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la tondue

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Titel: la tondue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie de Palet
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l’aiguillon sur l’épaule.
    Alors, Marie se tourna vers Yvette et lui dit :
    « Je vais passer par ton pré au lieu d’aller faire le tour avec le char. Il n’a plus besoin de moi, maintenant.
    Hé, Casimir, je m’en vais avec Yvette ! »
    Mais Casimir, déjà loin, ne l’entendit pas et continua, au pas lent de ses bêtes, sa sortie du champ.
    « Pauvre homme ! soupira Marie, il fait bien ce qu’il peut, mais ses rhumatismes le tracassent et, ajouta-t-elle après un soupir, on se fait du souci pour le petit ! »
    “Le petit” devait approcher de quarante ans, s’il ne les avait pas dépassés ! Yvette se rappelait vaguement d’un grand jeune homme dégingandé. Il était parti dans le Midi bien avant la guerre et s’y était marié.
    Casimir et Marie n’étaient allés le voir qu’une seule fois et n’avaient jamais voulu y retourner… « On n’a pas les mêmes idées qu’eux… Et puis, nous, la vigne, ça ne nous dit rien qui vaille… Pensez, il n’y a que ça… Même pas un champ de blé qu’on voit là-bas !… »
    Le fils montait quelquefois les voir, mais ces temps-ci, il ne venait plus, expliqua Marie à Yvette.
    Le silence s’installa. Yvette rassembla ses vaches et les deux femmes partirent ensemble.
    Marie dit tout à coup :
    « Tout à l’heure, je n’aurai pas dû faire ce que j’ai fait… Mais il faut te dire qu’avec ta mère, on a eu des mots… »
    Yvette ne répondit pas.
    « Peut-être que je suis un peu soupe au lait, mais aussi, ta mère n’est pas une commode !
    — Je sais, soupira la jeune fille.
    — C’est une vraie langue de vipère. Elle a fait fâcher tout le monde… Et le pire, c’est que ton père ne voit que par elle.
    — Je sais, reprit encore Yvette.
    — On était bien, avant cette histoire… Et dire que c’est à cause de ta mère que tout le monde est au courant !…
    — Au courant de quoi ?
    — Ah, elle ne t’en a pas encore parlé ? Ça ne va pas tarder va… Elle le dit à tous ceux qu’elle peut, on dirait qu’elle cherche à nous humilier devant tout le monde. Comme si le reste ne suffisait pas !
    — Mais que s’est-il passé ? demanda Yvette étonnée.
    — Ben, voilà… »
    Marie la regarda, essuya ses yeux humides d’un revers de main et lâcha tout à trac :
    « Le petit est en prison !
    — Pierre ?
    — Oui, oh, il n’a rien fait de mal… C’est une affaire de politique. Il tenait pour Pétain, alors, à la Libération, on a dit qu’il était un collaborateur. Tu comprends ? »
    Incapable de parler, Yvette hocha la tête. Ah oui, elle comprenait, et même très bien !…
    Mais que venait faire sa mère dans tout cela ?
    Marie la renseigna :
    « Il est en prison à Montpellier. C’est loin ! Personne n’en aurait jamais rien su si ta mère ne l’avait proclamé dans tout le village.
    — Mais comment l’a-t-elle su ?
    — Je n’en sais rien. Mais elle est bougrement bien renseignée, elle a tout raconté aux uns et aux autres, en faisant mine de nous plaindre, bien sûr ! Toute la commune en a parlé et finalement, c’est arrivé jusqu’à nos oreilles. »
    Elle essuya encore une fois ses yeux rougis d’où les larmes se refusaient à couler.
    « Nous, nous le savions. La belle-fille nous l’avait écrit, mais nous pensions qu’il n’y resterait pas très longtemps. Six mois, qu’il y a passé, avant qu’on ne le renvoie chez lui !… Et puis, nous pensions aussi qu’ici, personne n’en saurait jamais rien… Et puis, voilà… Il a fallu que cette fouineuse de merde y mette le nez !…
    C’est comme pour Ségala, elle l’a fait arrêter par le maquis en disant qu’il faisait du marché noir avec les Allemands. C’est sa ferme qu’elle guignait…
    Et elle, Dieu seul sait ce qu’elle a fait pendant la guerre ! On dit que c’est elle qui a dénoncé tous les jeunes réfractaires au travail obligatoire. Ils se cachaient dans les bois. Les gendarmes sont venus pour les chercher. La première fois, ils sont venus seuls… Ils ne les ont pas arrêtés, ils leur ont recommandé de se cacher. Ils diraient qu’ils ne les avaient pas vus…
    Mais la seconde fois, avec eux, il y avait la Gestapo. Ils sont arrivés la nuit Quelques-uns ont réussi à s’échapper, mais pas tous ! Ils ont pris Louis Blanc et Lucien Pergot. Et il a fallu qu’ils partent en Allemagne !
    Le fils Ségala, lui, il était déjà en Allemagne. Il avait été pris dans une rafle.

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