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Le Fardeau de Lucifer

Le Fardeau de Lucifer

Titel: Le Fardeau de Lucifer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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Vérité, je m’assurai de raccompagner mon amie jusqu’à son logis, espérant lui apporter un peu du réconfort dont elle avait sans doute besoin et qui m’avait cruellement manqué. Telle la Madeleine de l’Évangile, elle sanglotait. Mal à l’aise devant une telle effusion, je lui passai le bras autour des épaules et la serrai contre moi.
    —    Ne pleure pas, Pernelle, lui susurrai-je, ne sachant que faire d’autre. Ce que tu sais maintenant confirme la foi que tu as choisie. Rappelle-toi, à Minerve, quand tu me parlais de ta religion. Tu étais si convaincue, si passionnée. C’est à cause de toi que j’ai fini par lutter à vos côtés. Sois heureuse, ma belle amie.
    —    Mais je suis heureuse, gros balourd ! rétorqua-t-elle en reniflant bruyamment comme une petite fille. C’est pour ça que je pleure !
    Attendri, je ne dis rien, l’esprit féminin demeurant pour moi un épais mystère. Nous continuâmes à marcher, serrés l’un contre l’autre.
    —    Lorsque nous sommes arrivés à Montségur, tu étais si distant, dit-elle. Tu passais tout ton temps seul, au sommet de la muraille. Puis, un soir, nous nous sommes croisés et tu m’as dit que j’avais fait le bon choix. Tu avais l’air tourmenté. Sombre. Tu te souviens ?
    Je hochai la tête, me rappelant les tourments qui m’affligeaient alors.
    —    Tu venais d’être initié, n’est-ce pas ? On t’avait appris la Vérité.
    Je souris et essuyai ses larmes avec mon pouce, que je laissai glisser sur son visage avec une tendresse que je ne savais montrer qu’à elle.
    —    Je l’avais en travers de la gorge, répondis-je. Le fait d’apprendre que la religion dans laquelle j’avais été élevé était une escroquerie a été comme un coup de massue entre les yeux. Tu dois ressentir un peu la même chose, j’imagine.
    —    Pas autant que toi. Après tout, j’ai rejeté la foi chrétienne pour celle des cathares. Ce que je sais maintenant me confirme que j’ai eu raison. Malgré cela, c’est beaucoup à absorber. Je ne peux pas m’empêcher de penser au pauvre père Prelou. Il croyait fermement détenir la vérité. S’il avait su...
    —    Je songe parfois à lui, moi aussi, dis-je en essayant de ne pas revoir dans ma tête les images du prêtre qui brûlait, adossé à l’église en flammes dans laquelle se trouvait le pauvre Odon, fils de mon amie.
    —    Dieu l’a certainement mené à bonne fin. Le salut appartient à tous les hommes. Le Créateur est miséricordieux et juge chacun sur la base de ses actes, pas de sa religion.
    —    Et si je te disais que Dieu est cruel et rancunier ? ne pus-je m’empêcher de cracher.
    —    Je te répondrais qu’il juge sévèrement, mais justement, et que chacun d’entre nous est responsable de la vie qu’il mène. La somme de nos choix sera punie ou récompensée le moment venu.
    —    N’en sois pas si certaine, Pernelle. Les dés sont parfois pipés. Certains n’ont d’autre choix qu’entre le Mal et le Mal.
    Elle réfléchit un instant à ce que je venais de dire.
    —    Qui peut dire comment Dieu mène chacun de nous à bonne fin ? dit-elle, songeuse. Peut-être que, pour accomplir ses desseins, certains doivent faire le Mal ? Qui sommes-nous pour le remettre en question ?
    Je ne trouvai rien à répliquer à son raisonnement, qui me procura un certain soulagement. Je la reconduisis à son logis. Avant d’entrer, elle me surprit en posant sur ma joue un baiser.
    —    Merci, murmura-t-elle avec tendresse.
    —    De quoi ? demandai-je, interloqué.
    —    De m’avoir révélé la Vérité. De m’avoir fait confiance. Et surtout d’être là. Je ne te décevrai pas, Gondemar.
    Avant que je puisse répliquer quoi que ce soit, elle disparut à l’intérieur, me laissant là avec un sentiment d’indignité et de culpabilité plus aigu que jamais. Car c’est moi qui la décevrais.
    La nuit suivante, je pus enfin passer aux actes. J’ouvris l’assemblée en surveillant Pernelle du coin de l’œil. Elle me paraissait toute petite dans son siège. Je m’attendais à ce qu’elle soit intimidée, mais elle était rayonnante et semblait tout à fait à sa place dans le temple des Neuf. J’abordai sans détour la raison pour laquelle j’avais convoqué la rencontre.
    —    Mes frères et sœurs, commençai-je, quelque temps avant mon élection, les sires Eudes, Bertrand, Véran, Raynal et moi-même

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