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Le retour

Le retour

Titel: Le retour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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les verres
sales laissés par les invités.
     
    356
    En plus, entendre
Marie-Ange se lamenter parce qu'elle est en famille, ça me tape sur les nerfs.
     
    Les derniers
jours du mois d'août furent marqués par une chaleur et une humidité à peine
supportables. Dans le quartier, les gens avaient l'impression de vivre
emprisonnés sous une couverture mouillée tant l'air était oppressant.
     
    Les odeurs de la
Dominion Rubber et de la Dominion Oilcloth imprégnaient tout. Pas le moindre
souffle d'air ne venait rafraîchir les nuits. Les gens dormaient mal et leur
humeur s'en ressentait durant le jour.
     
    Ce vendredi-là,
Laurette travaillait dans une espèce de brouillard tant elle était épuisée par
cette chaleur insupportable.
     
    À la pause du
midi, sa robe était détrempée par la sueur et ses jambes étaient déjà enflées à
force d'avoir dû demeurer debout durant plus de quatre heures au bout de la
chaîne à entasser des boîtes de Whippet dans de grosses boîtes. Au signal de
Gendron, le contremaître, elle s'était empressée de sortir de l'usine en
compagnie de Dorothée et Lucienne pour manger son repas à l'extérieur.
     
    La plupart des
employées du département l'imitèrent et vinrent s'asseoir sur le talus qui
bordait l'entrée réservée aux camions de livraison.
     
    A peine Laurette
venait-elle de s'asseoir qu'elle aperçut Madeleine Sauvé avec trois ou quatre
de ses copines. La grande femme à la figure chevaline semblait être en train de
mimer quelqu'un, ce qui déclencha des rires chez ses spectatrices. Laurette
jeta un coup d'oeil soupçonneux dans la direction du petit groupe et crut
comprendre que l'autre se moquait d'elle.
     
    - Ah ben, attends
donc! dit-elle les dents serrées en esquissant le mouvement de se lever.
     
    357
    Lucienne Dubeau
et Dorothée Paquette avaient suivi son regard et avaient compris, elles aussi,
que l'autre se moquait de Laurette. Lucienne retint son amie par une épaule
avant même qu'elle se soit mise sur ses jambes.
     
    - Grouille pas,
Laurette, lui ordonna-t-elle. Il fait ben trop chaud pour se chamailler. Tu
vois ben qu'elle cherche juste à te mettre en maudit pour que Gendron puisse te
mettre dehors. Fais-lui pas ce plaisir-là.
     
    - Je vais lui
mettre ma main sur sa gueule pleine de boutons! ragea Laurette en faisant un
effort pour se libérer de la poigne de Lucienne.
     
    - Fais pas ça,
lui commanda Dorothée à son tour. Tu lui sacreras la volée que tu voudras quand
ton mari aura une job et que t'auras plus besoin de travailler. En attendant,
regarde-la même pas. Fais comme si elle existait pas.
     
    - Vous avez
raison, toutes les deux. Je suis trop fatiguée et il fait trop chaud, admit
Laurette en s'épongeant le front. Mais elle, la grande vache, elle perd rien
pour attendre, ajouta-t-elle.
     
    Quelques minutes
plus tard, les femmes rentrèrent dans l'usine pour reprendre le travail.
Laurette s'empressa de se diriger vers la porte de manière à y arriver en même
temps que Madeleine Sauvé. L'autre pâlit soudain en la voyant arriver à ses
côtés, probablement persuadée que sa tête de Turc préférée venait régler ses comptes
avec elle.
     
    Laurette fit
comme si elle ne la voyait pas et lui écrasa sauvagement un pied en y déposant
tout son poids.
     
    - Ayoye, bâtard!
jura la grande femme en se mettant à danser sur un pied.
     
    - Excuse-moi, la
grande, je t'avais pas vue pantoute, s'excusa hypocritement Laurette en
pénétrant dans l'usine à la suite de Dorothée et Lucienne qui avaient du mal à
retenir leur fou rire.
     
    358
    Ce soir-là,
Laurette revint à la maison un peu avant six heures. En descendant de tramway,
coin Fullum, elle aperçut sa cadette, rentrant de son travail chez Carrière, en
grande conversation avec René Beaulieu, le jeune fils des locataires qui
demeuraient au-dessus de chez elle. Elle fit comme si elle ne l'avait pas vue
et rentra à la maison.
     
    Denise, Gilles et
Richard étaient en train de manger un sandwich lorsqu'elle arriva.
     
    - Il doit pas
faire plus chaud en enfer, dit-elle en se débarrassant de ses souliers, appuyée
contre le mur du couloir. Où est votre père?
     
    - Sur le balcon,
répondit Denise. Il vous attendait pour souper.
     
    Cinq minutes plus
tard, Carole poussa la porte de l'appartement au moment même où son père
s'approchait de la table dans l'intention de manger.
     
    - Combien de fois
je t'ai dit que je voulais pas te voir traîner avec des gars sur la

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