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Le crime de l'hôtel Saint-Florentin

Titel: Le crime de l'hôtel Saint-Florentin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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remarquer par leur habillement et leur parler ? Enfin, que venait faire, brochant sur l'ensemble, ce phénomène de disparition subite qui lui rappelait de fort mauvais souvenirs ? Resurgissait l'effroi naguère éprouvé devant l'inexplicable et l'agacement lancinant d'avoir échoué à trouver une élucidation rationnelle à ces manifestations.

    L'après-midi était déjà bien entamée. Nicolas errait dans la galerie des Glaces, hésitant entre une visite à la reine et sa démarche auprès de Mme de Maurepas. Perdu dans ses pensées, il heurta un personnage qui le retint contre lui avec une force amicale.
    — Tout beau, monsieur Le Floch, où allez-vous l'air si perplexe ? fit l'arrivant le visage jovial.
    Il reconnut M. de Ville d'Avray, le premier valet de chambre du roi. Il avait eu l'avantage de le rencontrer, dès sa prise de fonction à la succession de M. de La Borde 54 .
    — Accompagnez-moi, dit-il en prenant le bras de Nicolas, vous me confierez vos tracas. Je vais de ce pas porter un pli à M. de Maurepas.
    — Volontiers. Votre aimable proposition dissipe mes incertitudes. J'hésitais entre la reine et le ministre, vous décidez pour moi !
    — Cela tombe à merveille. Je passerai ensuite chez la reine. Sa Majesté lui a agencé une surprise et m'a demandé d'y veiller. Vous m'y suivrez, votre affaire achevée chez M. de Maurepas. Voyez, tout se déploie sans s'efforcer, il suffit de rencontrer la personne idoine.
    — Monsieur, je suis votre serviteur.
    — Je suis le vôtre. J'ai trouvé le roi très apaisé après votre passage. Depuis hier, je le trouvais fort morfondu. Affaire de chat…
    Nicolas hocha la tête.
    — Voilà bien ce qui m'entête. Je dois convaincre Mme de Maurepas qu'il s'agissait d'un pigeon manqué.
    — Un pigeon ? Je comprends votre angoisse. Il sera malaisé de faire avaler cela à la bonne dame. La connaissez-vous ?
    — Elle est depuis peu à Versailles, alors que j'y étais de moins en moins depuis quelque temps…
    — Allons, vous y voilà, et bien en cour ! Surtout, ne vous laissez pas effrayer par son extérieur repoussant. Au fond, elle a le cœur sur la main. Elle a la verbe haut et n'aime rien tant que rognonner sur les malheurs de sa maison – tout matériels, rassurez-vous –, les travers du temps et le malheur d'être à Versailles. Elle use pour cela de ce vieux langage du temps de la Régence dans lequel elle s'est perpétuée, affectant une veine populacière qui lui est devenue une seconde nature.
    — Je crains le pire, dit Nicolas en souriant.
    — Elle possède un esprit naturel qui lui permet de gouverner ceux qui en sont privés et, toute crépitante que vous la découvrirez, vous lui plairez. Elle devine sans effort la sincérité de ceux qui s'adressent à elle.
    Cela ne faisait pas l'affaire de Nicolas. Son idée de pigeon était-elle opportune ? Ils gagnèrent les appartements que le roi avait donnés au ministre, proches des siens. Ils furent introduits dans un salon où dominait la voix grayonnante d'une femme âgée et d'une rare laideur, assise dans une bergère. Plusieurs dames attentives l'entouraient. De son côté, accoudé à la cheminée, M. de Maurepas devisait avec Richelieu. Il semblait pourtant que le discours de la dame s'adressait bien à lui.
    — Vous fuyez devant moi parce que j'tracasse, à ce que vous dites, et que j'ronchonne toujours. Voyons, quèque vous voudriez d'autre ? J'avais pris l'habitude de le faire à Pontchartrain 55 quarante années durant par lettres de cachet, rechignant et grognant toujours et j'le ferais point à Versailles ? Tout ce temps à ménager pour payer vos dettes, celles de M. de Pontchartrain, qui fait le Salomon, et celles de M. de la Vrillière, que Dieu confonde ! Et puis celles de l'archevêque de Bourges, qui s'fait bâtir des châtiaux pour son imbécile de frère et jusqu'à M. le marquis de Phélypeaux qui s'trouvait avoir des dettes…
    — Toute la famille va y passer, murmura Ville d'Avray à l'oreille de Nicolas.
    — C'est que j'en ai payé des millions, tout en lésinant. J'avais tout de même cent treize domestiques.
    — Ma mie…, fit Maurepas.
    — Je dis ce que je dis. Cent treize domestiques à payer et cent dix personnes à nourrir chaque jour qu'Dieu fait. C'est indigne de m'jeter la pierre à moi. Riez donc, riez donc, vous n'avez ni cœur, ni foie, ni mou, ni rate, d'm'avoir traînée à Versailles où s'qu'on tue mon chat ! Mon

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