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Le Fardeau de Lucifer

Le Fardeau de Lucifer

Titel: Le Fardeau de Lucifer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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   Pour ça, il faudra d’abord que tu sortes vivant d’ici, rétorqua-t-il en me frappant à nouveau.
    —    Pourquoi ? demandai-je lorsque j’en fus à nouveau capable.
    Raynal haussa les épaules et fit mine de considérer ma question. Il paraissait savourer à l’avance la réponse qu’il allait me faire, comme on fait tourner en bouche un bon vin. Il finit par relever fièrement le menton avec une moue arrogante.
    —    Parce que je tiens à la vie, tout simplement, répondit-il. Tôt ou tard, les cathares seront écrasés. Même Montségur finira par tomber. La Vérité en sera sans doute sortie bien avant, mais à quoi cela servira-t-il, sinon à prolonger l’inévitable ? Au mieux, les hommes du pape continueront à traquer les Neuf jusqu’au jour où ils parviendront à leurs fins.
    —    Mais, la Vérité. Tu en connais l’importance.
    —    La Vérité n’est rien d’autre que ce que la majorité considère comme vrai ! rétorqua-t-il avec colère. Pourquoi mourrais-je pour protéger quelque chose que plus personne ne sait sauf de rares initiés ? Remettons plutôt les maudits documents au pape pour qu’il les détruise enfin et finissons-en.
    —    Tu es. cathare. Comment peux-tu ?
    —    Et après ? Une foi ou une autre. Je me ferai chrétien, c’est tout. Ma vie vaut bien une messe.
    —    Depuis. quand ? marmonnai-je, la colère me faisant bouillir les sangs.
    —    Oh, assez longtemps. J’ai été contacté par un agent de sire Simon à Quéribus et j’ai accepté l’offre qu’il m’a transmise : la vie sauve, des terres et dix livres 1 d’or payables à la livraison des trois parchemins. Le guet-apens d’Evrart de Nanteroi avait été organisé grâce à mes informations. Il devait permettre de s’emparer de la cassette sans survivants pour me dénoncer, mais ton arrivée imprévue a tout gâché et j’ai dû prétendre être du côté des Neuf.
    —    Si j’avais su, je t’aurais éventré quand j’en avais l’occasion, pourriture.
    —    Bien entendu. Mais tu ne savais pas, justement. Une fois à Montségur, j’ai attendu le moment propice. Il a suffi d’emprunter un peu de belladone à cette pauvre naïve de Daufina pour endormir mes frères qui montaient la garde et le tour était joué. Personne n’a jamais su que j’étais descendu dans le temple. Si Montbard n’avait pas eu l’idée saugrenue de perdre une jambe, ce qui a forcé la tenue imprévue d’un conseil pour le remplacer, les parchemins auraient été entre les mains du légat bien avant qu’on ne s’aperçoive de leur disparition. Mais ces choses-là ne sont pas contrôlables. Et tu t’es entêté à chercher le coupable. Quand j’ai réalisé que tu t’approchais dangereusement de moi, j’ai compris qu’il valait mieux les remettre en place. Le pauvre Eiquem de Castres, que sire Simon avait su convaincre à force de torture et de menaces, devait prendre livraison des parchemins et les lui remettre, mais dans les circonstances j’ai jugé plus prudent de le faire taire. Ensuite, il m’a suffi de détourner les soupçons vers quelqu’un d’autre. J’ai caché les copies que j’avais faites des clés de la cassette sous le matelas de Daufina. Son petit côté sorcière a fait le reste. Je dois dire que tu es tombé dans le panneau comme le dernier des sots !
    Il avait raison. Comment avais-je pu être aussi bête ? À cause de ce traître, j’avais décapité une pauvre innocente qui, comme elle l’avait affirmé en pleurs, n’avait eu d’autre intention que d’alléger les souffrances de Ravier. Et, vaniteux comme je l’étais, j’en avais conçu une grande fierté. Je m’étais pavané comme un paon dans le temple des Neuf en donnant mon petit spectacle pour éblouir les autres.
    —    Heureusement, me confirma Raynal, il sera toujours temps de m’emparer des parchemins. Dans quelques jours, je serai de retour à Montségur et j’annoncerai avec une infinie tristesse la mort de Montbard, d’Ugolin, de Pernelle, ainsi que la tienne. Il me suffira ensuite de me faire élire Magister, quitte à m’arranger pour qu’Eudes ait un accident. Le reste sera un jeu d’enfant. Dans quelques semaines, la Vérité ne sera plus qu’un tas de cendres aux pieds d’Innocent.
    Montfort s’approcha de moi.
    —    Comme tu le vois, Gondemar, nous contrôlons une partie de la situation.
    Il m’empoigna brusquement par la mâchoire pour ramener

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