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Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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dormi.
    Elle le regardait franchement, et ce n’était pas une espérance vague, incompréhensible qu’il découvrait dans ses yeux. Elle était déterminée à briser l’armure de mystère dont il demeurait couvert, à sonder son cœur définitivement.
    – Moi, j’ai mal dormi.
    – Le meilleur des fourrages ne peut-être un bon lit.
    Avec elle, à présent, il l’eût trouvé parfait.
    – Point besoin de parler, dit-il prudemment.
    Parviendrait-il à comprendre les variations de ses sentiments ? Qu’un amour persistant le dominât encore ne l’empêchait pas de songer que Luciane l’aimait. La flamme qu’il portait au secret de son cœur avait rapetissé. Ce constat lui donnait mauvaise conscience.
    – Comment avez-vous trouvé père, ce matin ?
    Elle tournait vers lui un visage d’enfant. Il y trouva juste ce qu’il fallait d’angoisse et d’espérance.
    – Votre père est un preux. Vous l’allez revigorer de votre présence et de votre amour… Revenons à Gratot. Ils doivent se demander…
    – Ils ne se demandent rien. Ils savent que nous avons voulu être seuls ensemble… Venez.
    Il y avait, sous un chêne, un abreuvoir couché sur le flanc. Elle l’invita à s’y asseoir. L’ombre s’accrut au-dessus d’eux, bruissante, caressante. Quelque part dans la toison épaisse, un geai lança son cri puis disparut, et l’on eût dit qu’il n’avait pas voulu être indiscret. La hanche de Tristan toucha celle de la pucelle.
    – Pourquoi songez-vous à partir vélocement ?
    – Il vaut mieux que je m’éloigne… Vous savez comment est le roi : imprévisible… Il peut avancer son départ.
    « Ce sont des jengles (533) tout cela. Le roi ne modifiera point son calendrier. »
    Il sourit, mais il était mécontent que sa voix eût pris les inflexions moins sonores et que cette présence de femme, toute proche, engourdît sa volonté.
    – Le devoir que je dois au roi ne compte guère dans ma décision.
    – Je m’en doutais.
    – Je n’avais point mesuré, pour tout vous dire, le pou voir de deux sentiments pareils, mais in égaux… J’ai besoin de vous quitter pour savoir…
    –… si vous êtes amouré de moi ?
    Elle s’était exprimée d’une voix affaiblie, la tête soudain penchée sur cette épaule d’homme afin qu’il ne vît point son visage. Et tandis qu’il songeait à cette âme pure, il percevait les cris d’une âme naufragée.
    Il se reprit au terme d’un gros effort :
    – Je vous en ai parlé. Elle m’attend peut-être. Ce cœur blessé – de cela je suis sûr –, je veux savoir s’il bat toujours pour moi.
    En se livrant ainsi, même incomplètement, il dévaluait son premier amour. Une lézarde se creusait entre Oriabel et Luciane. Cette dernière prenait sur l’absente un avantage dont elle ignorait l’importance. Cependant, eût-il retrouvé Oriabel que sans doute il se fût senti prêt à reprendre auprès d’elle l’intimité d’autrefois. Le charme qui avait opéré, naguère, dans l’auberge d’Eustache, se renouvellerait, il en était certain, cette certitude lui était pénible en présence de Luciane, nais il lui devait une sincérité digne de lui, digne d’elle.
    – Vous connaissez la vérité. Je tiens à ce qu’à aucun moment vous ne puissiez m’accuser de tromperie, d’ingratitude. Je vous dois d’être en vie.
    – Je vous dois davantage. Sans vous, je n’aurais retrouvé ni mon oncle ni mon père… et cette Normandie dont j’avais perdu souvenance… Je languirai de ne plus vous voir.
    – Je reviendrai.
    – Mais, si vous revenez, c’est que…
    Ils se levèrent en même temps. Il la prit dans ses bras et la baisa aux lèvres, ardemment, hardiment, si bien qu’elle en gémit.
    Elle frémissait, se collait à lui, appuyait sur ses reins de ses paumes mouvantes. Il se dégagea et avança une main puis l’autre jusqu’au renflement des seins dont il connut enfin la tiédeur ferme, excitante. Il ne souhaitait rien de plus. Il se sentait fortifié, apaisé. Il buvait à cette bouche tendre avec les délices d’un assoiffé.
    – Je…
    – Non, Luciane.
    Son esprit et son corps se soustrayaient à la tyrannie des devoirs et du monde extérieur. Cette fête sensuelle lui suffisait.
    Il sépara son visage de celui de la pucelle, aussi tourneboulé qu’aux jours de sa première passion, méchamment achevée par la trahison d’Aliénor qui désormais partageait, à Castelreng, la vie et le lit de son

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