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L'archipel des hérétiques

L'archipel des hérétiques

Titel: L'archipel des hérétiques Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mike Dash
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passé trois ans dans une prison
portugaise pour une tentative de vol de cartes secrètes des mers
d'Extrême-Orient. Lors de l'arrivée de la première flotte à Bantam, Houtman,
furieux de se voir imposer des prix supérieurs à ceux qu'il escomptait, se
vengea de cette mauvaise surprise en ouvrant le feu sur la ville avec ses
canons. Lors de l'escale suivante, les Javanais prirent Y Amsterdam d'assaut et massacrèrent une douzaine de membres de l'équipage. Plus loin sur
la côte, les marques de l'amitié que lui témoignait le prince de Madura
éveillèrent les soupçons de Houtman, qui donna à nouveau l'ordre de tirer sur
le comité d'accueil, envoyé à leur rencontre par le prince. Enfin, son projet
de voyage aux îles Moluques, productrices de clous de girofle, capota à cause
d'une quasi-mutinerie de l'équipage. Dans ces circonstances, on comprend que,
lorsque les survivants 11 de YEerste Schipwaart regagnèrent
Amsterdam, après plus de deux ans d'absence, la cargaison de poivre qu'ils
ramenaient dans leurs cales ait tout juste suffi à couvrir les frais de
l'expédition.
    Reinier Pauw et ses collègues ne manquèrent pas d'en tirer
les leçons qui s'imposaient. Ils s'associèrent avec un groupe de marchands du
Sud Nederland pour armer une seconde flotte, plus imposante encore, qui
appareilla au printemps 1598 12 . Deux ans plus tard, les huit navires
de la Tweede Schipwaart arrivaient en vue d'Amsterdam, les cales
pleines. Malgré le coût de l'expédition, qui dépassait le demi-million de
florins, elle se solda par un bénéfice de 100 %.
    La rentabilité du commerce des denrées de luxe se trouvait
brillamment et définitivement démontrée. Le principal problème des marchands
d'Amsterdam serait désormais de dissuader la concurrence. Quatre flottes
rivales, armées par des marchands du Sud Nederland et de Middelburg, avaient
mis le cap sur les Indes la même année que la Tweede Schipwaart. L'année
suivante, un autre consortium s'intitulant Compagnie du Nouveau Brabant arma sa
propre flotte, et, en 1601, ce furent non moins de quatorze expéditions
hollandaises qui s'élancèrent sur la route des Indes. Les Pays-Bas avaient
désormais supplanté le Portugal dans le commerce avec l'Orient.
    La virulence de cette compétition eut pour corollaire une
brusque flambée des prix pratiqués en Orient, qui doublèrent en l'espace de six
ans, provoquant une baisse proportionnelle des bénéfices. La situation devenait
préoccupante. En 1602, des représentants des compagnies rivales se réunirent
pour discuter de la fondation d'une alliance financière, qui regrouperait leurs
intérêts en une seule grande compagnie.
    Il fallut cinq mois de délicates tractations pour trouver
un terrain d'entente. Mais lorsque les négociations aboutirent enfin, le 20
mars 1602, les différents consortiums fusionnèrent, constituant une corporation
géante qui prit le nom de Verenigde Oost-indische Compagnie* 13 .
La direction générale de la VOC fut confiée à un comité de dix-sept directeurs,
les Heren Zeventien - les Dix-sept Messieurs ,4 . Cette
assemblée, qui disposait d'une influence prépondérante, était responsable de
l'ensemble de la stratégie commerciale de la compagnie.
    Elle se réunissait deux ou trois fois l'an, pour des
sessions pouvant s'étendre sur quatre semaines. Les six chambres de la VOC
gardaient cependant une large autonomie. Chacune nommait son propre comité de
direction, chargé de diriger ses projets. Elles faisaient construire leurs
propres navires et s'octroyaient la plus grosse part des bénéfices.
    Le succès de cette nouvelle compagnie fut immédiat. La
première expédition appareilla en 1602 et réalisa d'énormes bénéfices. La VOC
fut tout aussi favorisée par le sort dans les batailles qui opposèrent ses
navires à ceux des Portugais, lesquels furent littéralement débordés par la
puissance de ces Hollandais qui venaient les défier sur leur propre terrain.
Même lorsqu'ils n'avaient pas l'avantage du nombre, les Hollandais
l'emportaient sur leurs adversaires par leur discipline, leur motivation et la
supériorité de leur matériel. En 1605, ils s'étaient emparés des îles d'Ambon,
de Tidore et de Ternate, qui comptaient parmi les principales productrices
d'épices et fournissaient à elles trois la quasi-totalité de la production
mondiale de clous de girofle. Cette victoire ne fit qu'affermir les positions
de la Compagnie sur le sol national. La « Jan Compagnie 5 »,

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