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La Révolution et la Guerre d’Espagne

La Révolution et la Guerre d’Espagne

Titel: La Révolution et la Guerre d’Espagne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Broué , Emile Témime
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temps que psychologiques, puisqu’il
ouvre une possibilité, jusque-là fermée. La terreur est l’un des leviers de la
révolution et la discussion pour savoir si cette dernière est volontaire ou
forcée n’a guère de sens. Enfin, toute collectivisation fut en même temps «
volontaire» et « forcée », chaque fois qu’elle fut décidée à la majorité.
Ceux qui n’avaient rien à y perdre ont certainement « forcé » ceux qui
détenaient quelque lopin. Ajoutons enfin que les collectivisations eurent, sans
aucun doute, moins d’adversaires dans les premières semaines de révolution qu’elles
n’en eurent après plusieurs mois de fonctionnement, dans les conditions peu
favorables de la guerre et sous la constante menace des réquisitions.
    Le mouvement se heurtait, en Catalogne, à l’hostilité des
Rabassaires. La C.N.T. y adopta une attitude de prudence qu’illustre
parfaitement la résolution adoptée le 5 septembre par son Union agraire :
« Nous pensons que si nous prétendions obliger immédiatement à la collectivisation
de toute la terre, y compris celle acquise par tant de travail et d’abnégation,
nous nous heurterions à une série d’obstacles qui nous empêcheraient d’atteindre
normalement notre but final. » La conférence paysanne réunie à Barcelone
par la C.N.T. invite ses militants à respecter la petite propriété privée, à
chercher avant tout à convaincre le paysan par la réussite exemplaire d’expériences-témoins
de collectivisations rurales.
    Aussi les collectivités catalanes furent-elles de types fort
différents : collectivités englobant tous les habitants comme celle de
Hospitalet de Llobregat avec 1 500 familles sur 15 000 km 2 , ou
d’Amposta avec 1 200 collectivistes, toutes deux exclusivement C.N.T., ou
collectivités C.N.T.-U.G.T. ou C.N.T. seulement, coexistant avec des propriétés
individuelles, fondées exclusivement sur les terres confisquées aux grands
propriétaires (Vilaboi, 200 collectivistes ; Seros, 360), ou par la
collectivisation de petits lots individuels, ou encore sur l’une et l’autre
base (Lerida, 400 collectivistes ; Orriols avec 22 familles de métayers
Granadella, près de Lerida, avec 160 collectivistes sur 2 000 habitants ;
Montblanc, près de Tarragone, avec 200 collectivistes sur 16 000 habitants). De
toute façon, îlots au milieu de la petite propriété, elles furent l’exception
plutôt que la règle.
    Le cas le plus fréquent au Levante fut celui de
collectivités fondées en commun par la C.N.T. et l’U.G.T. : ainsi Villajoyosa,
dans la province d’Alicante, où furent collectivisée non seulement les terres
qui faisaient vivre un peu moins de 4 000 personnes, mais la filature qui
emploie 400 ouvriers et la pêche qui en fait vivre 4 000, Ademuz, Utiel, dans
la province de Valence qui regroupent respectivement 500 et 600 familles. Dans
la province de Castellon, le village de San-Mateo présente l’originalité d’avoir
deux communautés, une de la C.N.T., l’autre de l’U.G.T. La collectivité de
Sueca, dans la province de Valence forme pour la vente de ses oranges, la Cooperativa
popular naranjera, une tentative pour se débarrasser des intermédiaires
commerciaux qui est appelée à se développer [117] .
Notons enfin le cas, souvent cité, de Segorbe, gros bourg d’une dizaine de
milliers d’habitants dans la région des huertas, où s’est constituée une
« collectivité des producteurs agricoles et assimilés ». L’adhésion
et la démission sont libres, chacun apportant ou retirant sa part. Mais la vie
de l’adhérent est strictement réglée par la Commission administrative élue qui
gère la collectivité, répartit le travail, paie les salaires sur la base
« familiale » (homme seul : 5 pesetas ; femme seule : 4 ;
chef de famille, 5 pesetas ; sa compagne : 2, etc...). Comment vivait-on à
Segorbe ? Un observateur, bien disposé il est vrai, le travailliste indépendant
Fenner Brockway, affirme : « Plus que tout, je me réjouis de ma
visite à la collectivité agricole de Segorde. Je ne la décrirai pas en détail,
mais l’état d’esprit des paysans, leur enthousiasme, la manière dont ils
apportent leur part à l’effort commun, la fierté qu’ils en ressentent tout cela
est admirable. »
    La visite des collectivités d’Aragon incitera le socialiste
Italien Rosselli à écrire, en se plaçant au même point de vue : « Les
avantages manifestes du nouveau système social

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