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Le petit homme de l'Opéra

Le petit homme de l'Opéra

Titel: Le petit homme de l'Opéra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Claude Izner
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bientôt ils nous informeront du nombre de chiens écrasés... Ah voilà, ça, c'est intéressant.
    DERNIÈRE MINUTE
    « Un corps sans vie a été découvert cette nuit par un égoutier de la ville de Paris. M. Michel Pottier remontait le boulevard Raspail en direction de la rue Boissonade quand il distingua une forme humaine allongée sous les murs du cimetière Montparnasse. On ignore son identité et l'origine exacte du décès. »
    — Saperlotte ! Un mort à deux pas des Catacombes ! Je découpe... Patati, patata... Mince, la moukère prend racine !
    — Si, si, monsieur Legris, je vous assure. Votre épouse possède un immense talent, son portrait de Raphaëlle de Gouveline est une merveille, c'est simple, il...
    Joseph, impatient d'avertir son beau-frère, joua le tout pour le tout. Un raid éclair jusqu'au comptoir où étaient rangés les ciseaux et la colle faillit virer au désastre. Il heurta de plein fouet le pédalier de la bicyclette, poussa un juron et sautilla en se tenant le mollet sous l’œil narquois de Kenji.
    — C'est malin, je vais avoir un bleu ! beugla-t-il. Ça vous amuse ? Forcément, avec ce régiment de chaises, c'était prévu ! Je descends, faut que je m'applique des compresses avant que ça enfle.
    Victor se détourna, mais ses yeux eurent le temps de lui adresser un bref message : Je vous rejoins.
    Joseph traversa la réserve encombrée d'une montagne de livres et se boucla dans l'ancien laboratoire photographique de Victor devenu son domaine Il attendit que la douleur se calme et décida alors d'ajouter les trois articles à la collection d'événements insolites dont il bourrait ses calepins. Mme Ballu allait récupérer un journal festonné, tant pis. Il souligna en rouge Michel Pottier, égoutier, et sous le coup de l'inspiration, brocha une intrigue où se télescopaient les rayons X, les sous-sols de la capitale, les ossements des défunts et un savant timbré métamorphosé en palmipède par un magicien assoiffé de pouvoir.
    — Je l'intitulerai Le Peuple des égouts ou Le Canard démoniaque .
    — J'espère que je n'interromps rien d'essentiel à vos cogitations.
    Victor, les traits tirés, s'affala sur un tabouret.
    — La Gouveline m'a tué l'oreille gauche. Votre mollet ?
    — Si la gangrène se déclare, on me l'amputera, répondit Joseph d'un ton rogue.
    — Hé, vous deux, en bas ! Je m'absente, cria Kenji, veuillez surveiller la boutique.
    Victor et Joseph s'exécutèrent à regret.
    — Il est toujours par monts et par vaux, maronna Joseph. Au fait, merci de m'avoir fait faux bond hier soir ! Je veux bien vous servir d'alibi quand vous jouez les redresseurs de torts, mais le moindre des égards serait de m'instruire du résultat de votre entretien avec l'archiduchesse Maximova ! Elle a des ennuis ?
    — Je viens d'arriver, Joseph, laissez-moi le temps de souffler ! Vous vous souvenez de l'homme qui l'accompagnait le jour où le duc de Frioul vous a vendu les Hetzel ?
    — Le clarinettiste ?
    — Il s'est noyé.
    — C'est pour vous annoncer cette nouvelle ou pour vous suborner que cette rouée vous a invité à ce concert chez les squelettes ?
    — Ce clarinettiste était l'amant d'une de ses amies, Olga Vologda, étoile de l'Opéra. Eudoxie soupçonne qu'on a tenté d'empoisonner cette danseuse. Je dois avouer que j'ai pris cette histoire par-dessus la jambe, elle est abracadabrante.
    — La fiction dépasse parfois la réalité. Empoisonnée comment ?
    — Olga Vologda aurait goûté le présent d'un admirateur, un morceau de cochon en pain d'épice. Un mot l'y incitait : « Croque-moi. »
    — Un cochon en pain d'épice ! Nom d'une pipe en bois ! Hier soir, après votre désertion, j'ai discuté avec un barbu qui ressemblait davantage à un gladiateur qu'à un virtuose de l'archet. Un crapoussin 19 lui a remis un paquet. Devinette : que renfermait-il ?
    — Ma langue au chat.
    — Un cochon en pain d'épice ! Un prénom en guimauve était tracé dessus. Je l'ai retenu parce que mon papa me donnait le biberon en me débitant Les Regrets , de Joachim Du Bellay.
    France, mère des arts, des armes et des lois,
    Tu m'as nourri longtemps du lait de ta mamelle...
    — Joseph, vous délirez ?
    — Joachim ! Le violoniste s'appelle Joachim. Lui aussi a eu droit à une dédicace, je l'ai lue : « Cher maître, si vous me croquez... » J'ai oublié la suite. Osez soutenir qu'il n'y a pas corrélation entre lui et votre danseuse... Oh, nous avons de la visite !
    Une

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