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Le discours d’un roi

Le discours d’un roi

Titel: Le discours d’un roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mark Logue , Peter Conradi
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aurait mieux valu que les garçons soient placés en école primaire, avec d’autres enfants de leur âge. Avis que partageait apparemment leur mère. Mais George ne voulut rien savoir, liant leur absence de progrès scolaire à leur bêtise. Toutefois, plus tard, il se montra plus conciliant avec deux de ses plus jeunes fils, qui furent, eux, envoyés à l’école.
    Étant tout le temps ensemble, et compte tenu de la distance qui existait entre eux et leurs parents, David et Bertie ne pouvaient que se rapprocher. Mais c’était une relation déséquilibrée. David était l’aîné, et il s’occupait de ses cadets autant qu’il les commandait. Comme il le dit lui-même dans son autobiographie : « Bertie ne me posait jamais de problème. » Avec l’arrivée de la puberté, Bertie, comme ses frères plus jeunes, semble avoir eu plus de mal à supporter cette hiérarchie, ce dont Hansell s’inquiéta. « Il est extraordinaire de constater à quel point la présence de l’un agit comme un “chiffon rouge” sur l’autre », signala-t-il 19 .
    C’était plus qu’une simple rivalité entre frères. David n’était pas seulement plus âgé, il était aussi beau, charmant et amusant. Très tôt, tous deux surent également qu’il serait un jour appelé à régner. Le sort avait été moins clément avec Bertie : il souffrait d’une digestion fragile, et devait porter des attelles pendant des heures dans la journée et durant son sommeil, car il avait les genoux cagneux comme son père. En outre, il était gaucher, mais, conformément à la pratique de l’époque, était obligé d’écrire et de tout faire de la main droite, ce qui peut souvent être la cause de troubles psychologiques.
    Le bégaiement venait s’ajouter à ces difficultés, dont il était dans une certaine mesure le résultat. Le phénomène s’était manifesté à l’âge de huit ans. Il a du reste été démontré que la fréquence du bégaiement était supérieure chez les gauchers. Pour Bertie, le son « k », comme dans king et queen , était un obstacle particulier, ce qui était excessivement gênant pour un membre de la famille royale.
    Une fois encore, l’attitude du père ne fit rien pour l’aider, puisque George V, confronté aux problèmes de son fils, se contenta de lui dire de « s’en débarrasser ». Les anniversaires de leurs grands-parents étaient un moment de torture, car ils étaient le théâtre d’un rituel incontournable. Les enfants devaient mémoriser un poème, le copier sur des feuilles de papier reliées par un ruban, réciter les vers en public, puis les offrir à la personne dont on fêtait l’anniversaire. C’était déjà difficile quand le poème était en anglais, mais plus tard, quand ils eurent commencé à apprendre d’autres langues, ils durent aussi s’acquitter de l’exercice en allemand et en français. Ces fêtes, auxquelles leurs grands-parents conviaient des invités, étaient un cauchemar pour Bertie, d’après un de ses biographes.
    « Le fait de se tenir devant la brillante société de ces adultes connus et inconnus, et de se débattre avec les complexités du Erlkönig I de Goethe, douloureusement conscient du contraste entre son débit haché et celui de son frère et de sa soeur “normaux”, fut une expérience humiliante, sans doute à l’origine de la répugnance qu’éveillait en lui toute prestation en public une fois devenu roi 20 . »
     
    Comme leur père avant eux, les deux garçons étaient destinés à la Royal Navy. Pour David, le séjour devait être bref, avant qu’il assume ses fonctions de prince de Galles. Bertie, lui, était censé y faire carrière. La première étape était le Royal Naval College d’Osborne House, l’ancienne demeure de la reine Victoria sur l’île de Wight. Le roi Édouard avait refusé de reprendre les lieux à la mort de sa mère et les avait cédés à la nation. L’édifice principal avait été reconverti en maison de convalescence pour officiers, et les étables en école préparatoire pour les cadets. Pour les deux garçons, qui étaient venus rendre visite à « Gangan », comme ils appelaient Victoria, dans ses dernières années, ce dut être une étrange expérience que d’y revenir.
    Bertie avait treize ans quand il y fut admis en janvier 1909 ; David était arrivé deux ans plus tôt. Pour l’un comme pour l’autre, le contraste avec leur existence à Sandringham était saisissant, tant sur le

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