Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le commandant d'Auschwitz parle

Le commandant d'Auschwitz parle

Titel: Le commandant d'Auschwitz parle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Rudolf Hoess
Vom Netzwerk:
Nous
nous dirigeâmes vers le nord, d’abord à Darss, et deux jours plus tard vers le
Schlesvig-Holstein, toujours en suivant les traces d’Himmler. Aucun de nous ne
parvenait à comprendre pourquoi il avait encore besoin de nous et à quel
service on pouvait nous employer. En dehors des miens, je devais encore m’occuper
de la femme d’Eicke, de sa fille et de ses enfants, et de quelques autres
familles qui ne devaient pas tomber aux mains de l’ennemi. Notre fuite s’effectuait
dans des conditions épouvantables. Tous feux éteints, nous avancions dans la
nuit, le long des routes embouteillées ; responsable de toute la colonne,
je devais veiller constamment à ce que des voitures ne soient pas séparées du
reste du convoi. Glücks et Maurer avaient emprunté une autre route, par Warnemünde.
À Rostock, deux gros camions chargés de toute notre installation de radio
tombèrent en panne ; lorsqu’ils purent enfin se mettre en route, on avait
déjà établi des barrages de chars et ils se trouvèrent pris dans une souricière.
Pendant la journée, nous cherchions à nous glisser rapidement d’un bois à l’autre
car la route était constamment bombardée. À Wismar, le feld-maréchal Keitel se
tenait sur le bord de la route et appréhendait les déserteurs. En poursuivant
notre chemin, nous apprîmes dans une ferme que le Führer était mort.
    Ma femme et moi nous eûmes, tous les deux la même pensée :
maintenant, c’était notre tour. Avec le Führer disparaissait tout notre
univers. La vie avait-elle encore un sens pour nous ? On nous
poursuivrait, on nous rechercherait. Nous voulûmes prendre du poison. J’en
avais procuré à ma femme, en prévision d’une avance inattendue des Russes, afin
qu’elle-même et nos enfants ne tombent pas vivants entre les mains des ennemis.
C’est à cause des enfants que nous renonçâmes au suicide et décidâmes de nous
soumettre à notre sort. Par la suite je l’ai toujours regretté. Nous aurions dû
mourir. La mort nous aurait épargné beaucoup de souffrances, surtout à ma femme
et aux enfants. Je ne sais pas ce qui les attend encore. Mais je sais que nous
aurions dû périr avec le monde auquel nous rattachaient des liens
indestructibles.
    J’emmenai ma femme et les enfants chez Frau Thomsen,
qui avait été leur institutrice à Auschwitz : elle s’était établie lors de
l’exode chez sa mère, à Saint-Michaelisdam, dans le Holstein. À ce moment-là, j’ignorais
encore l’endroit où s’installerait l’Inspection générale des camps de
concentration. J’emmenai avec moi mon fils aîné, qui ne voulait pas me quitter.
Nous espérions toujours qu’on nous emploierait, en cette dernière heure, sur le
dernier pouce de terrain encore inoccupé de l’Allemagne.
    Nous nous présentâmes pour faire notre dernier rapport à
Flensburg, où Himmler s’était retiré avec le gouvernement du Reich. Il n’était
plus question de combattre. Sauve-qui-peut était le mot d’ordre. Je n’oublierai
jamais cette dernière rencontre où je pris congé du Reichsführer. Il était tout
rayonnant de bonne humeur, et pourtant le monde, notre monde, avait disparu. S’il
nous avait dit : « Voilà, Messieurs, tout est fini ; vous savez
ce qui vous reste à faire », je l’aurais parfaitement compris ; cela
aurait été conforme à ce sacrifice de soi-même pour un idéal qu’il avait prêché
aux SS pendant de longues années. Mais l’ordre qu’il nous donna à l’heure
suprême fut de nous camoufler dans la Wehrmacht !
    Tel fut l’adieu d’un homme que j’avais toujours vu planer
au-dessus de moi, l’homme qui m’inspirait une confiance inébranlable, l’homme
dont les ordres et les déclarations me paraissaient paroles d’Évangile.
    J’échangeai un regard avec Maurer, nous ne nous dîmes rien
mais nos pensées étaient les mêmes. Nous étions tous deux de vieux nazis, de
vieux officiers SS, complètement dévoués à leur idéal. Si nous avions été
seuls, nous aurions commis un acte de désespoir quelconque ; mais nous
devions nous occuper encore de notre chef de groupe, des officiers, des hommes
de notre état-major, et des familles menacées.
    Glücks était déjà mourant : nous le conduisîmes sous un
faux nom à l’hôpital de la Marine. Gebhard [115] se chargea des femmes et des enfants qui devaient se réfugier au Danemark. Le
reste du groupe, muni de faux papiers, disparut dans les rangs de la Marine.
Moi-même, je me

Weitere Kostenlose Bücher