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la tondue

la tondue

Titel: la tondue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie de Palet
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vient-il se mêler de nos affaires ? Cela le regarde-t-il, ce qui s’est passé ici pendant la guerre ? Et où était-il donc, lui, en ce temps-là ? Il aurait dû combattre, au lieu de se cacher !…
    — Peut-être combattait-il, justement.
    — Allons donc, c’est tout juste un beau parleur, un rêveur, de ceux qui proposent toujours et ne mettent jamais la main à la pâte… Et puis, es-tu certain de ce que tu avances ? Ce garçon c’est peut-être un imposteur, quelqu’un qui a eu vent de cette histoire et qui a flairé la bonne affaire. Il est là pour nous extorquer de l’argent, un point c’est tout…
    — Calme-toi, Clémence, mais suppose, quand même, que ce garçon vienne nous réclamer des comptes.
    Laisse moi parler, s’interrompit-il en voyant un geste de sa femme. Suppose qu’il vienne, preuves en main, nous demander où est passée la fortune de sa mère…
    — Preuves en main, la fortune de sa mère… Comment cela ? Que veux-tu dire ?
    — Eh bien, il arriverait en te prouvant qu’il est le fils Durand et qu’il veut savoir où sont passés les titres, les bijoux et tout l’argent que possédait sa mère…
    — C’est bien simple, je n’en sais rien du tout, moi… Et toi non plus…
    — Facile à dire, mais tu étais sa meilleure amie, et elle aurait pu te confier tout ce qu’elle avait avant de se laisser emmener par les Allemands…
    — Oui, bien sûr, elle aurait pu, mais elle ne l’a pas fait.
    — Allons, allons, Clémence, tu ne vas tout de même pas… »
    Mais, sa femme continua comme si elle ne l’avait pas entendu.
    « Elle a été arrêtée par les Allemands très rapidement et elle n’a pas eu le temps de mettre sa fortune en lieu sûr. Ah, si elle avait pu, bien sûr… Mais cela s’est fait si vite que la pauvre est partie sans pouvoir dire un mot… Même à moi, la seule amie qu’elle avait dans le village. »
    En disant cela, Clémence paraissait tellement convaincante que des larmes lui montaient aux yeux et qu’elle ne pouvait dominer le tremblement de sa voix.
    Le père renonça et sortit la tête basse. Un poids énorme lui oppressait la poitrine ; il voyait bien que Clémence, par amour du gain, sacrifiait sa fille. Mais il n’osait pas, il n’oserait jamais, se dresser contre elle. Et pourtant, il aimait Yvette. Il donnerait sa vie pour elle sans hésitation, mais Clémence, c’était autre chose…
    Clémence, c’était une partie de lui-même qu’il ne pouvait pas renier, c’était celle qu’il avait toujours attendue, celle qu’il était encore tout étonné d’avoir rencontrée, celle qu’il appelait en secret son miracle permanent, ébloui chaque jour de sa présence…
    Il rêva à sa jeunesse triste et travailleuse, ni pire ni meilleure que celle de tous les garçons de son âge, au début du siècle… Il avait, comme les autres, couru un peu les filles. La malchance voulut que lors de ces sorties, il tombe amoureux de la sœur d’un de ses copains, la douce et fragile Marie… Aujourd’hui, quand il repensait à elle, il lui était impossible de se rappeler son visage. Mais à vingt ans, il lui avait trouvé un charme incomparable et, peu de temps après, Yvette s’annonçait…
    La famille de Marie avait exigé réparation. Ses parents avaient conseillé le mariage ; il était jeune, il s’était laissé persuader que cette solution était la meilleure. Il n’avait jamais compris cette fille effacée, gentille et renfermée qu’il avait épousée… Quand elle était morte, des suites d’une fièvre puerpérale, il l’avait beaucoup pleurée et s’était senti désespéré. Ses amis l’avaient consolé avec des gestes touchants et maladroits.
    Aujourd’hui, en revivant ce passé, il s’étonnait de le retrouver encore si présent à sa mémoire… Il ne s’attendait pas à cette mort si rapide, d’où son désespoir. L’accouchement s’était très bien passé. Il avait été à peine déçu d’avoir une fille, les garçons, ce serait pour plus tard…
    Et puis, se retrouver veuf, à guère plus de vingt ans et avec un bébé naissant, quelle tuile ! Il avait été effrayé par les responsabilités qui lui tombaient sur les épaules… Enfin, il regrettait le confort douillet que sa femme lui avait apporté pendant les quelques mois de leur vie commune et la tendresse rassurante de ses nuits…
    Cependant, au fin fond de lui-même, sans oser l’avouer, il reconnaissait qu’il avait été

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