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La Sibylle De La Révolution

La Sibylle De La Révolution

Titel: La Sibylle De La Révolution Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Bouchard
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partir mais, auparavant, il lui
fallait faire un dernier éclat. La vision qu’elle avait eue lui avait laissé
une impression étrange : de l’horreur mêlée à une joie intense et sauvage.
Elle hésita à peine : « De toute manière, cela arrivera… »
    Olympe était morte, mais
Donatienne jouait toujours sa petite princesse au milieu de ses camarades.
Néanmoins, elle était, sous sa carapace d’orgueil, très naïve et aussi très
pieuse. Marie-Adélaïde commença à faire courir une étrange histoire dans tout
le couvent. C’était la nuit, dans le dortoir. La sœur surveillante venait de
passer faire sa ronde. Les demoiselles de la noblesse dormaient dans des
chambres séparées, mais elles venaient volontiers rejoindre leurs consœurs
roturières, surtout lorsqu’on racontait des histoires à faire frémir. Et celles
de Marie-Adélaïde étaient de loin les meilleures…
    Cette nuit-là, une dizaine de
jeunes filles étaient assemblées autour du lit de la jeune voyante. Elle alluma
une bougie et chuchota d’un air inquiétant.
    — Je vais vous dire un secret.
Un secret que vous ne devrez répéter à personne. Si jamais l’une de vous en répète
un seul mot, elle passera plus de cinq cents ans au purgatoire. Le
jurez-vous ?
    Les autres se regardèrent avec
terreur. Comment ne pas jurer alors qu’on risquait tant d’années de purgatoire.
Marie-Adélaïde répéta la question à chacune d’entre elles et, lorsqu’elles
eurent promis, dessina sur leur front un signe mystérieux à l’aide de la
bougie. Enfin, elle reposa le lumignon au milieu de son lit et, son seul visage
éclairé par la flamme tremblante, elle commença son récit :
    — C’est une histoire que je tiens
de ma grand-tante qui s’appelait Adélaïde comme moi. Elle vivait au temps de
Louis le quatorzième, vous savez qu’à cette époque-là on brûlait encore les
sorcières. Eh bien, l’une d’elles vivait dans les bois, non loin de la maison
où ma grand-tante habitait. C’était une gentille fille qui ne voulait de mal à
personne, aussi quand elle apprit que les soldats du roi venaient arrêter la
vieille femme, elle courut pour la prévenir. La sorcière l’accueillit avec un
sourire triste : « Ma pauvre petite Adélaïde, tous tes efforts n’y
pourront rien. La justice du roi est trop puissante pour une vieille comme moi
et mes pauvres dons magiques ne m’aideront guère. Néanmoins, comme tu as été
bonne et courageuse, avant de mourir, je veux te faire partager mon plus grand
secret. Je ne regrette pas de mourir puisque je sais qu’aussitôt mon âme montée
au ciel elle rejoindra la Vierge Marie. Sais-tu pourquoi je le sais de manière
aussi certaine ? — Non, grand-mère, je ne le sais pas, répondit ma
grand-tante qui était alors toute jeune. — Je le sais parce que je l’ai
déjà vue. C’est un don qui est donné aux seules filles innocentes et pures qui
la prient de tout leur cœur. Il y a aussi une manière de faire que j’ai apprise
de ma propre mère qui était très bonne et pieuse, comme toi, ma pauvre petite.
Veux-tu le savoir ? — J’aimerais tant voir la Sainte Vierge moi
aussi, grand-mère ! — Alors voilà, écoute bien, il te suffit de te
tenir juste au-dessus de l’autel au moment de l’offertoire, là, un court instant,
ton âme s’échappera de ton corps et s’élèvera jusqu’au paradis. Tu y apercevras
le visage de la Sainte Vierge.
    — Comment cela est-il
possible, grand-mère ? — Il te suffira de prendre ton élan et tu
t’envoleras, parce qu’à ce moment-là se produit la transsubstantiation, c’est-à-dire
que, par leur consécration, le vin devient le sang du Christ et le pain sa
chair. L’âme du fils de Dieu s’élève et s’en va bien entendu jusqu’au ciel, où
il est reçu par sa mère : il emmènera un instant la tienne avec lui. Voilà
mon secret. Fais-en bon usage, ma fille, et prie pour moi. »
    Marie-Adélaïde fit silence, les
autres la fixaient avec stupéfaction.
    — Voir le visage de la
Sainte Vierge ? Mais, ce n’est pas possible ! s’exclama l’une
d’elles.
    — Ce serait magnifique,
renchérit l’autre. Tu imagines ? Notre âme s’élèverait au-dessus du
couvent jusqu’au paradis.
    Elles étaient à la fois
émerveillées et incrédules. Donatienne, la petite aristocrate, prit la main de
son souffre-douleur habituel :
    — Marie, n’est-ce pas un conte
que tu nous dis là ?
    L’intéressée secoua la

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