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La Trahison Des Ombres

La Trahison Des Ombres

Titel: La Trahison Des Ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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été réparée et remontée sur
des gonds de cuir. La grande pièce avait sans doute, autrefois, servi de solar,
c’est-à-dire de salle commune pour la famille du seigneur. Le plafond était
encore en bon état et le plâtre avait été nettoyé. L’ordre et la propreté du
lieu étonnèrent le clerc. Il y avait des tabourets, un banc, une table sur tréteaux,
deux larges coffres, une niche aménagée dans la paroi et, dans un coin, au
fond, un lit à quatre colonnes entouré de courtines rouges fanées. Tout autour
du solar on avait disposé des chandelles sur des supports de fer et des
lumignons que Sorrel s’empressa d’allumer.
    — Installez-vous, proposa-t-elle.
    Corbett jeta un coup d’œil autour de lui et
siffla entre ses dents.
    — C’est très confortable, reconnut-il.
    — Bien sûr ! répondit Sorrel.
    Elle alla dans une petite chambre voisine et
revint en poussant un brasero à roulettes muni d’un couvercle de métal. Corbett
la regarda enflammer avec adresse les charbons et, après avoir pris un petit
sac d’herbes écrasées, répandre une poudre sur les brandons. Un parfum agréable
et chaud envahit la salle.
    — Qui a arrangé tout cela ? interrogea
le magistrat.
    — Furrell. Vous comprenez, Messire,
Beauchamp n’appartient à personne. Les gens sont terrorisés par les fantômes
et, quand la rivière déborde, ça peut être dangereux, mais la grand-salle, le
solar et ma resserre sont épargnés. Furrell était un bon braconnier, ajouta-t-elle
avec fierté. Tout à l’heure j’ai apporté trois faisans à La
Toison d’or. La bonne viande fraîche, étripée et nettoyée avec
soin, rapporte beaucoup. Mon mari avait acheté le lit à un marchand qui partait
à Londres. Les autres meubles viennent de gens comme Deverell : c’est
comme ça qu’on le payait.
    Corbett avait remarqué les peintures sur le mur.
Il se leva et s’en approcha. Tracées au fusain et coloriées grossièrement,
elles évoquaient de petites scènes champêtres. Le plus grand nombre
représentait un homme ou une femme prenant un lièvre au filet ou attrapant un
connil dans le foin. D’autres étaient plus assurées : un faisan s’envolait
d’un buisson d’ajoncs, tête renversée comme s’il avait été atteint par un
lance-pierre ; un daim, bois dressés, fléchissait les genoux, une flèche
plantée profondément dans le cou.
    — De qui est-ce ? s’enquit Corbett.
    — De Furrell. N’oubliez pas que si vous
travaillez le jour, mon époux travaillait la nuit.
    Le clerc se remit à étudier les esquisses.
Sorrel apporta deux coupes d’étain. Elle les remplit de vin et, saisissant un
petit tisonnier, fourragea dans le feu à présent ardent. Puis elle retira le
pique-feu, réchauffa le vin et le saupoudra de muscade. Elle tendit au
magistrat une coupe entourée d’un chiffon.
    — C’est du bon vin,
n’est-ce pas ? demanda-t-elle en s’asseyant sur le banc d’en face, les
yeux brillants d’impatience.
    Corbett se sentit un peu
mal à l’aise.
    — Dites-moi,
croyez-vous vraiment que je puisse découvrir la vérité ? questionna-t-il.
    — Il le faut.
    Elle désigna une petite
niche contenant une statue de la Vierge et, à ses pieds, une chandelle fixée
dans de la cire.
    — Je la prie tous
les jours. Vous êtes la réponse de Dieu.
    Corbett sirota son vin.
Il était tiède et moelleux. Il se sentait détendu et plutôt flatté. La plupart
des étrangers ne supportaient pas sa vue. Un clerc royal, surtout le garde du
Sceau privé, était jugé dangereux en tant qu’homme qui avait l’oreille du
souverain.
    — Bon.
    Il reprit une gorgée de
vin.
    — Il y a donc cinq
ans, Sir Roger Chapeleys a été pendu. Furrell s’est rendu devant les juges pour
soutenir sa cause ?
    — Je vous ai déjà
dit tout ça !
    — Qu’est-il arrivé
ensuite ?
    — Eh bien, dit
Sorrel avec une grimace, Sir Roger a été emprisonné quelque temps. Sir Louis a
expédié des suppliques à Londres, mais le roi les a renvoyées. Le jury avait
déclaré Sir Roger coupable.
    Elle avala une lampée de
sa boisson.
    — Le malheureux a
même proposé une ordalie, qu’on lui a refusée. La sentence de mort a été confirmée
et on l’a pendu.
    — Avez-vous assisté
à l’exécution ?
    — Oh, non !
Furrell non plus.
    — Et quand votre mari
a-t-il disparu ?
    Sorrel plissa les paupières.
    — Un mois environ après cela. Furrell était
un homme étrange. Il avait beaucoup à se

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