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Le prix du sang

Le prix du sang

Titel: Le prix du sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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l’ai reçu de mes parents, qui ont préféré laisser la part du lion de leur héritage à mon cadet. Ne gaspille pas ta vie à poursuivre cet objectif, mais, si un jour tu as l’opportunité de récupérer les cinq autres, ne rate pas ta chance. Elles te reviennent doublement. Tu comprendras très bien ce que je veux dire. Je sais que tu as deviné depuis des années.
    Dans sa profession, percer de juteux secrets de famille faisait partie du quotidien. Toutefois, le tabellion comprit au premier coup d’œil que le grand jeune homme ne révélerait jamais rien.
    Thalie, gracieuse parmi les grâces, la plus grande peine que j’aurai en mourant sera d’être privé de voir l’exceptionnelle personne que tu deviendras. Je te laisse tout le produit de mes assurances vie. Cela te permettra de faire tes choix librement. Souviens-toi juste que tes moyens demeureront modestes : pas de tour du monde dans un grand paquebot ou de voiture automobile. Notre petit navire commercial ne le permet pas encore. Mais qui sait, quand tu seras grande…
    Très rarement, une larme venait à l’œil d’un notaire lors de la lecture d’un testament. Cette singulière occurrence l’amena à éclaircir sa voix et à changer de position sur son grand fauteuil avant de dire :
    â€” Comme je l’expliquais, ces dernières volontés, malgré leur forme, correspondent aux usages habituels. Madame, à moins de vouloir vous disputer pour quelques dollars, vous recevrez exactement la moitié du patrimoine familial. En autant que je puisse en juger, votre commerce représente une jolie valeur. Vous pourriez le vendre, convertir le produit en une petite rente et vivre raisonnablement bien…
    â€” Je ne ferai aucune dispute, et aussi longtemps que ma santé le permettra, je dirigerai le magasin ALFRED pour assurer ma subsistance et celle des miens.
    Dubois acquiesça de la tête, récompensa d’un sourire admiratif cette femme qui continuait ainsi l’œuvre d’un époux défunt, puis il enchaîna :
    â€” Monsieur Picard, vous recevrez, toujours à quelques dollars près, le quart du patrimoine. Vous toucherez l’usufruit des parts du magasin Picard deux fois l’an, comme votre père avant vous. Cependant, avant vos vingt et un ans, vous ne pourrez ni les vendre ni les céder à quiconque. Tout de même, ce revenu constituera une jolie bourse d’études. Votre père m’a confié que vous souhaitiez vous préparer à exercer le droit.
    â€” Cela nous paraissait indiqué à tous les deux, pour un commerçant.
    â€” Si vous pensez au notariat…
    Peut-être ce grand garçon chercherait-il à acheter un cabinet déjà bien établi avec son petit capital? Le vieil homme s’arrêta toutefois, conscient que l’héritier n’obtiendrait pas son diplôme avant 1920. Sa retraite viendrait bien avant cette date.
    â€” Enfin, mademoiselle Picard, vous recevrez le dernier quart. Un peu plus, peut-être, car je comprends que le Canadien Pacifique avait des assurances afin de dédommager les familles des passagers, dans l’éventualité d’une catastrophe. Si j’interprète bien les volontés de votre père, cette somme vous reviendra aussi…
    â€” Tout ce qui dépasse la part à laquelle j’ai droit sera répartie entre nous trois dans des proportions d’une demie et de deux quarts.
    L’homme jeta un regard surpris sur la gamine. Elle se tenait bien droite dans ses vêtements de deuil, son chapeau de paille noir incliné sur l’œil droit, ses cheveux réunis en une lourde tresse. Que de prétention pour une personne du sexe, surtout à son âge : discuter du partage d’argent. Le moment demeurait toutefois mal choisi pour lui asséner un cours de droit.
    â€” Cet argent sera placé en fiducie jusqu’à votre majorité. Les intérêts vous seront versés deux fois l’an. Cela donnera, ma foi, un revenu bien imposant pour une jeune fille.
    Elle toucherait environ la même somme que son frère, ce qui semblait bien trop au notaire. La curiosité l’emporta sur son devoir de discrétion professionnelle.
    â€” Que ferez-vous de cette petite fortune?
    Convaincu d’entendre quelque chose comme « Acheter des robes et

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