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Le Prince Que Voilà

Le Prince Que Voilà

Titel: Le Prince Que Voilà Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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c’est que le Roi, après cette rétractation, va
passer pour mol, timide et couard et qu’il n’y a pas d’avanie que les États, la
Ligue et Guise ne lui feront.
     
     
    En quoi il ne se trompait pas, sauf
que le mot « avanie » s’avéra faible au regard des rebuffades que le
Roi essuya dans les deux mois qui suivirent, la haine et le déprisement que
nourrissaient pour lui les États ligueux ne connaissant plus de borne, comme
bien je le vis chaque jour, placé où j’étais au milieu des quarante-cinq en ces interminables séances.
    Au Roi qui ne voulait pas qu’on
déclarât Navarre déchu de ses droits à la couronne sans l’entendre, et qui
disait : « Quand il ne s’agirait que d’une succession de cent écus,
encore serait-il juste de s’expliquer avec lui, et de savoir s’il ne veut pas se
convertir », les États répondaient en hurlant : « Jamais Roi, ayant été hérétique, ne nous gouvernera ! » Lecteur, vous avez
bien ouï : même converti, on ne voulait pas de Navarre ! Le zèle de
ces fanatiques les portait plus loin que le pape !
    Les États tenaient les cordons de la
bourse, et bien loin de les desserrer, je vis bien qu’ils tâchaient d’en
étrangler le Roi. Ils voulaient qu’il fît contre ses sujets huguenots une
guerre impitoyable et lui en refusaient les moyens : Ni subsides, ni
contributions, ni subventions extraordinaires, et toutes tailles établies
depuis 1576, bien au rebours, supprimées. Le Roi plaidait raison à ces furieux.
« Messieurs, disait-il, comment voulez-vous que je revienne aux tailles de
ce temps-là, la vie ayant tant renchéri ? Comment voulez-vous que je
vive ? Refuser l’argent, c’est me perdre, vous perdre, et l’État avec
nous. – Alors, rugit l’un des députés, ne soyez donc point
Roi ! »
    Début décembre, un député des Tiers
ayant dit qu’«  en la supplication que les États feraient au Roi de
réformer sa maison, les quarante-cinq devraient être cassés comme
n’étant pas nécessaires », il fut fort applaudi pour l’opinion qu’on avait
que cette suggestion lui avait été soufflée par les Guise, desquels
applaudissements je requis un écho irrité, dès que je me fus retiré incontinent
en l’Auberge des deux pigeons, La Bastide et Montseris marchant qui-cy
qui-là dans la chambre en roulant des yeux furieux.
    — Cap de Diou ! disait La Bastide qui ne pouvait même pas hucher tant en son ire il
avait les dents serrées, ces Guise sont des démons incarnés ! Ils nous
veulent ôter le pain de la bouche !
    — Est-ce à mon âge, gronda
Montseris, lequel approchait la trentaine, que je vais chercher
condition ?
    — Ou retourner, dit La Bastide,
à gueuserie gasconne ! Mordi ! Je ne le souffrirai pas, sans compter
que la chose est claire. Ce Guise de merde veut retirer ses dards à la guêpe
avant que de l’écraser.
    — C’est raison ! renchérit
Montseris. Que sommes-nous céans sinon les chiens de cet agneau ? Qui
chasse les chiens veut l’agneau dévorer ! Il n’est homme qui ne
l’entende ! Cap de Diou, poursuivit-il la main sur sa dague, que le
Roi me donne ce Guise et je ferai de la dentelle avec ses tripes !
    Je répétai ces propos au Roi qui,
ayant réuni les quarante-cinq à l’aube à l’heure où M. de Guise, qui
couchait au château, sommeillait encore, étant fort las de sa nuit avec M me de Noirmoutiers – leur dit qu’en aucun cas il ne consentirait à se séparer
d’eux, étant si affectionné à leurs personnes qu’il les considérait comme ses
fils ; qu’il les aimait à proportion qu’on les haïssait ailleurs, non sans
raison, pour ce qu’ils étaient sa cuirasse et son épée ; et que, quand
bien même on le réduirait à ne plus avoir qu’un chapon pour son dîner, il le
partagerait avec eux.
    — Captatio benevolentiae, dit mon secrétaire Miroul, quand je lui répétai ces paroles. J’augure
bien du Roi. Il connaît si bien les hommes. Et il est tant habile…
    Quant à moi, je mâchellais mon mors
pour la raison que ces deux mois écoulés, et maugré je ne sais combien
d’attentements de mon Giacomi, j’avais failli à encontrer la cavalletta, et moins encore le Venetianelli, pour ce que la dame, plus méfiante que
belette, et sentant bien que nos approches venaient du Roi, ne pouvait qu’elle
ne les rebutât, son mignon se trouvant si lié à la fortune des Guise.
    Vers la mi-décembre, cependant,
ayant ouï par Giacomi que la

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