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Le Prince Que Voilà

Le Prince Que Voilà

Titel: Le Prince Que Voilà Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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sa
picorée de la Saint-Barthélemy. Mais là, il semblait que nous ne dussions
jamais finir et la place nous manquant à la fin sur mon secrétaire, nous fîmes
doubles et triples les tas, et encore que compter pécunes, quand elles sont à
vous, n’excède jamais votre patience, j’étais à la fin quasi lassé de ce
délicieux labour, et l’œil tout à plein ébloui par le brillement de l’or.
    Mon éblouissement toutefois n’avait
pas encore atteint son sommet. Au fond du coffret, je trouvai un petit sac de
cuir noir, fermé par des lanières dorées et, l’ayant ouvert, j’y découvris
trois diamants de la plus belle eau, l’un dépassant en taille celui que m’avait
offert le Duc d’Épernon pour prix de mes bonnes curations, et les deux autres,
à ce qu’il me sembla, aussi gros que celui que je viens de dire, mon joaillier
du pont aux Changes m’offrant mille cinq cents écus du premier, et mille de
chacun des seconds. Et encore que le trésor de pécunes donné par le Roi se
montât à dix mille écus, somme que d’un seul coup je n’avais jamais possédée et
qui me fit battre les tempes en ma liesse, le présent en pierres précieuses,
quoique moins conséquent que le premier, ne dépassant pas une valeur de trois
mille cinq cents écus, m’émut au dernier degré de l’émeuvement, pour ce que le
Roi, à qui j’avais dit que j’avais fait sertir en bague la cadeau d’Épernon
(Angelina étant raffolée des bijoux) s’en était ramentu avec sa bénignité et
délicatesse accoutumées, et me voulant étoffer, me faisait, de surcroît, le
plaisir d’embellir les belles mains ou le beau cou de ma femme de ces
scintillantes parures.
     
     
    Le soir où je fis ce présent à mon
Angelina, lequel, par son origine, comme pour sa valeur, se trouvait doublement
royal, je pris Miroul à part en mon petit cabinet et je lui fis un complet
récit de celles de mes aventures que je lui avais tues, ne lui celant que deux
choses : mon rollet de Paris à Boulogne avec mon Alizon, lequel j’avais
joué à cœur content, mais à conscience remordie, et mon rollet avec la
Montpensier, celui-ci à corps malcontent, mais à conscience quiète.
    Mon Miroul ouït mon récit, ses beaux
yeux vairons fichés dans les miens, avec l’expression inquiète et tracasseuse
d’une mère (combien que nous ayons le même âge) et quand j’eus fini, me
remerciant de prime de la fiance que je lui avais montrée, il me dit :
    — Ha, Moussu, que de périls
vous avez courus et ce jour d’hui courez, car les Guise ne peuvent qu’ils ne
vous soupçonnent encore, et n’attentent derechef de vous dépêcher, pour la
raison qu’ils tâchent par la terreur d’écarter du Roi ses plus fidèles
serviteurs dont ils ne peuvent douter que vous soyez. Vous ne vivez donc que
par répit et sursis, et devez vous garder jour et nuit. Le jour, contre
arquebusade, querelles d’allemand, ou coup de dague dans une presse, la nuit
contre assaut à votre logis donné, comme il s’en fait quotidiennement en Paris,
sans jamais qu’intervienne le guet assis (et assis Dieu sait s’il l’est !)
ni le guet royal, toujours au Diable de Vauvert chevauchant. Moussu, il vous
faut fortifier ce logis et en faire un Mespech, afin d’en repousser à
l’avantage ces surprises nocturnes.
    — Mais, dis-je, Mérigot me
garde, étant posté à la fenêtre de l’Aiguillerie.
    — Mérigot, dit Miroul en
secouant la tête, baillera l’alarme et délayera l’assaut un petit. Un homme
seul avec une arquebuse ne peut faire davantage. Moussu, il vous faut hausser
le mur de votre cour pour le mettre hors échelle, car de présent, la plus
méchante chanlatte serait assez pour le franchir. Faites le haut de ce mur en
encorbellement pour y pratiquer des mâchicoulis par où vous pourrez arquebuser
les guillaumes qui vous voudraient placer pétard au pied de votre porte
cochère. Remparez tous les vantaux des fenêtres qui donnent sur la rue. Doublez
votre porte piétonne d’une herse et prévoyez vos retraites pour Mademoiselle
Angelina, vous-même, vos enfants et tout le domestique.
    — Mes retraites ! dis-je,
béant.
    — Ha, Moussu ! Nous
l’avons bien vu, quand nous étions à la fuite lors de ces terribles jours de la
Saint-Barthélemy ! La maison la plus forte n’est que souricière quand on
n’en peut saillir par passage ou porte dérobés.
    — Miroul ! dis-je en
riant, ton imaginative a trop grande seigneurie sur toi ! Quelle

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