Le grand voyage
pattes.
Elle se laissa glisser au sol et marcha devant la jument. A son
tour, Jondalar sauta de sa monture. La jeune femme avait à peine fait quelques
pas que Loup se précipita sur elle et la gratifia de ses habituelles effusions.
Il posa les pattes sur ses épaules, la lécha, et mordilla gentiment sa joue.
Lorsqu’il se fut calmé, un mouvement ou une odeur venant de la rive opposée lui
fit prendre conscience de la présence d’étrangers. Il s’aventura jusqu’au bord
du fleuve, et, tendant le cou vers le ciel, fit entendre une série d’aboiements
qui se terminèrent par un long hurlement.
— Qu’est-ce qui lui prend ? demanda Jondalar.
— Je ne sais pas. Il y a longtemps qu’il n’a vu personne,
et peut-être veut-il manifester sa joie ? Moi aussi j’aimerais bien les
saluer, soupira Ayla. Mais traverser la Grande Mère n’est pas si simple, et je
doute qu’ils viennent jusqu’à nous.
Depuis qu’ils avaient dépassé le coude du fleuve et que la
Grande Mère s’orientait de nouveau vers le couchant, les voyageurs avaient
emprunté une route qui tendait à dériver vers le sud. Mais au-delà de la
vallée, la chaîne de montagnes s’incurvait au nord, et ils avancèrent alors
résolument vers l’ouest. Ils avaient atteint l’extrême pointe sud de leur
Voyage, à la saison la plus chaude de l’année.
Au cœur de l’été, un soleil torride ravageait les plaines
dépourvues d’ombre. Malgré des glaciers hauts comme des montagnes sur le quart
de la planète, une chaleur oppressante régnait dans les pays méridionaux. Le
vent chaud et continu qui balayait la plaine jouait sur les nerfs et rendait la
chaleur encore plus insupportable. L’homme et la femme, tantôt à cheval, tantôt
à pied pour reposer leur monture, avaient adopté un rythme qui rendait le
voyage possible, à défaut d’être agréable.
Ils se réveillaient avec les premières lueurs de l’aube qui
embrasaient les cimes septentrionales, et après un rapide repas froid et une
infusion, ils se mettaient en route avant qu’il fît grand jour. Le soleil, en s’élevant,
frappait les steppes avec tant d’intensité que des brumes de chaleur montaient
du sol. La sueur luisait sur la peau tannée des voyageurs, et inondait la fourrure
des animaux. Loup tirait la langue en haletant. Il n’avait plus la force de
courir en exploration ou à la chasse, et restait avec Whinney et Rapide qui
avançaient d’un pas lent, la tête basse. Les cavaliers, accablés de chaleur,
affaissés sur leur monture, laissaient les chevaux régler l’allure, et
parlaient peu pendant les heures suffocantes de la mi-journée.
Lorsqu’ils n’y tenaient plus, ils cherchaient une petite plage,
de préférence près d’un marigot, ou d’un cours d’eau limpide dépourvu de courant.
Même Loup ne résistait pas à l’attrait de l’eau, bien qu’il se méfiât encore
des rapides. Dès que les humains descendaient de cheval et déchargeaient les
paniers, il se ruait dans l’eau en bondissant. Lorsqu’ils franchissaient un
affluent, ils plongeaient dans l’eau pour se rafraîchir avant de décharger les
paniers et le travois.
S’ils n’avaient rien trouvé en chemin et que leurs restes
étaient épuisés, Jondalar et Ayla, revigorés par la baignade, cherchaient
ensuite de quoi manger. Même dans les steppes brûlantes et poussiéreuses, la
nourriture abondait. Les cours d’eau, en particulier, regorgeaient de poissons.
Grâce à la technique de Jondalar, ou à celle d’Ayla, ou encore à
une combinaison des deux, ils en attrapaient toujours. Si la situation l’exigeait,
ils utilisaient le long filet d’Ayla en le traînant dans la rivière, chacun à
un bout, Jondalar avait équipé un filet d’un manche, obtenant une sorte d’épuisette
dont il n’était pas entièrement satisfait. Il pêchait aussi avec une ligne et
une gorge – pièce d’os aux deux bouts aiguisés, attachée au milieu
par un cordon solide. On enfilait ensuite des appâts : morceaux de viande,
de poisson, ou de vers. L’appât avalé, il suffisait de tirer d’un coup sec, et
la gorge se plantait dans le gosier du poisson en ressortant de part en part.
Après avoir laissé échapper un gros poisson, Jondalar fabriqua
une gaffe pour recueillir le fruit de sa pêche. Il choisit une branche fourchue
qu’il coupa à la jointure, utilisa la partie la plus longue comme manche, et la
partie fourchue aiguisée en forme de crochet lui servit à
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