Le grand voyage
gros rocher à moitié submergé au milieu de la rivière. On
y avait peint en rouge un double chevron horizontal, pointé vers l’aval.
Après avoir tout remis en place, ils descendirent la rivière
jusqu’à un second cairn pourvu d’une petite défense dirigée vers une agréable
clairière bordée de bouleaux, d’aulnes, et de quelques pins. On y apercevait un
troisième cairn, construit, comme ils allaient le découvrir, à côté d’une
petite source d’eau pétillante, fraîche et pure. D’autres rations de secours et
différents outils équipaient aussi ce monticule, qui comprenait encore une
bâche de cuir, aussi rigide que la couverture de fourrure, mais assez grande
pour servir de tente ou d’appentis. Derrière le cairn, près d’un cercle de
pierres disposé autour d’un trou noirci, on avait entreposé une pile de
branches mortes et de bois flotté.
— Voilà un endroit utile à connaître, déclara Jondalar. Je
suis content que nous n’ayons pas besoin des rations de secours, mais si j’habitais
ce pays, je serais soulagé de savoir qu’elles sont là.
— Oui, c’est une bonne idée, approuva Ayla, émerveillée par
la sagesse de ceux qui avaient pensé à aménager un tel relais.
Ils déchargèrent promptement les chevaux, enroulèrent les
lanières et les lourds cordages qui retenaient les paniers, et laissèrent les
animaux paître et se reposer. Ils regardèrent en souriant Rapide se rouler dans
l’herbe, et s’y gratter le dos comme si une irrépressible démangeaison exigeait
soudain un apaisement urgent.
— Moi aussi, la transpiration me démange, déclara Ayla en
dénouant les lanières de ses chaussures dont elle se débarrassa d’une ruade.
Elle défit sa ceinture, où elle suspendait l’étui de son couteau
et ses petits sacs, ôta son collier de perles d’ivoire auquel pendait une
bourse décorée, enleva sa tunique, ses jambières, et courut vers l’eau, suivie
par Loup qui bondissait à ses côtés.
— Tu viens ? cria-t-elle à Jondalar.
— Plus tard ! Je ramasse d’abord le bois. Comme ça, je
ne mettrai pas d’écorces ni de saletés dans la tente.
Ayla revint bientôt, enfila la tunique et les jambières qu’elle
portait le soir, et remit sa ceinture et son collier. Jondalar avait déballé
les paniers, et elle l’aida à installer le campement. Habitués à travailler
ensemble, ils avaient développé des automatismes exigeant peu d’initiatives.
Ils dressèrent la tente en étalant d’abord un tapis de sol ovale, puis ils
plantèrent les montants de bois qui soutenaient la bâche de cuir, faite de
plusieurs peaux cousues ensemble. La tente conique possédait au sommet une
ouverture qui servait de cheminée lorsqu’ils faisaient du feu, bien que ce fût
rarement le cas. Un rabat cousu à l’intérieur permettait de fermer si le temps
menaçait.
Des cordes fixaient le bas de la tente à des piquets fichés en
terre. En cas de tempête, le tapis de sol pouvait s’attacher à la bâche, et l’entrée
se fermait également de haut en bas. Ils transportaient une deuxième bâche pour
doubler la première, mais n’avaient pas encore eu l’occasion de l’utiliser.
Ils ouvrirent leurs fourrures de couchage et les étalèrent au
milieu du tapis, ce qui laissa juste assez d’espace sur les côtés pour leurs
paniers et le reste de leurs affaires, et une place à leurs pieds pour Loup, si
le temps l’exigeait. Au début du Voyage, chacun avait ses fourrures, mais ils
les avaient ensuite assemblées pour dormir ensemble. Lorsque la tente fut
montée, Jondalar alla ramasser du bois, afin de remplacer celui qu’Ayla
utiliserait pour préparer le repas.
Ayla savait démarrer un feu avec l’équipement qu’ils avaient
trouvé dans le cairn : on tournait très vite entre ses paumes le long
bâtonnet sur le socle en bois, puis on soufflait sur la cendre incandescente
ainsi obtenue et bientôt une flamme s’élevait. Mais son propre équipement était
unique. Pendant ses mois de vie solitaire dans sa vallée, elle avait fait une
découverte importante. Au lieu de la pierre dure qu’elle utilisait comme
marteau pour fabriquer des outils de silex, elle avait ramassé par mégarde un
morceau de pyrite de fer sur un tas de cailloux, près du torrent. Habituée à
faire du feu, elle avait rapidement compris le parti à tirer de cette pierre
quand, après avoir frappé le silex avec le pyrite de fer, une étincelle avait
jailli, lui brûlant la
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