Le discours d’un roi
déclara : “Je crois que c’est le meilleur que nous ayons fait, Logue. Je serai de retour à Londres en février, nous devons poursuivre notre travail.” La reine entra, embrassa affectueusement son mari et lui dit : “C’était magnifique, Bertie.” »
Les journaux applaudirent la performance royale. « Tant sur le fond que sur la forme, jamais le roi n’a prononcé de discours plus abouti et plus encourageant que celui d’hier, écrivit le Glasgow Herald. Il a dignement maintenu la tradition du discours de Noël. » Même Churchill, le plus grand de tous les orateurs, lui téléphona pour le féliciter.
Le lendemain de Noël, le roi écrivit à Logue pour lui dire combien il était heureux de la façon dont les choses s’étaient déroulées.
Mon cher Logue,
Je suis tellement heureux que mon discours se soit bien passé hier. Je me suis senti complètement différent et n’ai ressenti aucune crainte devant le microphone. Je suis convaincu que vos visites m’ont énormément servi et nous devons les maintenir en cette nouvelle année.
Merci infiniment de votre aide.
Recevez tous mes voeux pour cette année 1943.
Votre dévoué,
George
Roi et Empereur.
Logue répondit par une missive pleine d’enthousiasme. « Mon téléphone n’a pas cessé de sonner aujourd’hui. Quantité de gens ont appelé pour vous féliciter, ils voudraient pouvoir vous écrire pour vous dire à quel point ils ont aimé votre discours. » Il souligna également que le roi s’était approché du redoutable micro « comme si c’était un ami » et était resté parfaitement décontracté.
I - The Green Eye of the Little Yellow God (L’OEil vert du petit dieu jaune) est un poème de 1911 de J. Milton Hayes.
Chapitre quatorze
Le vent tourne
À partir de l’été 1943 et après deux ans de revers incessants, la guerre commença à tourner à l’avantage des Alliés. La campagne d’Afrique du Nord s’était achevée sur un triomphe. Le 10 juillet, la 8 e armée britannique sous les ordres du général Montgomery et la 7 e armée américaine commandée par le général Patton lancèrent un assaut coordonné en Sicile afin d’établir une tête de pont, prélude à l’invasion de l’Italie. Deux semaines plus tard, Mussolini était déposé, et, le 3 septembre, le gouvernement de Pietro Badoglio donnait sa reddition sans condition. Un mois après, l’Italie déclarait la guerre à l’Allemagne.
Il y avait aussi d’autres victoires à célébrer : en septembre 1943, une audacieuse attaque menée par des sous-marins de poche britanniques infligea des dommages considérables au redoutable Tirpitz , le plus grand cuirassé jamais construit en Europe, alors qu’il était au mouillage. Le lendemain de Noël, le croiseur Scharnhorst fut coulé au large de la Norvège lors de la bataille du Cap Nord. Les Alliés avaient gagné la bataille de l’Atlantique. Les nouvelles étaient également bonnes sur le front oriental : l’armée japonaise avait été stoppée, et les forces américaines et britanniques se préparaient à contre-attaquer.
La guerre n’était pas finie pour autant. Les Allemands opposaient une résistance féroce tant en Italie que sur le front russe, et les Japonais étaient loin d’être vaincus. Dans un élan d’optimisme, Churchill confia au roi que les Allemands pourraient être battus avant la fin de l’année 1944. Il craignait toutefois que la guerre dans le Pacifique ne se poursuive jusqu’en 1946.
Le roi profita de ce retournement de situation pour rendre visite à ses armées victorieuses et féliciter ses soldats. Il avait déjà effectué ce genre de tournée en décembre 1939 en allant soutenir le corps expéditionnaire en France, mais la situation s’était tellement dégradée par la suite qu’il n’avait pas été question de réitérer l’opération. En juin 1943 toutefois, voyageant sous le nom de code « général Lyon », le roi entreprit un voyage bien plus ambitieux de deux semaines en Afrique du Nord pour inspecter les forces américaines et britanniques en Algérie et en Libye. Sur le chemin du retour, il fit également une brève halte sur « l’île forteresse » de Malte, dont la position hautement stratégique en mer Méditerranée en avait fait une cible importante pour les Allemands. Partout où il alla, le roi reçut un accueil chaleureux.
Logue, de son côté, vivait les vicissitudes de la guerre par procuration. Laurie avait
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