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Le Prince Que Voilà

Le Prince Que Voilà

Titel: Le Prince Que Voilà Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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que tu sais et pour cela prends la
peine de la repeindre en rose, laquelle est tout justement la couleur dont Dame
du Luc est raffolée.
    — Moussu, dit Miroul, sortant
par la portière une tête hirsute et m’envisageant, la mine très rebroussée, n’y
comptez point ! Peintre point ne suis ni ne veux être, étant fort
au-dessus, par ma condition, des métiers mécaniques. En outre, les couleurs me
puent !
    — Ha ! Mon Miroul !
dis-je, nul ne t’y force ! Si point ne le veux, point ne le fais ! Il
faudra donc appeler à la tâche quelque peintre du voisinage qui ne fera pas
mieux que toi et se peut ira clabaudant !
    Sur quoi, je le quittai avec un
soupir contrefeint, bien assuré que m’ayant dit non de cet air mal’engroin, il
allait s’y mettre de soi, et avec beaucoup de soin, dès que j’aurais tourné
l’épaule.
     
     
    Mon Angelina était au lit venant de
donner le tétin à son enfantelet, et fut fort aise de me voir, ne m’ayant pas
trouvé à son réveil, mais elle ne me voulut toutefois ni parler ni baisotter
qu’elle ne se fût allée baigner sa belle face, testonner sa blonde crinière et
parfumer son col où j’aimais fort poser mes lèvres, la peau y étant si douce.
Ce que je fis dès qu’elle eut cessé, selon son dire, d’être « trop
horrible pour être envisagée » et la tenant dans mes bras, je la badinais
là-dessus quelque peu, tandis que son bel œil de biche me considérait, plein de
muettes questions, auxquelles elle ne voulait donner voix, sur l’usage que
j’avais de mon aube. Je l’entendais fort bien, mais ne voulant point lui
révéler la vérité nue, pour ce que je craignais qu’elle ne s’inquiétât
excessivement de Larissa, je lui dis :
    — Angelina, mon petit œil, je
ne peux te dire où je fus ce matin, tenu en secret par le service du Roi, mais
je fus bien employé et d’autant que sur mon chemin, j’ai recueilli un
gentilhomme anglais navré d’un méchant coup d’épée, lequel gentilhomme
présentement dans notre chambre bleue repose, soigné et pansé par moi. Il
faudra commander à nos gens de ne l’y pas déranger, pour ce qu’il a pris de
l’opium qui l’ensommeille de ses souffrances.
    Comme je disais, mes lèvres suivant
la volute de sa suave oreille, on toqua à la porte et Gertrude, suivie de sa
belle Zara, entra, toutes deux en de flottantes robes de nuit qui découvraient
leurs belles épaules et au-delà. Elles poussèrent d’allègres cris et ris à nous
voir si bien employés à nous poutouner et nous rejoignant sur la couche, elles
firent à mon Angelina et à moi-même des mignardies à l’infini, étant toutes
deux fort affectionnées et fort friandes aussi des compliments dont je les
encensais tout le jour. Quand il s’agit des dames, je tiens qu’il faut y aller,
non au petit cuiller, mais à la truelle, comme le maçon, afin de consolider le
peu de fiance qu’ont les pauvrettes en la durée de leurs beautés. Cependant, je
ne m’y contrains, ni ne m’y contrefais en aucune guise, étant de ma complexion
si sensible aux grâces du corps féminin que je ne peux que je n’envisage une
jolie mignote sans avoir un âpre appétit à la caresser, ce qui ne se pouvant
faire tout de gob des doigts et du bec, je le fais du moins avec des mots, si
bien que le plaisir que je leur baille, je me le donne d’abord à moi-même.
    Il est vrai qu’avec Gertrude et Zara
je pouvais aller quelque peu plus loin que les paroles, et jusqu’où je ne
saurais dire, n’ayant jamais voulu pousser les choses jusqu’au point où le
recul ne serait plus courtois, les louanges prenant alors le relais de tels
actes à quoi je ne pouvais mettre la patte sans offenser Samson et mon
Angelina, et cependant il est un charme en ces mignardies-là, tout à la fois parce
qu’elles paraissent innocentes, et ne le sont point tout à fait, réservant en
catimini la portion du rêve ou du regret.
    Enfin, quand j’eus bien mignonné nos
belles dans le tiède et délicieux désordre où je les voyais, le cheveu dénoué
et n’ayant pour vêtures que leurs molles et flottantes robes de nuit sans les
rigides basquines et vertugadins dont la mode qui trotte veut qu’elles se
cuirassent ; et que les caressant, j’eusse été par elles contrecaressé
tout mon soûl (encore que mon soûl ne vienne pas si vite) je pris une mine
grave et leur contant comment j’avais recueilli ès rues un gentilhomme anglais
navré d’un coup d’épée, je le

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