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Le calice des esprits

Le calice des esprits

Titel: Le calice des esprits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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bouleversée, si affolée que je
m'assis sur un rebord de pierre. Était-ce un clerc ? M'avait-il vue
quitter la taverne avec Face de Rat ? Nous avait-il suivis et avait-il été
témoin du meurtre de Crokendon derrière le dépositoire ? Quand je me
ressaisis, il était trop tard pour le poursuivre, et je finis par mettre tout
cela sur le compte d'une hallucination.
    Ce soir-là, Isabelle et ses dames
d'honneur, invitées par le maire et les notables de la ville, se rendirent à
Cantorbéry. Ces derniers avaient organisé un splendide banquet privé dans une vaste
et magnifique taverne voisine, L'Échiquier de l'espoir . Seul l'écho des
mélodieuses psalmodies des moines qui chantaient vêpres et des versets latins
troublait le silence du prieuré. Je pris un souper solitaire dans le petit
réfectoire de l'hôtellerie. Casales, Sandewic et leurs compagnons s'étaient
mêlés à l'escorte royale à Cantorbéry. Je demeurai quelque temps à lire, à la
lumière d'une chandelle, un manuscrit que frère Ambrose m'avait prêté. J'allais
me retirer quand un frère lai que le reste de la communauté appelait Simon
Simplex — un vieil homme aux touffes de cheveux dressées sur la tête,
aux yeux laiteux, de la salive gouttant de la commissure des
lèvres — fit irruption.
    — Oh ! madame, frère
Ambrose a besoin de vous à l'infirmerie ! annonça-t-il en gesticulant.
    Je retournai à ma chambre, pris ma
chape et traversai le cloître désert et les couloirs aux murs de pierre. Les
cloches de la ville carillonnaient, les moines avaient commencé à chanter
complies et une phrase, tirée de l'épître de saint Pierre et dans laquelle il
est fait allusion à Satan sous la forme d'un lion rugissant qui rôde en
cherchant qui dévorer, me traversa l'esprit. J'aurais dû tenir compte de
l'avertissement.
    L'infirmerie, située dans un
bâtiment à un étage à l'autre bout du prieuré, donnait sur le jardin médicinal.
Le local se trouvait en haut d'un escalier fort abrupt. Frère Ambrose m'avait
confié que le fondateur du prieuré l'avait voulu ainsi afin d'obliger les gens
à se demander s'ils étaient réellement malades avant de tenter cette montée.
Les marches étaient si raides que frère Ambrose lui-même avait besoin d'aide
pour les gravir et qu'il fallait faire porter blessés et malades par de
robustes serviteurs.
    Avant que j'y sois arrivée, la
nuit était tombée. En haut de l'escalier, des torches, flanquant la porte
béante, flamboyaient et faisaient signe dans le vent. Des buissons et des
arbres qui bordaient l'édifice montait le dernier croassement des corneilles.
Un goupil en chasse glapit dans la pénombre, à quoi répondirent sur-le-champ
les jappements profonds comme un son de cloche des chiens du prieuré. Je montai
l'escalier en me demandant ce que voulait frère Ambrose. Simon avait disparu,
et je me fis la réflexion qu'il devait donc s'agir d'une affaire urgente, sinon
Ambrose aurait rejoint ses frères dans le chœur pour complies. J'étais arrivée
sur le seuil et allais pénétrer dans l'étroit couloir, éclairé par un seul
flambeau et la lueur d'un brasero à son extrémité, juste devant l'huis de
l'infirmerie, quand on me jeta sur la tête un sac grossier et empestant
l'humus. Je me débattis en hurlant. Un coup sur la tempe me fit vaciller. Je
fus poussée et tirée, on me traîna dehors afin de me précipiter en bas de ces
marches abruptes à l'arête coupante. La pensée de Pourte tombant dans le noir
m'incita à me battre, mais j'étais éperdue. Mes forces m'abandonnaient, mes
jambes se dérobaient sous moi et mon assaillant avait dû me parvenir en haut de
l'escalier quand ma délivrance survint.
    —  Au secours ! Au
secours * !
    La voix forte vibrait ; un
bruit de pas résonna comme si quelqu'un courait vers nous. Je luttai avec
désespoir, bien décidée à m'éloigner de cette voix et de la cruelle chute.
Haletante, je m'écrasai contre la grande porte qu'on avait refermée et glissai
sur le sol. J'arrachai le sac et jetai un coup d'œil à droite. Rien, si ce
n'était le brasero rougeoyant. Je rampai à quatre pattes, à la façon d'un
chien, vers le bord de l'escalier et regardai en bas. Rien non plus. Je me
relevai en titubant et me dirigeai avec prudence vers l'hôtellerie déserte.
Après l'avoir atteinte, je montai avec peine les marches, puis je fermai et
verrouillai l'huis de la pièce derrière moi.
    Je restai étendue sur le sol
quelque temps. J'avais

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