Le livre du cercle
chevaux. Robert avait tiré son épée et se tenait à côté de Simon. Un
cavalier mamelouk avait essayé de les frapper au passage, mais la plupart ne
leur prêtaient aucune attention en se dirigeant vers le centre de la ville.
Au-dessus du vacarme des sabots et des hurlements des habitants s’élevaient les
cris de Allahu Akbar.
Simon,
qui regardait avec stupeur la rue envahie de Mamelouks, laissa échapper un cri
en voyant Will tomber de cheval. Il poussa Robert d’un coup d’épaule et se mit
à courir. Apercevant deux cavaliers qui fondaient sur lui, Robert l’avertit du
danger en criant. Simon se jeta à genoux et leva les mains sur sa tête. Les-
deux épées fendirent l’air juste au-dessus de lui, le ratant de peu. Dès qu’ils
furent passés, Robert s’élança et le ramena à l’atelier. Simon se débattait et
criait le nom de Will.
— Tu
ne peux pas l’aider !
Robert
était sidéré par la frénésie du palefrenier. Il plaqua Simon contre
l’encadrement de la porte.
— Tu
vas te faire tuer comme un idiot !
— Il
ne peut pas mourir ! gémit Simon en essayant de repousser Robert.
Ses
yeux bruns étaient grands ouverts et des larmes coulaient le long de ses joues.
— C’est
de ma faute s’il est là ! C’est de ma faute !
Les
Mamelouks continuaient à déferler à toute allure dans la rue. Partout autour
d’eux, on entendait hurler, et ils pouvaient aussi sentir la fumée des toits
que leurs ennemis commençaient à embraser.
— De
quoi parles-tu, au nom de Dieu ? l’admonesta Robert.
— Elwen
ne serait pas partie si elle avait été au courant pour la drogue. J’ai menti
pour qu’elle le quitte. J’ai menti pour qu’ils ne se voient plus. Il aurait
perdu son manteau s’il s’était marié avec elle ! Mais je ne pensais pas qu’on
viendrait ici ! Je savais qu’il ne... je...
Il
frappait de ses poings contre le torse de Robert, mais il n’avait plus de
forces.
— Je
l’aime depuis plus longtemps qu’elle !
Robert
fixait Simon avec ahurissement quand soudain un cri retentit derrière eux.
Simon
leva la tête en reconnaissant la voix. travers ses larmes, il vit l’image floue
d’un cavalier vêtu de blanc s’approcher d’eux. Sa vision s’éclaircit et il
s’aperçut qu’il y avait deux hommes sur la monture. A l’avant, Garin tenait les
rênes d’une main couverte de sang, et Will se trouvait derrière lui. Robert
poussa des vivats pour exprimer sa surprise et sa joie. Ils étaient accompagnés
par l’un des deux chevaliers de la compagnie et par dix chevaliers Teutoniques,
avec leurs tuniques blanches à la croix noire, dont certains étaient blessés.
Il n’y avait maintenant plus aucun mamelouk dans la rue, en dehors de ceux qui
gisaient morts au milieu des cadavres des habitants terrassés en pleine fuite.
— Lambert
? demanda Robert en saisissant les rênes du cheval de Garin.
— Mort,
se contenta de répondre ce dernier en mettant pied à terre.
Les
Teutons descendirent de selle et aidèrent leurs camarades blessés à faire de
même. Quelques-uns des membres de la compagnie restés à l’atelier avec Robert
s’approchèrent pour les soutenir.
— Heureusement
qu’ils sont venus à notre rescousse, dit Garin en désignant du menton les
chevaliers germains.
— Où
sont les Mamelouks? s’inquiéta Robert en voyant la rue vide.
— La
cavalerie poursuit vers le cœur de la ville, expliqua l’un des Teutons. Nous
n’avons pas beaucoup de temps. Ils auront bientôt pris les portes et le reste
de l’armée entrera. Nous ne pouvons plus rien faire.
— Qu’est-ce
que tu racontes ? dit Will en glissant à terre. Que nous devons nous rendre ?
— Je
doute que les Sarrasins l’accepteraient, même si nous le voulions. Nous étions
sur les collines un peu plus loin tout à l’heure. Ce n’est pas une bataille,
c’est un massacre. Ils étripent tous ceux qu’ils trouvent.
Le
Teuton essuya le sang qui coulait d’une entaille au front et lui tombait dans
les yeux. Will remarqua que sa main tremblait.
— Nous
devrions rejoindre la commanderie, suggéra Robert. Ou la citadelle.
— Il
est trop tard, déclara le Teuton.
Tout
en disant cela, il désigna les champs par lesquels les Mamelouks avaient
pénétré et qui étaient le seul chemin encore possible vers la citadelle. Des
centaines d’hommes de l’infanterie mamelouke passaient maintenant par la brèche
ouverte dans les remparts. La colline était infranchissable.
—
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