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Le crime de l'hôtel Saint-Florentin

Titel: Le crime de l'hôtel Saint-Florentin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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dans le lavoir et la petite cour adjacente ni, non plus, dans la descente des caves. Il décida de reprendre le chemin suivi avec Provence jusqu'à l'escalier de dégagement. Nicolas nettoya soigneusement la semelle de ses souliers avec l'eau d'un arrosoir de la petite serre. Dans l'escalier, il vérifia à genoux que les traces provenaient bien d'empreintes sanglantes déjà noircies. À l'entresol, il hésita un moment à poursuivre ses investigations vers le premier étage où se trouvaient les appartements du ministre. Que risquait-il ? Personne ne le lui reprocherait, et d'ailleurs la piste pouvait s'avérer vaine. Provence, qui avait découvert les corps, avait pu emprunter cet escalier et, constatant la souillure de ses souliers, en avait aussitôt changé. Pendant qu'il dévidait cette hypothèse, une petite voix intérieure lui soufflait qu'il avait raison de s'obstiner et d'écouter son intuition qui, depuis tant d'années, dirigeait, à parts égales avec la raison, sa démarche de policier.
    Les traces se poursuivaient, de moins en moins nettes. Pourtant, Nicolas savait combien la matière sanguine, grasse et attachante, pouvait longtemps marquer sa présence. Il déboucha sur une pièce vide meublée de deux vieilles banquettes de velours rouge, avec une réserve de bûches contre le lambris. Il comprit aussitôt que le lieu ne donnait pas passage vers les cabinets du duc de la Vrillière, mais constituait une sorte d'étape vers les hauts de l'hôtel traditionnellement consacrés, dans ce type de demeure, à des chambres de domestiques ou à des réserves. Il commença aussitôt à examiner l'état de l'escalier, en s'aidant cette fois d'un bout de chandelle qui traînait dans un coin. Il battit le briquet et la flamme éclaira les marches. Il eut beau chercher, se pencher, se coucher même, le nez presque contre le chêne, il n'y avait plus aucune trace. En revanche, il en trouva sur le sol de la pièce jusqu'à la porte-fenêtre de l'angle du bâtiment près de laquelle un souffle d'air froid le fit frissonner.
    Comment se faisait-il qu'elle fût ouverte ? Le crochet de la bascule de l'espagnolette n'était pas baissé. Il ouvrit les deux croisées et aussitôt une bise aigre lui souffleta le visage. L'ouverture donnait sur un balcon à balustre avec vue sur la rue de Saint-Florentin. Le cœur lui battit quand il aperçut distinctement des vestiges sanglants sur la pierre. Des pas menaient à l'angle du bâtiment dans la direction du portail de la cour d'honneur. Il les suivit et se pencha vers le vide. Une nouvelle surprise l'attendait ; il constata que les taches formaient une sorte de pointillé sur l'étroite corniche du mur soutenu par des colonnes. Il décida d'aller voir de plus près où cela le conduirait. Il ne souffrait heureusement pas du vertige comme son ami Semacgus. Ce dernier, au cours de ses circumnavigations sur les vaisseaux du roi, n'avait jamais pu grimper au grand mât de hune. Il est vrai, disait-il en riant, que ses fonctions de chirurgien exigeaient rarement de lui ce genre d'exercice. Nicolas craignait l'enfermement et les espaces réduits, mais, face au vide, il était aussi agile qu'un chat. Se collant le dos à la muraille, il avança en glissant jusqu'à la corniche du portail. Au moment où il posait les pieds sur le rebord, une bourrasque plus forte l'enveloppa et il faillit perdre l'équilibre ; un coup de tête en arrière le rétablit. Il prit pied sur la corniche tout en se retenant à la banquette supérieure. Là, les traces s'estompèrent. Il s'assit les jambes pendantes, puis se coucha sur le rebord pour en examiner le dessous. Il comprit aussitôt qu'en étreignant le haut de la colonne entre les jambes il suffisait de quelques toises pour atteindre les pointes de la grille de fer et, de là, se laisser glisser à terre. Il y avait un moment dangereux, mais le reste était un jeu d'enfant. Il renonça cependant à tenter l'expérience jusqu'au bout, le pavé boueux ne pouvant lui révéler aucun indice supplémentaire.
    Ainsi quelqu'un avait quitté les lieux du crime, rejoint le premier étage de l'hôtel, ouvert la porte-fenêtre et s'était échappé dans d'acrobatiques conditions. Cela supposait plusieurs choses : que l'inconnu possédât une connaissance exacte de la disposition des lieux, que son évasion intervînt en pleine nuit, au moment où le risque était moindre d'être surpris et, surtout qu'il s'agît d'un individu jeune, susceptible d'un

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