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Le prix de l'indépendance

Titel: Le prix de l'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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secrétaire. Maintenant qu’il lui avait exposé l’affaire, ce dernier mènerait sa propre enquête afin de servir ses intérêts.
    Grey quitta Germain toujours assis dans son fauteuil, fixant son verre vide d’un air méditatif. Il enfila sa cape que lui tenait le clerc à la bouche tendre, qui en profita pour lui effleurer la main au passage.

    Serrant sa cape autour de lui et rabattant son chapeau pour se protéger du vent, Grey se fit la réflexion qu’après tout il ne comptait pas sur le sens des responsabilités de Germain pour élucider l’affaire ; l’homme était trop lunatique. Le cabinet de lord North comptait deux autres secrétaires d’Etat : celui du Département du Nord, qui couvrait toute l’Europe, et celui du Département du Sud, qui représentait le reste du monde. Il aurait préféré ne pas traiter du tout avec Germain mais le protocole et la diplomatie lui interdisaient de s’adresser directement à lord North, ce qui avait été sa première impulsion. Illaisserait à Germain une journée d’avance puis irait porter le déconcertant message de M. Beauchamp au secrétaire du Sud, Thomas Thynne, vicomte de Weymouth. Le secrétaire du Sud était chargé de traiter avec les nations catholiques d’Europe et de ce fait, toute affaire liée aux Français le concernait.
    Si les deux hommes décidaient de s’occuper de la question, lord North en serait certainement informé. Lui ou l’un de ses ministres viendrait alors trouver Grey.
    Un orage se préparait sur la Tamise ; il apercevait les nuages noirs s’amonceler, menaçant de déchaîner leur fureur au-dessus du Parlement.
    — Un peu de tonnerre et d’éclairs les réveillera, murmura-t-il.
    Il héla un fiacre juste au moment où les premières gouttes s’écrasaient sur les pavés.
    Le temps qu’il arrive au Beefsteak, il pleuvait à verse. Avant d’avoir franchi les trois pas qui le séparaient de l’entrée du club, il était trempé.
    M. Bodley, le vieux majordome, l’accueillit comme s’il l’avait vu la veille et non dix-huit mois plus tôt.
    — Soupe de tortue au sherry ce soir, milord.
    Il fit signe à un laquais de prendre la cape et le chapeau mouillés de Grey avant d’ajouter :
    — Excellent pour se réchauffer. Ensuite, je vous suggère une côtelette d’agneau accompagnée de pommes de terre nouvelles…
    — Ce sera parfait, monsieur Bodley.
    Il s’installa dans la salle à manger, réconfortante avec son grand feu de cheminée et ses nappes blanches. Alors qu’il penchait la tête en arrière pour laisser M. Bodley glisser un coin de la serviette sous son col, il remarqua une nouveauté dans la décoration et demanda, perplexe :
    — Qui est-ce ?
    Le tableau, accroché en évidence sur le mur qui lui faisait face, représentait un Indien en tenue d’apparat, avec plumes d’autruche et draperies brodées. Il paraissait déplacé parmi les portraits guindés de plusieurs membres éminents du club, la plupart morts et enterrés.
    — Ah, mais c’est M. Brant, naturellement ! répondit M. Bodley avec une légère pointe de reproche. M. Joseph Brant. M. Pitt l’a amené à dîner l’an dernier lorsqu’il était à Londres.
    — Brant ?
    M. Bodley arqua les sourcils. Comme la plupart des Londoniens, il présumait que quiconque avait été en Amérique connaissait tous ceux qui s’y trouvaient.
    — C’est un chef iroquois, si je ne m’abuse, répondit-il en appuyant sur le mot « iroquois ». Il était ici pour rendre visite au roi.
    — Vous m’en direz tant !
    Il se demanda qui, du roi ou de l’Iroquois, avait été le plus impressionné.
    M. Bodley se retira pour revenir presque aussitôt déposer une lettre devant Grey.
    — Ceci vous a été envoyé aux bons soins du secrétaire.
    — Ah ? Merci, monsieur Bodley.
    Les entrailles de Grey se nouèrent en reconnaissant l’écriture de son fils. Pourquoi Willie lui avait-il adressé une lettre ici plutôt que chez sa grand-mère ou chez Hal ?
    De peur qu’ils la lisent, se répondit-il aussitôt. Il saisit son couteau à poisson et l’ouvrit fébrilement.
    S’agissait-il de Richardson ? Hal éprouvait une franche antipathie pour cet homme et n’approuvait pas que William travaille pour lui, même s’il n’avait rien eu de concret à dire à son détriment. Peut-être avait-il été imprudent en poussant William dans cette voie, sachant ce qu’il savait sur le monde louche du renseignement ? D’un autre côté, il avait fallu

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