Le Maréchal Jourdan
pour collaborer avec l’armée espagnole afin de conquérir le
Portugal, mais en réalité pour occuper un certain nombre de potits stratégiques. Après quoi les
événements évoluèrent de manière fâcheuse. Le premier ministre Godoy, favorable à une politique
de coopération avec la France, fut renversé par une émeute qui secoua la capitale. Puis la
famille royale, prisonnière en quelque sorte des Français, fut expédiée à Bayonne où le roi
terrorisé abdiqua, remettant le royaume entre les mains de « son bon ami
Napoléon ». Aussitôt, toute l’Espagne se souleva en faveur de son
souverain, incarné à présent par Ferdinand VII, fils aîné du roi Charles IV. En sa faveur,
s’était spontanément créée une junte révolutionnaire qui s’était trouvé
vocation à gouverner.
Il n’entre pas dans le cadre de cette étude d’examiner en détail ce
fameux « guet-apens » de Bayonne auquel ni Joseph ni Jourdan ne
participèrent.
Ce fut dans ces conditions difficiles que Joseph monta sur le trône d’Espagne. Il
aurait désiré demeurer encore quelque temps à Naples, mais un ordre impératif de Napoléon le
mit en voiture, le 21 mai 1808. De ce fait, Jourdan, qui avait un certain
nombre d’affaires personnelles à régler, entre autres le retour de sa famille,
allait demeurer en arrière alors que le nouveau roi d’Espagne eût bien aimé
l’avoir à ses côtés.
Ayant eu l’habileté de composer sa maison avec les gentilshommes qui avaient servi
son prédécesseur, Joseph entra en Espagne au début de juillet, accompagné par
l’armée de Bessières qui se heurta, le 14, à Medina de Rio Soco, à une de la junte
qui prétendait lui barrer la route de Madrid. Le maréchal l’écrasa et la dispersa.
Lasalle, grand cavalier de l’Empire, s’y distingua en poursuivant les
fuyards à la cravache. Il eût fait mieux si Bessières n’avait stoppé son élan. À ce
moment, les forces militaires de la junte s’élevaient à un peu plus de cent trente
mille hommes de valeur fort inégale.
Joseph put donc pénétrer dans sa nouvelle capitale, le 23 juillet.
L’accueil de la population fut glacial. Encore, le malheureux roi ignorait-il que,
la veille, le général Dupont s’était rendu aux Espagnols, à Bailén, avec tout son
corps d’armée. Privé de ses conseillers habituels et de Jourdan en particulier,
Joseph, lorsqu’il apprit ce désastre, s’affola et prit peur. Une semaine
à peine après son arrivée, il décampa et courut se réfugier à Burgos sous la protection des
troupes du maréchal Mortier. Et, comme il pensait n’y être potit encore assez en
sécurité, il quitta bientôt cette ville et alla chercher refuge avec sa cour derrière la
barrière de l’Èbre, reculant jusqu’à Vitoria (22 août). Ce fut
dans cette dernière localité que le rejoignit Jourdan. Joseph l’attendait avec
impatience. Lorsqu’il lui demanda s’il avait agi sagement en se retirant
sur sa position actuelle, le maréchal répondit par l’affirmative, estimant
qu’il avait eu raison d’une part de regrouper des unités dispersées dans
un pays en pleine révolte et d’autre part d’assurer avant tout ses
communications avec la France. Contrairement à une grande partie de l’entourage du
roi, Jourdan n’était pas inquiet quant à la tournure que pourraient prendre les
événements car, dès ce moment, il savait que Napoléon, qui faisait faire mouvement à près de
quatre-vingt-dix mille hommes, jusque-là stationnés en Allemagne, se préparait à prendre leur
tête et à pénétrer lui-même en Espagne.
Déjà, le 27 juillet, Savary, que Napoléon avait détaché auprès de Joseph, avait
écrit à son maître que la venue de Jourdan ne pourrait être que bénéfique pour son frère.
*
Le maréchal Jourdan a laissé la partie la plus titéressante de ses mémoires, qu’il
a tititulés simplement Mémoires militaires , sur les deux séjours
qu’il fit en Espagne, entre 1808 et 1813. Véritable étude
historique, cet ouvrage rapporte non seulement les faits et gestes de l’auteur dans
ses fonctions, mais se penche également sur l’ensemble du problème posé par
l’affaire espagnole et ses répercussions sur place et en Europe. Jourdan a fait
remonter ses premières considérations aux événements qui ont précédé la mainmise sur le pays
par Napoléon. Son ouvrage
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