celle de l’U . G.T. s’étaient prononcées en faveur de la
collectivisation – volontaire, il est vrai. Les adversaires les plus résolus de
la collectivisation, les communistes, devront, au Levante, pour combattre le
mouvement, créer de toutes pièces une organisation paysanne nouvelle [115] . Enfin, les
collectivités nées au cours de l’été 1936 ont parfois duré jusqu’à la fin de la
guerre civile, se reconstituant, dans certains cas, après leur dissolution [116] .
    Par ailleurs, l’Andalousie, qui eût pu être la terre d’élection
des collectivités, s’est trouvée très tôt aux mains des généraux et ni le
Levante, ni la Catalogne, ni l’Aragon, n’offraient à ces expériences des
conditions particulièrement favorables. Nous savons qu’elles donnèrent lieu
souvent à des heurts violents, qui se renouvelleront fréquemment au cours de
1937 entre « collectivistes » et « individuels ».
    Là encore, la réalité eut bien des visages. Le massacre des
grands propriétaires par quoi commence fréquemment – en particulier avec
Durruti et sa colonne – la collectivisation des terres, ne signifie pas qu’elle
ne sera pas volontaire : il en crée les conditions matérielles, puisque
des terres sont ainsi offertes, en même

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