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Le cercle de Dante

Le cercle de Dante

Titel: Le cercle de Dante Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matthew Pearl
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vœu de protéger Dante. Ici même, sous ce toit.
    — Assurons-nous d’abord de nous protéger nous-mêmes et aussi notre ville, rétorqua Fields. Sinon Dante se retrouvera sans personne pour lui tenir compagnie !
    — Vous avez raison, mon cher Fields. Nous protéger et protéger Dante sont à présent une seule et même chose », renchérit Holmes. Il s’était exprimé sur un ton détaché, vaguement tenté de rappeler qu’il avait eu raison depuis le début en imaginant des ennuis. « Une seule et même chose, répéta-t-il. Et si cette information venait à se savoir nous ne serions pas les seuls à subir le blâme. Les catholiques aussi, tous les immigrés…
    — Le ciel nous préserve, nous serions ruinés ! » soupira Fields.
    Ses deux auteurs avaient raison, il le comprenait bien. À parler à la police, leur réputation se retrouverait dans les limbes, pour ne pas dire dans le néant. Oh, ce n’était pas aux conséquences juridiques qu’il pensait, mais à la rumeur. À Boston, elle pouvait détruire un homme plus sûrement que le bourreau. Ses auteurs avaient beau être vénérés par le public, il se cache toujours au fond du cœur des gens un soupçon de jalousie malsaine envers leurs idoles. La nouvelle qu’ils pussent être mêlés même de loin à des meurtres aussi scandaleux se répandrait à une vitesse bien supérieure à celle du télégraphe. Il en avait vu de ces réputations sans tache traînées dans la boue sur la base de ragots. Assez souvent pour en être dégoûté.
    « Qui sait si la police ne touche pas déjà au but ? insista Longfellow… Nous devrions jeter un coup d’œil au texte que l’agent nous a confié l’autre jour, dit-il en sortant la feuille de son tiroir. À la lumière de ce que nous savons maintenant, son sens nous apparaîtra peut-être. »
    Il la lissa du plat de la main. Les érudits se penchèrent sur la maladroite transcription. Depuis l’ombre que projetait la barbe léonine de Longfellow sur le papier, les hiéroglyphes fixèrent ardemment les quatre visages étonnés où dansaient les reflets cramoisis du foyer.
    Derman see amno atesmnone turnay eeotur lasheeato nay.
    — Mais… c’est le milieu d’un tercet ! s’écria Lowell à voix basse. Comment avons-nous pu rater ça ? »
    Fields s’empara prestement de la feuille. Il ne voyait pas en quoi ce gribouillis était un tercet, mais il ne voulait pas l’admettre. La tête lui tournait. Après tous ces événements, il avait du mal à basculer sur l’italien. Le papier tremblait dans sa main. Il le reposa délicatement sur la table.
    «  Dinanzi a me non fuor cose create se non etterne, e io etterno duro, lasciate ogne, récitait Lowell à son intention. L’inscription gravée au-dessus des portes de l’Enfer. Une partie, tout du moins ! Lasciate ogne speranza, voi ch’intrate. »
    Ses paupières se fermèrent d’un coup, et il se mit à traduire :
     
    Rien avant moi ne fut jamais créé
    Que d’éternel et je dure éternelle :
    Vous qui entrez, laissez toute espérance.
     
    À l’hôtel de police, l’inconnu avait reconnu le signe, lui aussi, et il avait sauté par la fenêtre. Il avait vu les Ignavi, les Indifférents, battre l’air de leurs bras en toute impuissance et se frapper eux-mêmes et il avait vu les guêpes et les taons assaillir les ombres blanches et nues, des larves infectes ramper hors des trous entre leurs dents, tomber à terre et se regrouper en tas. Le sang coulait de ces âmes et se mêlait au sel de leurs larmes, tandis qu’elles avançaient, précédées loin devant par un étendard blanc, symbole de leur errance. L’homme qui avait choisi de sauter par la fenêtre avait senti sa propre chair s’animer sous un grouillement de larves affolées, gavées de chair rongée. Il n’avait pu que fuir… Ou tout du moins essayer.
    Longfellow retrouva le feuillet portant la version finale de sa traduction du chant III et le posa sur la table pour comparer.
    « Cieux ardents ! » s’écria Holmes. Pris d’un essoufflement, il dût s’accrocher à la manche de Longfellow. « L’agent de police présent à l’autopsie du révérend Talbot, c’est le mulâtre venu nous consulter après la mort du juge Healey ! Certainement, il sait quelque chose ! »
    Longfellow secoua la tête.
    « Non, rappelez-vous… Il voulait identifier une langue inconnue, voilà pourquoi il venait voir Lowell qui est Smith Professor. Mais à ce moment-là, nous

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