Le Livre D'émeraude : Les Aventures De Cassandra Jamiston
venait d’extraire de son réticule. Je venais de le récupérer
dans la bibliothèque lorsque Gabriel m’a surprise.
Julian
hésita une seconde avant de s’en saisir et de le feuilleter avec une répugnance
manifeste. Gabriel et Cassandra se penchèrent vers lui pour y jeter également
un coup d’œil, mais les pages couvertes de caractères cyrilliques ne leur
apportèrent aucune indication quant à son contenu.
– Une
édition originale de La Dame de pique de Pouchkine, commenta
froidement Julian. Je me rappelle que vous l’aviez reçue de Russie.
– C’est exact, et je
l’avais rangée ici lors d’une de mes visites.
– Il
existe bien d’autres exemplaires de cet ouvrage, qu’a donc celui-ci de
spécial ? Encore des instructions de vos employeurs ?
– Je
vous ai déjà dit que je ne travaillais plus pour la Russie, repartit Aerith. Si
vous me donnez un couteau, je vous montrerai en quoi ce livre justifie ma
présence chez vous.
Julian
lui jeta un long regard scrutateur, puis il se leva, ouvrit la porte et adressa
quelques mots au domestique qui attendait dans le couloir. Celui-ci alla chercher
un couteau qu’il remit à son maître. Julian referma la porte et regagna son
siège, mais il ne donna pas le couteau à Aerith.
– Que
dois-je faire ? demanda-t-il, une main posée sur le livre.
– Ouvrez-le
à la dernière page, indiqua Aerith. Palpez la couverture, sentez-vous quelque
chose ?
Julian obtempéra, et sa
main rencontra un léger renflement.
– On dirait… qu’il y a un
document dissimulé dessous.
– C’est le cas.
De
la pointe du couteau, Julian entailla délicatement le carton de la couverture
et finit par extraire de la cavité ainsi creusée une feuille jaunie pliée en
deux.
– Qu’est-ce donc ?
– Un
parchemin découvert en Russie, dans la région de Tbilissi, il y a une dizaine
d’années de cela. On pense qu’il date du XVI e siècle.
Suivi
par Cassandra, Julian s’approcha de la fenêtre pour lire le document qu’il
déplia avec précaution. Presque aussitôt, il étouffa une exclamation et saisit
le poignet de son amie.
– Regardez…
Le
parchemin ne comportait que trois lignes de texte en caractères romains,
encadrées par deux dessins.
Le
motif supérieur représentait un disque dans lequel étaient dessinés quatre
triangles. Un serpent qui se mordait la queue en suivait le pourtour, et au
centre du cercle qu’il formait, la devise « Omnia in Unum » entourait un triangle à sommet inférieur dont la base était surmontée d’une
croix.
– Le
Soleil d’or de Cylenius… murmura Cassandra, stupéfaite.
Le
second dessin, au-dessous du texte, figurait un croissant de lune.
– Le
Soleil d’or, la Lune d’argent… La fameuse dualité alchimique…
– Le
texte n’a aucun sens, observa Cassandra dans un chuchotement. Il doit être
crypté.
– Où
est le Soleil d’or à présent ? s’enquit Julian sur le même ton.
– Ce
traître de Nicholas Ferguson, ou quel que soit son vrai nom, s’est enfui avec.
Mais il pourrait tout aussi bien être mort, pour ce que j’en sais.
Julian
alla poser le parchemin sur la table devant Aerith, qui n’avait cessé de les
observer avec attention.
– Qu’est-ce que cela
signifie ?
– Ce
parchemin codé doit nous mener à un objet qui nous intéresse particulièrement.
– Nous ?
– Désormais, je sers les
intérêts de l’Angleterre.
Julian demeura muet de
stupeur.
– Interrogez
votre père si vous ne me croyez pas, ajouta Aerith, le visage toujours serein.
Il confirmera mes dires.
– Mon père ? Pourquoi
le mêlez-vous à cette conversation ?
– C’est
lui qui m’a recrutée comme espionne pour le compte de l’Empire britannique.
Mais vous l’ignoriez, apparemment…
– Vous mentez, marmonna
Julian, hébété.
– Je peux vous apporter la
preuve de ma bonne foi.
De
sa manche, elle sortit un pli qu’elle tendit à son ancien époux. Celui-ci le
parcourut à plusieurs reprises, comme s’il ne pouvait croire ce qui y était
écrit.
– Un mandat signé de la
main du Premier ministre…
– …
qui me donne tout pouvoir dans l’exercice de ma mission, compléta Aerith.
Julian
ne quittait pas le document des yeux, manifestement incertain quant à la
conduite à tenir.
– Qu’attendez-vous de moi
exactement ?
Aerith fit glisser le
parchemin vers lui.
– La
cryptographie n’a pas de secrets pour vous
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