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Le marquis des Éperviers

Le marquis des Éperviers

Titel: Le marquis des Éperviers Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Paul Desprat
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quitter…
    – Que savez-vous de l’affaire qu’on vient de juger ? demanda abruptement Victor.
    – Que notre ami a agi sous l’aiguillon d’une passion qui le mettait à la torture, répondit sans hésiter Guyot, mais je puis témoigner tout aussi sûrement qu’il l’a fait sur l’ordre de celui qui le premier ait aujourd’hui osé opiner pour le faire condamner.
    – Vendôme ! en avez-vous la preuve ?
    – L’abbé de Grandville m’a confié il y a un mois une liasse de cinq documents contenus dans une enveloppe ouverte. Ce sont des lettres de change, signées en sa faveur par le duc à Anet. Elles devaient permettre l’achat des reliques mais elles n’ont pas pu être présentées au banquier à cause de la mort de la belle pénitente. Brandelis m’avait interdit d’en faire usage car il ne voulait pas que le nom de cette femme aimée soit mêlé au scandale qui ne manquera pas de lever de la connaissance de ces pièces.
    – Il n’est plus temps de cela ! trancha Victor, possédez-vous toujours cette enveloppe ?
    – Oui, répondit le novice, je l’ai sur moi… J’avais l’intention, malgré la défense qu’il m’en avait faite, de montrer ces lettres à la cour… On ne m’en a pas laissé le temps.
    – Me ferez-vous confiance ? hasarda Victor.
    – Je vous dois déjà trop pour ne pas exécuter tout ce que vous me demanderez.
    – Remettez-moi deux de ces documents et rentrez chez vous en emportant le reste !… Retrouvons-nous ici, demain, à la même heure.
    Le jeune jésuite tendit deux des feuilles à Victor qui s’en empara avant de se ruer vers les portes du palais.
    Il fut au bas du perron juste comme Vendôme se disposait à monter dans son carrosse qu’on avait avancé dans la cour du Mai 193 .
    – Deux mots, monsieur le duc ! lança-t-il hors de souffle.
    – Que me voulez-vous ? s’offusqua le cousin du roi déjà juché sur le premier degré de son marchepied.
    Un gaillard, haut de plus de six pieds, qui portait une barbe noire, se détacha aussitôt d’un peloton de soldats et, sans en avoir reçu l’ordre, vint s’interposer entre le duc et celui qui l’avait hélé. Étirant un bras pour atteindre le cadre qui séparait deux des vitres latérales, il fit en même temps sauter son épée hors de son fourreau à petits coups répétés.
    – Je veux vous montrer cet écrit ! reprit le fils du comte de Gironde d’une voix forte en agitant l’un des deux reçus que venait de lui remettre Guyot.
    – Je ne vois rien ! je suis myope, fit le bâtard qui avait pourtant bien reconnu les mots « Bon à payer » tracés de sa main au-dessus de son paraphe, montez ! nous serons mieux dedans pour parler…
    Victor se hissa d’un bond. Il passa devant le duc, resté planté au coin de sa marche pour faire un signe au spadassin de le suivre. Ce dernier, lorsqu’il se fut engouffré à son tour, bloqua derrière lui le loquet de la portière.
    – Qu’avez-vous à me montrer ? demanda Vendôme lorsque l’équipage se fut ébranlé.
    Et comme son hôte continuait d’agiter son billet :
    – Malepeste ! tonna-t-il, je ne connais que cette écriture-là !… Où diable vous êtes-vous procuré ceci ?
    – Un de mes amis m’a remis cette pièce… Un ami qui demande justice.
    Le duc fronça ses sourcils noirs :
    – Et que veut ce drôle qui soit en mon pouvoir ?
    – Que vous cessiez de le tourmenter. Que vous fassiez annuler l’arrêt qu’on vient de rendre puisqu’il ne repose que sur des preuves incertaines…
    – Ventrebleu ! vous êtes téméraire.
    – Je rapporte ce que m’ont affirmé des personnes dignes de foi, répliqua Victor en bandant toute son énergie pour soutenir le regard de l’ancien protecteur de Brandelis.
    – Un jeune homme de votre condition s’abaisse lorsqu’il colporte sans réflexion de telles allégations.
    Victor considéra longuement et comme en s’en moquant le rictus que la fureur venait d’imprimer au coin des lèvres du chef de la branche bâtarde.
    – Monsieur le duc, finit-il par lancer sur un ton de bravade et en détachant chaque syllabe, je connais tout de l’affaire des reliques… C’est l’abbé de Grandville qui m’a confié lui-même ces preuves de ses dires…
    – Tu en sais bien long, jeune présomptueux ! éclata le cousin du roi en interrompant son accusateur d’un éclat de rire sardonique, et te crois-tu aussi très fin d’être venu te fourrer dans la gueule du loup ?
    – Il existe des preuves autre

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