Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le calice des esprits

Le calice des esprits

Titel: Le calice des esprits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
Vom Netzwerk:
taverne peut-elle avoir vent de ces
choses-là ?
    Je ne répondis pas tout en
maudissant ma propre stupidité.
    — Fais-tu partie des Secreti  ?
    Il fit un pas en avant ; la
pointe de sa dague s'enfonça un peu sous mon menton. Il me dévisagea avec
attention.
    — Je suis, siffla-t-il, un
étudiant des collèges d'Oxford. Comprends-tu ce que cela signifie ?
    Il appuya davantage son poignard.
    — Me prends-tu vraiment pour
un imbécile, putain * ?
    Il rejeta la tête en arrière, se
racla la gorge et me cracha à la figure. Je ne bronchai pas. Il s'empara de ma
main dont il tâta la paume.
    — Douce, chuchota-t-il d'une
voix rauque, comme ton corps.
    Il se colla contre moi. Son
haleine fétide me fit tressaillir.
    — Tu es bien l'une des Secreti  !
m'accusa-t-il. L'une des gargouilles, l'une des innombrables espionnes du roi
Philippe. Bon, je prendrai d'abord mon plaisir.
    Et il enfonça plus fort le bout de
sa lame tout en relevant ma robe.
    — De grâce, de grâce !
suppliai-je en essayant de détourner son attention.
    Il se mit à rire, tout au plaisir
qu'il escomptait. Je tirai la dague italienne de ma propre ceinture et, alors
qu'il m'enlaçait, cherchant à tâtons les aiguillettes de ses hauts-de-chausses,
je plantai mon arme sans hésiter et profondément dans son flanc gauche vers le
cœur. Le choc et la douleur le firent reculer en titubant, courbé en deux,
bouche bée, crachant du sang. Il s'avança vers moi en vacillant. Je m'esquivai
soudain le long du mur du dépositoire, qu'il frappa et heurta de la tête avant
de s'effondrer sur le sol.
    Je courus hors du cimetière des
Innocents jusque dans les rues pavées animées. D'étranges scènes, d'étranges
sons se brouillaient dans mon esprit, des cloches sonnaient, des bouches, sous
des guimpes, béaient de surprise, des mendiants, du fond de leurs capuches,
jetaient des regards noirs, un porc flairait le cadavre ballonné d'un chat, un
enfant aveugle faisait cliqueter son bâton, un mastiff hurlait, poil hérissé,
babines retroussées. Je m'enfuis dans une ruelle. Une enseigne d'apothicairerie
grinçant dans le vent retint mon attention. Je me remémorai oncle Réginald, ses
yeux bienveillants et doux, sa voix rassurante. À bout de souffle, je
m'accroupis sur le seuil étroit de la boutique et essuyai ma sueur. La mort de
Face de Rat était une chose, mais ce qu'il m'avait révélé me terrorisait aussi.
Si ce n'était plus une rumeur, si Isabelle ne se rendait pas en Angleterre,
quel espoir me restait-il ?
    Je me calmai. Il me fallait
retourner chez Simon de Vitry. Il saurait ce qu'il fallait faire. Je
m'approchai de la maison du marchand en évitant la poterne et me dirigeai vers
la porte principale. Elle n'était pas fermée à clef. Je l'ouvris, entrai dans
le vestibule et fus accueillie par un épouvantable spectacle. À quelques pas,
le serviteur baignait dans une mare de sang, un carreau d'arbalète profondément
fiché dans le dos ; le clerc était étendu sur le seuil de la petite pièce
où Simon m'avait d'abord reçue. Au pied de l'escalier gisait la servante. Un
carreau l'avait atteinte en pleine poitrine et le sang jaillissant formait une
flaque près d'elle. Je me souviens bien qu'il n'y avait pas de sang sur la
rampe mais que j'en remarquai en haut du mur de plâtre blanc. Je fus si saisie
par l'horreur de toute la scène que je restai là à regarder autour de moi cet
endroit de malemort. Puis je revins vers la porte, poussai le verrou et
contemplai les trois cadavres. La mort les avait capturés dans ses filets tout
d'un coup, sans prévenir. Je m'avançai, en faisant avec précaution le tour des
mares de sang, et tâtai la peau de chaque dépouille. Elles n'étaient pas encore
froides, le sang ne s'était pas coagulé. Je montai l'escalier, passai devant le
corps de la servante en évitant de regarder ses yeux fixes, épouvantés par la
mort. J'étudiai la tache de sang sur le plâtre et hochai la tête d'étonnement,
puis j'examinai derechef le cadavre de la jouvencelle. Elle était affalée au
bas des marches, un peu de côté. Le sang s'écoulant de la blessure avait
éclaboussé l'escalier. Comment, dans ce cas, le plâtre avait-il été
souillé ? Peut-être l'assassin avait-il déplacé le corps puis voulu monter
les marches, mais alors il aurait suivi le même chemin que moi, en se tenant à
la rampe, qui, elle, était propre. Je continuai à monter.
    Messire Simon de Vitry gisait dans
la petite galerie

Weitere Kostenlose Bücher