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Le Chant des sorcières tome 1

Le Chant des sorcières tome 1

Titel: Le Chant des sorcières tome 1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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le souvenir de cette trompe au bas-ventre de Philibert de Montoison.
    Elle le chassa aussitôt. À l'instant de partir, elle s'apercevait à quel point elle était attachée à sœur Albrante, à son tempérament fantasque. Sa joie de quitter son calvaire s'en ternit. L'infirmière lui faisait face et elle la voyait empotée bien que fébrile, balayée par sa tristesse. Elle lui tomba spontanément dans les bras, laissant choir les pots d'onguents sur les tomettes de l'office où ils se fracassèrent.
    Un long silence ponctué de leurs reniflements les maintint ainsi accrochées l'une à l'autre, jusqu'à ce qu'Albrante trouve le courage de s'écarter et de prendre à pleines mains ce visage défait, pâle reflet du sien.
    — Allons, dit-elle en ramenant un sourire à ses lèvres, croirait-on à nous voir que c'est jour de grâce et d'allégresse ? Ma petite Hélène s'apprête à son premier bal et nous voici des mines d'enterrement !
    De ses index, elle gomma les larmes le long de la ligne du nez.
    — Vous voilà bien arrangée, ma fille. Et ces pommades par terre ne me serviront à rien pour y remédier.
    — Je suis désolée, elles m'ont échappé, s'excusa Philippine.
    Un regard complice. Elles se mirent à rire avant de s'enlacer de nouveau avec tendresse.
    — Vous me manquerez aussi, ma sœur, assura Philippine. Je vous écrirai. Tous les jours…
    — J'en serai heureuse, mais une fois par mois y suffira. Tu auras mieux à faire. Je n'ai pas toujours été dans ces murs, je sais de quoi je parle. Vis, mon Hélène, vis. Pense à moi comme on se soucie d'une amie chère, mais n'y perds pas ton temps.
    — Je vous le promets. Veillez sur mes cadettes en retour et sur nos malades. Le chevalier en a bien besoin.
    Philippine s'écarta et tira un bref de sa manche.
    — J'avais écrit cette lettre à son intention. Je voudrais que vous la lui remettiez lorsqu'il s'éveillera. Car il s'éveillera, n'est-ce pas ?
    — Dieu seul le sait, répondit Albrante en prenant le parchemin plié et cacheté. Mais tu peux compter sur moi. Toutes les fois où tu en auras besoin. Sache que ma porte te reste ouverte aussi longtemps que Notre-Seigneur me prêtera vie.
    — Je doute que cela soit du goût de l'abbesse, modéra Philippine.
    — Je voudrais bien voir qu'elle l'empêche, ricana Albrante en fronçant les sourcils.
    Philippine éclata de rire. Le chagrin les quittait. Restait leur mutuelle affection comme un ciment solide.
    — Je vais aller faire mes adieux à Laurent de Beaumont, décida la jouvencelle.
    — Et moi nettoyer ta maladresse… Hâte-toi. Sidonie ne sera pas longue.
    Philippine hocha la tête et passa la porte comme Albrante s'emparait d'un balai.
     
    Laurent de Beaumont promenait encore un œil lointain sur la pièce lorsqu'elle s'approcha du lit. Les médications de l'infirmière l'abrutissaient au moment où il les prenait, mais leurs effets de somnolence duraient peu.
    — Je vais vous aider à vous redresser, proposa Philippine en se penchant au-dessus de lui.
    Il enroula aussitôt ses bras autour d'elle pour l'attirer. Philippine hurla de surprise avant de se débattre vivement.
    — Lâchez-moi, ordonna-t-elle, ou je jure par Dieu de vous écorcher vif !
    Il obtempéra, davantage parce que les mouvements et le poids pourtant léger de la jouvencelle comprimaient ses côtes à l'endroit de sa blessure que par crainte de ses menaces. Philippine se redressa tandis qu'alertée par son cri, Albrante se montrait à la porte.
    — Laurent de Beaumont, grommela l'infirmière en agitant un index menaçant, prenez garde à vos manières sous mon toit ou je vous jette dehors et abandonne aux charognards le soin de vos restes !
    — J'étais encore dans un rêve délicieux, ma sœur, s'excusa le jouvenceau dans un sourire angélique qui ne trompa personne.
    — En ce cas, oubliez-le ! Et vite ! le fustigea Albrante en tournant les talons.
    Il attendit qu'elle ait disparu pour s'inquiéter :
    — Vous ne m'aidez plus ?
    Philippine approcha un tabouret du lit, s'y posa et croisa les bras sur sa poitrine.
    — Puisque vous semblez aller si bien, débrouillez-vous donc, lui assena-t-elle, fâchée.
    Il s'escrima à s'adosser à l'oreiller de plumes, soupira comme un enfant grondé, grimaça à outrance, gémit même pour attendrir la jouvencelle. Elle ne bougea pas d'un pouce.
    En désespoir de cause, il s'installa et la couvrit d'un regard d'ange qui contrastait avec ses joues

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