Le dernier vol du faucon
prit une profonde respiration. «Auguste et Puissant Seigneur, le général Petraja a-t-il appris autre chose quand il a rendu visite à Chao Fa Noi après avoir quitté Yotatep ? » Il s'attendait à ce que la révélation d'une telle visite surprenne le roi, mais ce fut peine perdue.
«Non, Vichaiyen. Petraja m'a avoué qu'il avait pris sur lui l'initiative de cette démarche à cause de cette terrible nouvelle. »
Phaulkon jura tout bas, maudissant la prévoyance de Petraja. L'intrigant général avait effacé toutes ses traces. Il allait falloir jouer serré.
«Auguste et Puissant Seigneur, l'indigne esclave que je suis n'a pas d'autre objectif dans la vie que le bien de son Seigneur et Maître. Aussi, dans le seul intérêt de Votre Majesté et de ce grand royaume au service duquel je me voue depuis tant d'années, il est de mon devoir de vous révéler certaines vérités déplaisantes.
- Nous doutons, Vichaiyen, qu'aucune de ces vérités surpasse en horreur celle que nous venons d'apprendre.
- Auguste et Puissant Seigneur, vous le savez, je vous sers fidèlement depuis que vous m'avez fait la grâce de me confier un poste.» Phaulkon déglutit. «Que je sois jeté aux tigres s'il est avéré que mes paroles sont mensongères ! Et cependant je ne crains pas d'affirmer que les assertions du général Petraja ne sont que pures inventions. »
Un tel silence suivit cette déclaration que Phaulkon entendait les battements de son cœur. Il aurait voulu pouvoir lever les yeux vers le visage du roi, mais une telle offense était punie de mort. La tête enfouie dans l'épais tapis persan, il attendit que le tonnerre frappe.
Quand le roi parla enfin, sa voix ressemblait plutôt au grondement d'un animal qu'à un son humain.
«Quelles paroles as-tu osé prononcer devant moi, Vichaiyen ? »
La voix tremblait d'indignation.
Une sueur glacée inonda Phaulkon. «Auguste et Puissant Seigneur, Petraja est le traître dont je m'étais engagé à vous révéler le nom. »
Nouveau silence.
« Vichaiyen, bien que tu occupes une place particulière dans mon cœur, sache que nous retiendrons ta proposition de te jeter aux tigres si tu ne peux apporter la preuve irréfutable de telles accusations.
- Auguste et Puissant Seigneur, il a été aussi pénible pour votre esclave de prononcer ces mots que pour Votre Majesté de les entendre.
- Nous n'avons fait que les entendre, Vichaiyen, rétorqua le roi d'un ton sévère. Cela ne signifie nullement que nous les croyons vrais.
- Auguste et Puissant Seigneur, le général Petraja a en effet rendu visite à votre plus jeune frère au palais, mais...
- Nous sommes au courant de cela, interrompit brusquement le roi. Notre loyal capitaine des gardes nous en a aussitôt informé par messager. Et Petraja nous a déjà communiqué ses raisons.
- Auguste et Puissant Seigneur, ce que Petraja ne vous a pas dit c'est qu'il a offert ses services à Chao Fa Noi et s'est engagé à le faire monter sur le trône après votre mort. »
Un hoquet sonore monta du lit. «Vichaiyen, il ne nous a pas échappé que Petraja et toi n'êtes pas toujours en bons termes, et c'est une cause de tristesse pour nous que nos deux courtisans les plus proches soient rivaux. Nous espérons que tu es conscient de la portée d'une telle accusation. Je la considère comme irrévocable.
- Auguste et Puissant Seigneur, je suis prêt à mourir pour défendre la vérité. »
Un profond soupir s'échappa du lit. « Bien, alors poursuis.
- Auguste Seigneur, la loyauté et la compétence du capitaine de votre garde au palais sont sans reproche. Puis-je humblement demander s'il a également mentionné la fuite récente d'un des jeunes favoris de Chao Fa Noi ?
- Tu es bien informé, Vichaiyen. En fait, nous le recherchons. Notre frère débauché en usait pour ses jeux pervers et nous aimerions l'interroger pour voir ce qu'il sait d'autre. Bien des choses peuvent être révélées dans les moments d'intimité.
- Auguste Seigneur, le garçon attend votre bon plaisir au-dehors. »
Le roi laissa échapper un nouveau hoquet de surprise. « Ce n 'est pas pour rien que nous t'avons nommé Barcalon, Vichaiyen. Fais-le venir.»
Phaulkon remercia le ciel d'avoir eu l'idée d'amener avec lui le jeune Krit pour lui servir de témoin. L'instant d'après, l'adolescent se prosternait au côté de Phaulkon. Malgré la faible lumière, on pouvait voir que le garçon tremblait comme une feuille. Il parvint cependant
Weitere Kostenlose Bücher