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Le Chevalier d'Eon

Le Chevalier d'Eon

Titel: Le Chevalier d'Eon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Evelyne Lever
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de s’en trouver offensés ou d’en témoigner du ressentiment au généalogiste, Messieurs de Carcado lui en devaient plutôt de la reconnaissance.
    Pour une fois, la chevalière eut gain de cause devant un tribunal, en l’occurrence celui du Châtelet, 27 août 1779. Mais les Carcado étaient furieux. Ils refusaient tout lien de parenté avec un personnage aussi sulfureux que d’Éon qui avait tiré de l’oubli un ancêtre qui ternissait l’honneur de la famille   : un hérésiarque condamné au concile de Reims au XII e siècle   ! Les Carcado ne souhaitaient pas rappeler le souvenir de ce moine défroqué de l’ordre de Saint-Augustin, qui s’adonnait dans la forêt de Brocéliande à des tours de magie et qui réunit sous sa houlette un petit peuple de miséreux, pilleurs de châteaux, d’églises et de monastères afin de redistribuer leur butin aux plus défavorisés. Et pour comble, ce d’Éon de l’Étoile ne s’était pas contenté de diriger une bande de pillards. Il avait fait de ces brigands des disciples qu’il endoctrinait, leur prêchant l’égalité. Il était ainsi à l’origine d’un de ces nombreux mouvements hérétiques (l’Éonisme) qui fleurirent en ce siècle   : il prétendait partager le monde avec Dieu et déclara devant le tribunal ecclésiastique devant lequel il fut traduit, qu’il était celui qui devait venir juger les vivants et les morts. Considéré comme fou dangereux, séducteur du peuple et hérésiarque, il fut condamné à la détention perpétuelle. Il mourut dans sa prison « avec son bon sens retrouvé   », à ce qu’on prétendit   ! La chevalière dut rire, tout bas de la déconvenue des Carcado et porter un toast de vin de Tonnerre à ce d’Éon de l’Étoile dont elle revendiquait volontiers la paternité...

Mlle d’Éon retournera en Angleterre
    Le traité de Versailles conclu entre la France et l’Angleterre en 1783, qui mettait fin à la guerre d’Amérique, laissa penser à la chevalière qu’elle pourrait retourner en Angleterre où l’appelaient ses affaires. Lautem, son logeur, se plaignait en effet de ne pas être régulièrement payé du loyer de son logement et menaçait de vendre la précieuse bibliothèque de son propriétaire. C’était un véritable sujet d’angoisse pour d’Éon qui aimait ses livres et ses manuscrits autant que ses terres de Bourgogne.
    D’autre part lord Ferrers était mort et ses héritiers, aussi étrange qu’on puisse l’imaginer, devaient de l’argent à la chevalière. En effet lors de son départ pour la France d’Éon avait remis à son ami lord Ferrers 5 000 £ que Beaumarchais lui avait fait parvenir de la part du roi. Avec cet argent, l’amiral s’engageait à régler les dettes du chevalier-chevalière. Or, il n’avait acquitté qu’une partie des dettes et gardé 3 000 £ pour l’achèvement des travaux de son château et l’exploitation d’une mine de plomb découverte dans son parc. Fort déçu par la conduite de son ami, le chevalier-chevalière lui avait demandé de régulariser la situation le plus rapidement possible, mais Ferrers avait laissé traîner les choses : il ne pouvait rembourser ces 3 000 £, mais promettait d’envoyer à d’Éon une obligation de cette somme avec intérêt de 5 %. On était alors le 26 décembre 1775 et le remboursement n’était possible qu’en 1780. Ce contrat fut alors transféré à M. Duval-Seguray, joailler et créancier du chevalier-chevalière. D’Éon avait donc quitté Londres l’esprit tranquille. L’année suivante, il apprit la mort de lord Ferrers mais la guerre l’empêchait de regagner l’Angleterre ou l’héritier de lord Ferrers n’avait aucune intention de rembourser les intérêts de la dette. En 1785, ils s’élevaient à 1 250 £, lord Ferrers ayant versé 5 % d’intérêts pour l’année 1776.
    La chevalière adressait des lettres pressantes à Vergennes devenu le conseiller le plus écouté du roi depuis le décès de Maurepas, mais le ministre ne se pressait pas de répondre. De guerre lasse, elle eut recours à un petit chantage. Elle affirma que si Lautem n’était pas payé, il risquait de vendre ses livres mais aussi ses manuscrits ; or parmi ces papiers, il y avait encore des épaves de l’ancienne correspondance secrète de Louis XV. Était-ce vrai ? On ne sait. Sur les conseils de sa célèbre locataire, Lautem écrivit à Vergennes. Excédé par les rebondissements de cette histoire,

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