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Le commandant d'Auschwitz parle

Le commandant d'Auschwitz parle

Titel: Le commandant d'Auschwitz parle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Rudolf Hoess
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achevée, on les gardait au camp pour un nouveau
bail de trois ou de six mois.
    En très peu de temps j’avais appris à connaître de près ma
compagnie, forte de deux cent soixante-dix hommes, et je pouvais me faire une
opinion sur la possibilité de libération de chacun d’entre eux. Pendant que j’étais
Blockführer, il y en eut très peu que je me vis obligé de transférer dans la
catégorie des asociaux et d’envoyer en prison. Ces gens-là volaient tout ce qui
leur tombait sous la main, répugnaient à tout travail et avaient une tenue
absolument déplorable. Mais la plupart sortaient améliorés de leur séjour dans
le camp : il n’y avait presque jamais de rechutes.
    Abstraction faite des récidivistes et des asociaux, ils se
sentaient généralement honteux de leur internement, en particulier les plus
âgés qui n’étaient encore jamais entrés en conflit avec la loi. Maintenant, ils
se voyaient punis pour s’être adonnés à la boisson. Ils avaient voulu s’octroyer
du bon temps, mais l’Office du travail avait jugé nécessaire de les interner.
Ces gens-là savaient très bien qu’ils seraient libérés après avoir purgé leur
peine et s’accommodaient avec plus ou moins de facilité des côtés pénibles de
la vie des camps.
    Or, le nombre ne dépassait pas dix pour cent de la totalité
des internés. Quatre-vingt-dix pour cent se répartissaient entre les catégories
suivantes : Juifs, émigrés, homosexuels, « sectateurs de la Bible [35]  », une
compagnie d’asociaux et sept compagnies d’internés politiques, pour la plupart
communistes.
    La durée de l’internement de tous ces prisonniers politiques
était indéterminée : elle dépendait de facteurs imprévisibles. Les
internés le savaient et l’incertitude leur pesait lourdement. Pour cette seule
raison, la vie dans le camp représentait pour eux une véritable torture. J’ai
eu l’occasion d’en parler avec beaucoup de prisonniers politiques, parfaitement
raisonnables et réfléchis. Leurs avis étaient unanimes. Ils acceptaient tous
les inconvénients de leur état : l’arbitraire des SS et de l’administration,
la dure discipline, la nécessité de vivre pendant des années les uns sur les
autres, la monotonie du travail quotidien. Mais l’incertitude au sujet de la durée
de leur internement leur paraissait insupportable : elle paralysait les
volontés les plus fortes.
    Leur libération dépendait souvent d’une décision arbitraire
de fonctionnaires subalternes et c’était là, d’après mes observations, le
facteur qui agissait de la façon la plus désastreuse sur la psychologie des
internés.
    Un professionnel du crime condamné à quinze ans de travaux
forcés sait très bien qu’il pourra récupérer sa liberté dans quinze ans au plus
et probablement beaucoup plus tôt.
    L’interné politique, par contre, arrêté à la suite d’une
dénonciation malveillante, est envoyé dans un camp de concentration pour une
période qui n’est pas fixée d’avance : peut-être pour un an, peut-être
pour dix ans [36] .
La vérification trimestrielle prescrite pour les internés allemands n’était qu’une
formalité. La décision appartenait au bureau qui avait ordonné l’internement :
et ce bureau-là n’était jamais prêt à reconnaître qu’il avait commis une
erreur. L’interné était la victime de ce bureau qui avait statué sur son sort.
Il n’y avait pour lui aucune possibilité de protester ou de faire appel. Dans
les cas les plus favorables, on procédait parfois, à titre exceptionnel, à des « enquêtes
supplémentaires » qui aboutissaient à des libérations surprenantes. Mais
il ne fallait pas compter sur ces cas exceptionnels. En règle générale, la
durée de l’internement dépendait du destin, ou plutôt du hasard.
    Il existe trois types de surveillants et de gardiens,
toujours les mêmes, que ce soit dans une prison préventive, dans un pénitencier
ou dans un camp de concentration. Ce sont eux qui peuvent faire de la vie des
prisonniers un enfer, ou quelque chose de supportable.
    Les méchants, les mauvais, les perfides, les brutaux
considèrent le prisonnier comme un objet sur lequel ils peuvent exercer leurs
penchants pervers en se déchargeant de leurs humeurs ou de leurs complexes d’infériorité
sans rencontrer la moindre résistance. Ils ne connaissent ni la pitié ni tout
autre sentiment humain. Ils profitent de la moindre occasion pour torturer les
prisonniers

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