Le Livre D'émeraude : Les Aventures De Cassandra Jamiston

si je ne m’abuse…
    –  Pour vous non plus, ce
me semble, rétorqua-t-il.
    –  Ce
code est complexe. La Russie a essayé à l’époque d’en venir à bout, en vain. Le
parchemin m’avait été envoyé ici dans l’espoir que je trouve en Angleterre
quelqu’un susceptible de le déchiffrer.
    –  Mais que cherchez-vous
enfin ?
    –  Des
gravures, dit doucement Aerith, trois pour être exacte. Nous pensons que ce
parchemin indique leur emplacement. On les appelle les gravures d’Isis.
    –  Les gravures d’Isis…
répéta Julian.
    Il échangea un bref
regard avec Cassandra avant de demander :
    –  Ont-elles un lien avec…
l’alchimie ?
    Aerith se pencha en
avant, un léger sourire aux lèvres.
    –  Pourquoi cette
question ?
    –  Ne
jouez pas l’ignorante, riposta Julian sans aménité en pointant du doigt la
représentation du Soleil d’or sur le parchemin. Dieu seul sait comment, vous
êtes au courant que nous avons eu cet objet entre les mains voilà deux ans, et
qu’il nous a guidés vers…
    – …
la pierre philosophale, souffla Aerith. Mais je n’ai pas le droit de vous en
révéler davantage. Vous allez devoir me faire confiance.
    –  Vous
faire confiance ? se révolta Julian. Ne me demandez pas
l’impossible !
    Un
instant, ils s’affrontèrent du regard, puis Julian se détourna et quitta la
pièce, suivi de Cassandra et Gabriel.
    –  Qu’en
pensez-vous ? interrogea-t-il une fois qu’ils eurent rejoint le salon.
    Le trouble se lisait sur
son visage tandis qu’il pliait et dépliait nerveusement l’ordre de mission
d’Aerith. Cassandra répondit par une autre question :
    –  Croyez-vous réellement
qu’elle travaille pour l’Angleterre ?
    –  Ce
document me semble tout à fait officiel, déclara Julian en le lui tendant. Non
pas que cela me réjouisse. En vérité, ajouta-t-il après un silence, je suis
furieux. Que mon père, après m’avoir tant reproché mon mariage avec Aerith,
l’ait recrutée sans m’en parler me met hors de moi… C’est lamentable…
    –  Lamentable, mais pas
impossible.
    –  Non, pas impossible,
admit Julian à regret.
    –  Alors, comptez-vous
l’aider ?
    –  Je ne suis pas certain
d’avoir le choix.
    Gabriel,
qui avait écouté sans mot dire jusque-là, changea d’expression.
    –  Cela signifie qu’elle va
rester ici ?
    –  Eh
bien, juste le temps d’aviser, hésita Julian sans le regarder en face.
    Gabriel
se détourna, contrarié. À ce moment, un valet frappa à la porte et tendit une
enveloppe à Cassandra.
    –  Un
pli urgent pour vous, Mrs. Ward. Il vient d’arriver à l’instant.
    Elle décacheta vivement
le message.
    –  Il est de Megan,
annonça-t-elle d’une voix sourde.
    –  Une mauvaise
nouvelle ? s’inquiéta Julian.
    Cassandra
replia lentement la feuille. Elle n’était pas surprise en vérité. Juste…
effrayée d’avoir eu raison.
    –  Je dois rentrer. C’est
Angelia. Elle s’est enfuie de l’asile…

XI I
    « Suivez le Dragon Rouge et les
Ellylldan. » Depuis
sa mystérieuse entrevue avec l’inconnu de Hyde Park, Jeremy n’avait pas perdu
son temps. S’il ne disposait d’aucune information nouvelle sur l’Astrum, du moins commençait-il à y voir plus clair sur la manière de le
trouver.
    Le
journaliste avait compris assez rapidement la signification du Dragon
Rouge : il s’agissait du symbole du Pays de Galles, qui avait adopté cet
animal fabuleux comme emblème national dès l’âge d’or du roi Arthur et de
l’enchanteur Merlin. Les Ellylldan, en revanche, lui avaient donné plus de fil
à retordre ; Jeremy avait passé des heures à la bibliothèque du British
Museum à compulser moult ouvrages avant de découvrir enfin de quoi il
retournait. Les Ellylldan étaient des créatures imaginaires, esprits
élémentaires du feu issus des légendes du Glamorgan, qui recouvrait la région
sud-est du Pays de Galles. Cette découverte avait conforté Jeremy dans l’idée
que la solution de l’énigme résidait au royaume du Dragon Rouge, et qu’il lui
fallait se rendre là-bas s’il voulait en apprendre davantage sur l’Astrum et
les meurtres de la Dame Noire.
    Absorbé
dans ses réflexions, il ne se rendit pas compte que le vacarme qui régnait en
permanence dans la salle de rédaction surpeuplée du London
City News s’était tu subitement…
    –  Jeremy ?
    Le journaliste sursauta.
    –  Megan ? Que diable
faites-vous ici ?
    Sans
prêter attention aux