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Le calice des esprits

Le calice des esprits

Titel: Le calice des esprits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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Isabelle
parut surprise. Édouard ne bougeait pas, le menton dans les mains. Clauvelin
voulut saluer, mais le roi désigna sa chaire en murmurant que ce n'était pas le
moment de faire des cérémonies. Gaveston prit place à côté du tabellion qui
était fort nerveux, s'empara d'un morceau de viande, le trempa dans un bol de
sauce et le fourra dans la bouche de Clauvelin.
    — Jean, Jean, s'exclama-t-il
avec brusquerie, je suis si heureux de votre présence !
    — Votre Grâce, c'est un grand
honneur que de faire partie de la maison de la reine...
    — Oui, oui, coupa Gaveston.
Il faut que je vous parle, messire, à propos de l'abbaye de
Saint-Jean-des-Vignes, ou plutôt de son abbé qui me doit certaines sommes. J'ai
besoin de vos conseils...
    Je regardai la scène avec une
horreur grandissante. Gaveston me faisait penser à un gros matou jouant avec
une souris. Clauvelin, sous le charme du bavardage et de l'entregent du favori,
ne se rendait pas compte du courroux qui bouillonnait dans l'âme du puissant
seigneur. Mais, à la façon dont ce dernier déchiquetait la viande, remplissait
le gobelet de Clauvelin... Quand le pichet fut vide, il se dirigea vers le
buffet pour l'emplir encore. Flatté, le notaire livra maints ragots sur
l'abbaye. Gaveston attendit que le vin eût fait son plein effet, puis se leva,
s'avança derrière le tabellion et, en un clin d'œil, lui passa un garrot
par-dessus la tête et le serra autour de sa gorge. Clauvelin laissa choir son
gobelet, se dressa en titubant, mais Gaveston, le visage rouge d'une joie
rageuse, le repoussa. La princesse allait s'insurger quand le roi la retint
d'un geste. Fasciné, le visage un peu empourpré, la tête inclinée de côté,
Édouard restait assis et regardait suffoquer Clauvelin. Gaveston se pencha et
tira sur le garrot.
    — Jean de Clauvelin,
entonna-t-il avec une feinte solennité, mieux connu sous le nom de Julien
Sarnene, vous êtes un assassin, un fourbe venu du Béarn, en Gascogne. Vous avez
bu une potion et avez eu une vision. Vous avez prétendu être tombé dans les
mains des puissances des ténèbres, seulement pour être guéri. Quand on a
examiné le miracle, l'évêque de la contrée a fait quérir ma mère Agnès de
Gaveston pour lui demander son avis.
    Gaveston tira sur la corde puis la
desserra.
    — Elle a récusé vos
affirmations, s'en est raillée et a dit que cela n'avait point de rapport avec
Satan, mais dépendait de ce que vous aviez mangé et bu, que vous aviez
peut-être absorbé un philtre.
    Le favori relâcha encore un peu le
garrot.
    — Votre ruse pour vous
attirer la bienveillance et tirer de l'argent d'un prétendu miracle a été un
échec. Toute votre aventure est devenue douteuse et vous n'avez pu prouver que
votre ancien maître trempait dans la sorcellerie. Vous espériez obtenir sa
fortune, être récompensé. Plus tard, profitant de l'éloignement d'Arnaud de
Gaveston, mon père, qui était soldat, vous avez en secret dénoncé ma mère comme
sorcière auprès de l'Inquisition. Nombreux étaient les envieux et les méchants
qui ne demandaient qu'à vous croire. Vous avez donné des renseignements sur la
connaissance qu'avait ma mère des simples et des potions. Ma mère a dit la
vérité. Elle a répondu aux questions, mais, se faisant, s'est condamnée en
niant les histoires de démons et de cures miraculeuses et en maintenant que les
causes naturelles devaient d'abord être étudiées. On l'a jugée et brûlée. On
vous a fourni argent et protection. Vous avez disparu pour renaître sous le nom
de Jean de Clauvelin, tabellion.
    Gaveston rapprocha ses lèvres de
l'oreille de Clauvelin.
    — Je vous ai pourchassé,
messire, en tout lieu. Mirabila dictu  — c'est merveilleux,
messire, de constater tout ce qu'on peut apprendre en tant que comte de
Cornouailles, régent d'Angleterre, proche confident de son roi. L'an passé,
quand j'étais dans le royaume de France, j'ai découvert votre vrai nom et
l'endroit où vous vous cachiez.
    — Ce n'est pas moi, ce n'est
pas moi ! geignit Clauvelin.
    — Le tribunal de
l'Inquisition, près de Carcassonne, dit que si.
    Il détendit tout à fait la corde,
laissant sa victime s'affaler sur sa chaire.
    — Les inquisiteurs sont
hommes fort méticuleux, reprit Gaveston. Vous avez un grain de beauté au cou, à
droite. Il agrippa le cou décharné de Clauvelin, abaissa le haut col du
tabellion et tourna sa tête sans ménagement de façon que nous puissions

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