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Le Chant des sorcières tome 1

Le Chant des sorcières tome 1

Titel: Le Chant des sorcières tome 1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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forme de larme.
    — Ainsi que le veut la légende…
    Sidonie fouilla dans la bourse à sa ceinture et en ressortit son poing fermé.
    — M'expliquerez-vous en ce cas pourquoi ceci se trouvait en ma main lorsque je m'éveillai ?
    Elle l'ouvrit sous les yeux ébahis du baron.
    La larme de Mélusine scintillait comme un petit diamant sous le soleil déjà chaud du matin.
     

3
    Laurent de Beaumont n'eut que le temps de ramener son arme devant son visage pour parer la frappe meurtrière que lui réservait Philibert de Montoison. Leurs lames se heurtèrent de nouveau dans un fracas qu'étouffa le roulement du tonnerre. Déchirant le plafond anthracite des cumulus assemblés au-dessus des coteaux de Saint-Just-de-Claix, un éclair foudroya la cime d'un chêne dans la forêt toute proche.
    Laurent de Beaumont s'écarta de côté, feinta, puis fendit de l'avant, profitant du léger déséquilibre de son adversaire sur un sol inégal. Il reprit l'avantage, mais il sentait bien que ce n'était qu'un leurre.
    Philibert de Montoison rétablit sa garde et lui fit face.
    — Renonce ! cracha-t-il.
    — Plutôt mourir, gronda Laurent de Beaumont avant de réengager le combat.
    La chaleur accablante de ce mois d'août 1483 les rendait plus agressifs encore tandis qu'insidieusement leurs corps flanchaient. Laurent de Beaumont le sentait au choc du métal qui se répercutait à présent jusqu'en ses jambes lourdes et lui vrillait les poignets. Avant longtemps, il s'effondrerait.
    « Qu'à cela ne tienne, décida-t-il, finissons-en avec panache ! »
    Ramassant ses dernières forces, il se rua sur Philibert de Montoison, la pointe en avant.
    Philippine de Sassenage retint un cri d'épouvante en les voyant si proches l'un de l'autre qu'elle les devina embrochés de concert.
    — Cette fois, c'en est fait ! s'étrangla sœur Aymonette.
    Parvenue au même constat que la fille aînée du baron Jacques de Sassenage, elle tordit ses mains de désespoir. Leurs prières ininterrompues depuis l'engagement des deux hommes ne leur avaient été d'aucun secours.
    — Il faut faire quelque chose, gémit Philippine en se tournant vers la grande abbesse qui se tenait à leurs côtés, roide et digne.
    Celle-ci la couvrit d'un œil glacial :
    — N'en avez-vous pas assez fait ?
    Le regard de Philippine se noya. Elle s'efforça pourtant de ne pas le baisser.
    — Je vous en prie, ma mère, insista-t-elle.
    L'abbesse essuya d'un revers de main agacé la goutte épaisse qui venait de s'écraser sur son visage disgracieux.
    — La pluie s'en vient, trancha-t-elle. Je vous ordonne de rentrer.
    — Il s'agit de mon neveu, madame… lui rappela sœur Aymonette.
    Sa voix tremblait.
    À une centaine de mètres de ces trois femmes, les corps de Laurent de Beaumont et de Philibert de Montoison gisaient, face contre terre dans l'herbe qu'ils avaient piétinée.
    La révérende mère releva le menton. Toute cette affaire la contrariait au plus haut point et cependant elle ne pouvait laisser ces deux hommes agoniser à sa porte.
    — Lapogne et Lardeau se chargeront d'eux, décida-t-elle en s'écartant résolument du tragique spectacle pour remonter vers la herse relevée de cette ancienne forteresse.
    Devant son portail, les autres moniales rassemblées n'avaient rien perdu de la scène. Elles s'en retournèrent à leurs tâches en voyant l'abbesse s'avancer vers elles. Soulagée de savoir que les deux convers ramèneraient les duellistes à l'hospice, sœur Aymonette la suivit de son pas claudicant.
    Philippine ne parvenait quant à elle à détacher son regard des moribonds. Rajoutant à son sentiment de culpabilité, l'abbesse aboya par-dessus son épaule :
    — Cessez de vous abîmer en contemplation morbide et allez m'attendre dans mon bureau… Immédiatement !
    L'orage s'abattit avec violence sur l'abbaye de Saint-Just-de-Claix, comme la jouvencelle en franchissait le seuil à la suite de ses aînées, les épaules voûtées par le poids de sa détresse.
     
    Tout avait commencé une semaine plus tôt alors que Philippine avait reçu pour corvée de désherber le jardin des plantes aromatiques. La vie monastique lui pesait, bien qu'allégée par les dérogations consenties à son rang.
    Sœur Albrante, l'infirmière, avec laquelle la demoiselle s'entendait le mieux, ne lui avait pas caché que toutes à l'abbaye espéraient la voir prononcer ses vœux.
    Mais Philippine n'avait aucune envie d'embrasser le noviciat. À quatorze ans,

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